Paris Games Week, on le sait, est l’événement jeu vidéo en France, qui permet à tout un chacun de découvrir les dernières actualités, d’admirer ses équipes eSport favorites ou encore d’expérimenter de nouveaux horizons sur le stand des jeux indépendants de France et d’ailleurs.
Cette année, le salon poursuivait un objectif supplémentaire : il s’agissait de faire de la Paris Games Week un rendez-vous pour tous, vraiment tous, même ceux dont on oublie parfois que le jeu vidéo en tant que loisir, média ou secteur professionnel n’est pas facilement à portée de main.
C’est ainsi que le S.E.L.L., syndicat d’éditeurs et organisateur du salon a invité diverses associations oeuvrant dans leur domaine respectifs pour donner un nouveau regard sur le jeu vidéo, ses joueurs et celles et ceux dont c’est le métier. L’édition 2017 a notamment accueilli en son sein l’association Women in Games, dont l’antenne française a été créée cet été, mais aussi Capgame et Game Lovers qui ont pour objectif de favoriser l’accès des jeux vidéo aux personnes à mobilité réduites. Un autre événement s’est également organisé en marge du salon, la Paris Games Queer, qui proposait une alternative inclusive à la Paris Games Week.
Pour une meilleure représentation des femmes dans l’industrie
Pour une fois que la Paris Games Week ne se résume pas seulement à un brouhaha incessant, une déroutante promiscuité et des interminables heures d’attente pour poser les mains 5 minutes sur le dernier titre sorti, il fallait que l’on en parle. Le salon est devenu cette année un rendez-vous pour un nouveau regard sur le jeu vidéo et amorcera, on l’espère, la pérennisation des divers mouvements que l’on a vu naître ou s’affirmer durant cette édition.
Parmi eux le projet de Julie Chalmette, présidente du S.E.L.L., manager général de Bethesda et vice présidente de Women in Game France, filiale de l’association Women in Games Jobs créée au Royaume-Uni. L’association WIG a pour ambition de sensibiliser amateurs et professionnels du jeu vidéo pour la représentation des femmes dans les métiers du secteur.
À cette occasion, Women in Games s’est associée avec GameCode afin de proposer des initiations au développement aux plus jeunes, filles comme garçons. « Nous appelons les femmes du jeu à se mobiliser et à se rendre plus visibles pour à leur tour inspirer les plus jeunes. C’est ensemble, en conjuguant nos énergies et nos talents,que nous pouvons faire bouger les lignes » souligne Julie Chalmette.
Le vendredi soir, Women in Games organisait également un atelier networking et présentation de l’association auprès des professionnelles du jeu vidéo. Là encore, hommes et femmes — pour une fois en majorité — apprennent à faire connaissance et à élargir leur réseau sur fond d’un jeu de puzzle à constituer entre participant(e)s. Une session de conférence a également eu lieu, modérée par Audrey Leprince, co-fondatrice du studio Game Bakers (Furi) et présidente de l’association, accompagnée de diverses intervenantes faisant part de leur expérience dans le monde professionnel du secteur vidéoludique.
Basée sur la sensibilisation et l’entraide des femmes travaillant dans le secteur, l’association a pour but d’organiser prochainement des ateliers, conférences et rencontres, notamment sur la création d’un CV et d’autres formations professionnelles.
Capgame et Game Lover sensibilisent au handicap
Autres invités du S.E.L.L. à la Paris Games Week, c’est la première fois que les associations Capgame et Game Lover avaient leur propre stand sur le salon, et par extension la première fois que l’on trouvait des représentants officiels des passionnés de jeux vidéo dotés d’un handicap. Capgame est en effet une association qui œuvre pour faciliter l’accès des jeux vidéo aux personnes à mobilité réduite. Déjà présent à Angoulême quelques jours auparavant, son président Jerome Dupire est accompagné de ses associés pour présenter leurs actions.
Avec eux, l’équipe de Game Lover est au grand complet. Game Lover est un blog d’information tenu par des membres de l’association Papillons Blancs de Roubaix-Tourcoing. Accompagné de Stéphane, éducateur et plume du blog, les sept compères, tous atteints d’un handicap moteur, visuel, auditif ou mental testent une multitude de jeux afin de déterminer si ceux-ci sont facilement jouable selon les diverses déficiences. Game Lover se construit donc comme un véritable guide destiné aux joueurs handicapés, afin de savoir s’ils pourront jouer facilement ou non aux plus grands titres.
