L'an dernier, à l'occasion de son cinquième anniversaire, Spotify a diffusé une infographie dans laquelle le service d'écoute de musique en ligne révélait qu'une chanson sur cinq de son catalogue n'a jamais été écoutée. Celui-ci étant fort de quelques 20 millions de titres, cela signifie donc que près de 4 millions de morceaux demeurent ignorés des auditeurs.
Évidemment, ce constat peut être analysé différemment selon que l'on voit le verre à moitié plein ou à moitié vide. L'on peut aussi dire qu'en cinq ans d'existence, Spotify a déjà fait découvrir 80 % de son catalogue à ses usagers et qu'il existe par ailleurs des outils (comme Forgotify) dont la tâche est justement de mettre en valeur les pistes qui n'ont toujours pas eu la chance d'être écoutées.
Cependant, ces statistiques cachent une autre réalité qui a récemment été mise en lumière par Paul Lamere, le directeur de la plateforme de développement pour The Echo Nest. Sur son blog dédié à la musique et à la technologie, Music Machinery, signalé par Slate, il a constaté que si beaucoup de chansons sont écoutées, il y a une chance sur deux pour que l'auditeur zappe en cours d'écoute.
Paul Lamere a ainsi puisé dans les données de Spotify et remarqué que le bouton "passer" ("skip") et noté que la probabilité d'un changement de titre est de 24,14 % dès les 5 premières secondes de la chanson. Cette chance passe à 28,97 % au bout de 10 secondes, puis à 35,05 % au bout de 30 secondes et atteint enfin 48,6 % avant que la musique ne s'achève.
Après avoir "traité plusieurs milliards de chansons jouées par plusieurs millions d'auditeurs uniques venant du monde entier", Paul Lamere a noté qu'indéniablement "le bouton 'skip' fait maintenant partie de l'expérience d'écoute". Celui-ci est d'ailleurs utilisé en moyenne toutes les 4 minutes, davantage par les jeunes (moins de vingt ans) que par les classes d'âge plus élevées.
Faut-il comprendre que le numérique favorise une "culture du zapping", avec des internautes qui picorent des informations ici ou là, passant d'un contenu à un autre sans s'y attarder ? Ou bien est-ce parce que la musique, n'ayant jamais été aussi accessible et abondante, oblige les internautes à se montrer plus sélectifs, quitte à ignorer rapidement un titre qui ne les convainc pas ?
Pour Paul Lamere, il y a un peu de ça. Il rappelle d'ailleurs que "l'expérience d'écoute [d'autrefois] était très différente de celle d'aujourd'hui. Si vous n'aimiez pas une chanson en cours de lecture, il fallait vous lever, vous déplacer jusqu'à la platine d'écoute et déplacer l'aiguille sur le morceau suivant. C'était beaucoup de travail pour éviter les trois minutes d'une chanson déplaisante".
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