Il y aura toujours des camps qui s’affronteront jusqu’à l’apocalypse : les LEGO versus les Playmobil, les biscuits BN versus les Prince de LU, Star Trek versus Star Wars et, dans le jeu vidéo, Sonic versus Mario. Ces dernières années, difficile de ne pas plaindre les fans du hérisson bleu de Sega.
La firme nippone multiplie les adaptations pour capitaliser sur sa licence forte, offrant à boire et à manger alors qu’en face, le moustachu de Nintendo n’a jamais réellement perdu de sa superbe. Récemment, il y a quand même eu Sonic Mania, réaffirmant cette idée que le retour aux sources peut faire du bien au cœur. Mais, aujourd’hui, il y a aussi Sonic Forces, un nouveau titre en 3D aux ambitions plus élevées, mais à la douche bien plus froide.
Le non-gameplay
Rien n’oblige à aimer Sonic et on peut aisément trouver des tonnes de défauts à ses aventures. Le personnage, si sympathique soit-il, a vite trouvé ses limites et le passage à la 3D n’a pas arrangé son cas, il l’a même empiré dès lors que Sega s’est contenté de la simple transposition (comparativement aux excellents Sonic Adventure).
Sonic Forces nous rappelle donc sans cesse que ce qui a fonctionné à plat ne garantit rien avec une dimension supplémentaire. Et si le jeu mélange gratuitement les deux, le gameplay, dans sa globalité, reste maladroit : on se contente de foncer, tête baissée, sans réfléchir, en priant pour qu’il n’y ait aucun obstacle sur la route — puisqu’on n’y voit rien — et en s’étonnant que nous soyons déjà arrivés au bout du niveau. Sonic Forces c’est un peu cette idée du non-gameplay et il n’y a rien de fun là-dedans.
Sonic Forces c’est un peu cette idée du non-gameplay
Pour masquer un peu la misère, Sega mise sur le fan-service à outrance, les références par dizaines à l’univers s’articulant autour de sa mascotte. Un point qui permettra à ses amoureux d’avaler un peu mieux la pilule, d’autant que Forces convoque nombre de personnages venus agrémenter le casting au gré des itérations. En guise de nouveauté, on a droit à une énième copie maléfique et survitaminée de Sonic, créée par Eggman à partir d’un Rubis fantôme, et à l’obligation de se créer son propre avatar à incarner dans certains niveaux.
Une opportunité justifiée par le scénario : au début du jeu, le héros se fait battre, les méchants gagnent et une résistance se crée autour d’une recrue — votre personnage (on peut créer un chat, youpi). Tout un programme misant sur des cinématiques longuettes, mal découpées et balançant des belles phrases un tantinet naïves sur le pouvoir de l’amitié et de la solidarité. Ouin ouin.
Vite fini, vite oublié
Certes, on s’en fout un peu de l’intrigue, mais, ici, elle casse le rythme d’une expérience se basant sur la vitesse pour donner envie aux joueurs de terminer la trentaine de niveaux mélangeant divers héros (Sonic 3D, Sonic 2D et notre avatar) sans trop que l’on sache vraiment pourquoi en dehors du choc des générations (comme dans Sonic Generations). De toute évidence, les portions en 2D sont celles qui s’en sortent le mieux par l’hommage qu’elles rendent aux titres d’antan.
En 3D, le constat est beaucoup moins élogieux : c’est souvent le barnum à l’écran, les boss sont vite expédiés (quand ils ne se résument pas à une seule QTE impossible à louper) et les sensations de vitesse vertigineuse s’avèrent finalement indigestes pour bien suivre l’action. On ajoutera les nombreux passages automatiques qui agacent plus qu’ils n’impressionnent et l’argument épique qui est resté dans les tiroirs.
Pour pimenter un peu Sonic Forces, les développeurs ont pensé à intégrer des éléments de personnalisation. Basiquement, on débloque des objets cosmétiques en achevant des missions et des défis pour pouvoir habiller notre personnage comme une poupée. À quoi ça sert ? On se le demande encore. Plus intéressant pour le gameplay, une arme est fournie pour se débarrasser des ennemis et jouir d’un pouvoir temporaire permettant d’accéder à des zones un peu cachées (exemple : un lance-flamme qui sert aussi de jet-pack). Ce n’est pas très Sonic-friendly, mais l’idée d’incarner quelqu’un d’autre que lui ne l’est pas non plus.
Une pause s’impose
Plus Sonic-Friendy, en revanche, le but in fine est bel et bien d’aller le plus vite possible, ce qui régit la note finale attribuée jusqu’au rang S. Dès lors, on n’a pas vraiment le temps de profiter des décors basés sur des ambiances bien connues de la franchise, mixant le naturel et l’urbain.
On n’est pas là pour faire du tourisme, mais pour franchir le drapeau à damiers avec un chrono digne de ce nom. En background, terminer des niveaux libère le monde du joug d’Eggman et débloque des tâches annexes visant à gonfler une durée de vie rachitique en s’axant uniquement sur l’histoire (trois ou quatre heures grands maximum, sans éprouver de difficulté particulière).
On aimerait aimer ce Sonic Forces, qui distille quand même quelques bonnes idées. Elles sont juste mal mises en valeur, inexploitées ou diluées dans un gameplay aléatoire où tout est forcé, rien ne donne envie de continuer, si ce n’est d’en finir à vitesse grand v. Surtout avec cette bande son rock’n’roll insupportable ne méritant rien d’autre que d’être coupée. Heureusement que le jeu est coloré et plutôt propre techniquement. Sans quoi la sortie de piste aurait été totale, un peu à l’image des nombreux virages loupés par Sonic tout au long de sa carrière. Il faudrait songer à la retraite, au moins à des vacances pour se reposer et repartir — enfin — du bon pied après avoir presque tout essayé.
Sonic Forces est disponible sur PS4, Xbox One et Switch pour une trentaine d’euros.
Le verdict
Sonic Forces
On a aimé
- Sonic 2D est craquant
- Coloré et mignon
- Le fan service
On a moins aimé
- Ultra court
- Trop de passages vite expédiés
- Une formule globalement médiocre
Sonic Forces n'est pas le pire Sonic sorti ces dernières années (les adaptations liées à la série animée étaient bien plus ridicules encore) mais il est loin d'être le meilleur. Très loin même. Alors que Sonic Mania avait réussi son hommage, Sega pensait sans doute transformer l'essai avec cet épisode mêlant 2D et 3D. Malgré les bonnes intentions, le soin apporté à l'habillage (hormis la musique) et le fan service, c'est globalement médiocre et le hérisson doit se résoudre à repasser une nouvelle fois par les stands.
Paralysé par son non-gameplay (les passages automatiques, les QTE) et ne mettant jamais en valeur ses rares bonnes idées (les portions tête à l'envers, l'aspect coopératif entre les héros), Sonic Forces est la preuve supplémentaire que la mascotte de Sega apparaît de plus en plus fatiguée avec le temps qui passe. Non pas que l'on n'a plus envie de la voir du au regard de son statut d'icône vidéoludique mais peut-être que le moment est venu de se remettre en question et de prendre un virage beaucoup plus radical. Comme d'autres l'ont fait.
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