D’abord confidentielle, l’initiative finit par se faire petit à petit remarquer à force de discussions avec les éditeurs et développeurs. Les testeurs reçoivent désormais leurs jeux pour les tester et sont parfois appelés comme consultants sur des questions de design et d’accessibilité de projets.
Sur le stand, les consoles chauffent sous la pratique effrénée de la clique, mais ce qu’on remarque aussi, ce sont les curieuses modifications subies par les manettes de Xbox et de PlayStation. Certaines sont dotées d’un bouton en plus dans le dos, d’autres appareils sont munis d’une boule pour les déplacements des personnages… On est presque surpris de se souvenir de l’existence du Kinect en remarquant sa présence sur le stand. Tous ces objets ont pourtant une importance capitale pour les joueurs handicapés. Ils leurs permettent de pouvoir prendre en main un outil qui leur était inaccessible jusqu’à aujourd’hui : le contrôleur.
« En 2012, la problématique était encore de créer des jeux spéciaux adaptés aux handicapés, explique Jerome Dupire. Or, ce sont des démarches qui creusent la marginalisation au lieu de la combler. Les personnes handicapées veulent pouvoir jouer à Call of Duty, Assassin’s Creed, des jeux du grand public ! Nous oeuvrons pour une initiative inclusive des jeux vidéo. »
La Paris Games Queer bat son plein hors les murs
Dans un contexte un peu plus marginal, en parallèle du salon, s’est tenu la Paris Games Queer au hackerspace du Reset à Paris. Créé par Zora et Moossye, les atelier queer games ont vu le jour en 2015. « Le terme de ‘queer game’ ne définit pas un genre de jeu spécifique ou un gameplay particulier, comme cela peut être le cas pour les jeux de rôle ou les jeux de tir par exemple, précise Moossye. Il est plutôt employé pour parler d’un ensemble très varié de jeux créés par et pour des personnes queers, souvent épuisées d’être invisibles ou représentées par des stéréotypes blessants dans les jeux vidéo. »
La création de ces jeux donnent souvent naissance à des jeux autobiographiques, avec des situations et des histoires réelles dans lesquelles les personnages sont confrontés à l’homophobie, la transphobie ou le racisme. Moossye poursuit : « Il y a aussi des jeux plus légers, d’autres avec beaucoup d’imagination, ou encore des détournements de genre de jeu bien connus, comme le puzzle game (pour TRIAD) ou le jeu Pac-Man (Lesbian Spider-Queens of Mars) par exemple. »
Si l’équipe de la Paris Games Queer organise des ateliers très régulièrement, c’est la première fois que Zora, Moossye, Sam, Izawenn et Alicemonade s’attèlent à la mise en place d’une journée entière dédiée au sujet. On pouvait y trouver des ateliers d’initiation à des logiciels de conception, à l’écriture interactive et de créations diverses et se détendre le soir avec un concert de chiptune.
« C’est tellement agréable de voir autant de créativité et d’idées qui fusent en une journée, d’entendre des personnes s’exclamer ‘mais en fait c’est super simple !’ alors qu’elles se déclaraient complètement néophytes quelques minutes plus tôt, se réjouit Moossye. L’espace de jeu ne désemplissait pas, tandis que d’autres visiteurs et visiteuses ont emprunté les livres que nous proposions pour les parcourir durant tout l’après-midi. C’est génial d’avoir pu partager tout cela avec autant de personnes ! »
Petit à petit, les démarches et initiatives prennent de l’ampleur pour montrer que chacun a sa place dans le monde du jeu vidéo, que ce soit sur un plan professionnel ou tout simplement pour pouvoir profiter d’un titre qui nous parle et nous touche. La question de l’inclusivité est un sujet qui prend de plus en plus d’ampleur dans les espaces de paroles et d’actions, et chacun tente d’élargir son scope de la représentation dans le jeu vidéo.
« À notre niveau, nous tentons d’élargir cette question du genre et de l’inclusion des femmes : l’atelier queer games et le RESET regroupent des femmes, des personnes racisées, des personnes queers, en situation de handicap, des personnes pauvres, précaires… Ensemble, nous échangeons et nous faisons des projets à partir nos expériences minorisées, dans le jeu vidéo, mais aussi plus largement dans le domaine des sciences et techniques » conclut Moossye.
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