Aux dernières heures de la PlayStation 2, rares sont ceux qui ont craqué pour Ôkami, l’une des pépites signées feu Clover Studio, tirée à peu d’exemplaires à l’époque de sa sortie (en 2007) et méritant qu’on lui prête une attention au moins aussi grande que d’autres franchises cultes. Adulé par la presse, porté au rang mérité de chef d’œuvre, Ôkami a tenté de se refaire la cerise à deux reprises : sur Wii, où la Wiimote rend honneur à son gameplay basé sur un pinceau magique, et sur PlayStation 3, en version HD.
Aujourd’hui, le jeu d’aventure à la patte artistique aussi marquée que marquante ouvre bien davantage ses horizons et s’offre d’autres chances avec une sortie sur sur PlayStation 4 (Pro), Xbox One (X) et même PC. En HD bien sûr. Voire en 4K en cas d’équipement idoine.
100 % amour
De toute évidence, il apparaît difficile de ne pas tomber amoureux d’Ôkami dès les premières secondes. Le jeu, déjà beau à son lancement, l’est toujours aujourd’hui, bien davantage encore avec les résolutions actuelles (on peut jouer en 4/3 si on le souhaite). Une longévité visuelle qu’il doit à une direction artistique articulée autour d’un cel-shading d’orfèvre, grossissant volontairement les traits pour appuyer les détails, en supprimant d’autres pour se donner un supplément d’âme, baignant le joueur dans un océan de couleurs chatoyantes pour mettre en exergue ses estampes. Clover Studio est parvenu à donner vie à un un univers japonais ne demandant paradoxalement qu’à renaître.
Il y a de la magie, de la poésie. C’est vibrant, mirifique. Effrayant quand il le faut, enthousiasmant quand c’est nécessaire, soit quasiment tout le temps. Ôkami est avant tout un voyage pour les yeux, une œuvre à contempler sans déplaisir. Une invitation à l’exode, à la découverte du folklore japonais dans tout ce qu’il y a de plus étonnant, de plus exaltant, de plus clivant, de plus agaçant.
Nous voilà en face d’un portrait où rien n’est laissé au hasard, où tout a quelque chose à raconter. Un peu trop d’ailleurs, quitte à noyer l’environnement sous une pluie de dialogue façon yaourt (ce qui peut vite taper sur le système). Le simple fait que ces qualificatifs soient encore vrais aujourd’hui concourent à un seul constat implacable rangé derrière ces arguments : Ôkami est tout simplement intemporel. Dans le sillages des légendes qui la nourrissent.
Une aventure phénoménale
Mais cet habillage éloquent cache une réalité bien plus agréable encore, à savoir une épopée avec un é majuscule. HD ou pas HD, 4K ou pas 4K, Ôkami s’appuie sur des mécaniques brillantes, matérialisées par l’usage d’un pinceau céleste autorisant de multiples interactions divines (oubliez le traçage au trackpad sur PS4 et optez pour le stick gauche d’origine) et des combats en arène face à un bestiaire bien pensé. D’un simple trait, on peut découper n’importe quoi ou presque. Avec un cercle grossier, on fait apparaître un soleil chaud dans le ciel. Un rond et un petit bâton ? Une bombe fera tout exploser à l’écran. Ce n’est qu’un aperçu de tout ce qu’il est possible de faire dans ce jeu où l’on incarne la Déesse du Soleil Amaterasu, alors réincarnée en louve blanche et chargée d’arrêter Orochi, l’horrible dragon à huit têtes.
Cette intrigue relativement classique s’estompe vite au gré des petites histoires qui peuplent l’aventure et renseignent sur la culture nippone au sens large, qu’elle soit micro ou macro. Naturellement, les thématiques abordées sont nombreuses, allant du rapport à la religion (les hommes se désintéressent de plus en plus des Kami) à l’héroïsme nécessaire, au dépassement de soi. Riche et généreux, Ôkami est capable de convoquer une foule d’émotions, des sourires arrachés devant certaines absurdités légitimes à l’émerveillement dans sa forme la plus pure. Et on ne parle pas d’une quête principale de quelques heures : le titre est très long et recèle d’à-côtés et de secrets à percer dans un monde semi-ouvert – le fameux Nippon, découpé en plusieurs zones ultra variées (des montagnes, des steppes, des cavernes…).
La quasi perfection
Il est dès lors légitime de penser, sinon d’affirmer, que la production de Clover Studio titille la perfection. Elle la caresse, pour ainsi dire, au devant de ce sentiment d’accomplir de grandes choses — redonner la foi et des couleurs à un monde poussiéreux et enfermé — afin de rendre plus heureux une palanquée de PNJ ne demandant que ça.
Il y aura, hélas, toujours des ombres au tableau : on citera volontiers cette caméra capricieuse et à la configuration inversée par défaut, ou encore cette maniabilité un peu lourde malgré la grâce de l’héroïne. Sans oublier ces fichus dialogues en yaourt… Pour le reste, nous sommes plus que jamais en face d’un miracle vidéoludique n’ayant tristement pas empêché Clover Studio de finir maudit par la suite. Qu’importe puisque les dieux et les légendes sont éternels.
Ôkami HD est disponible pour 24,99 €.
Le verdict
Ôkami HD
On a aimé
- Une direction artistique magnifique et intemporelle
- Une aventure grandiose
- Des mécaniques loin d'avoir vieilli
On a moins aimé
- Caméra capricieuse
- Trop de dialogues, trop de yaourt
- Il faut l'acheter maintenant
Pépite en 2007, pépite en 2017. Voilà comment se résume la vaste aventure Ôkami, qui s'offre son ultime écrin pour s'efforcer de convaincre les réticents. Intemporel, toujours aussi magnifique visuellement, charmant à en pleurer, le jeu de Clover Studio matérialise la réussite quasi parfaite, fruit d'une somme de petits détails formant un tout enivrant et plaisant.
Les mots manqueraient presque pour qualifier Ôkami HD alors autant terminer par un conseil simple : si vous l'aviez loupé à l'époque de son lancement, vous n'avez désormais plus aucune excuse. Et qu'elle soit en SD, en HD ou en 4K, la quête d'Amaterasu mérite juste d'être vécue telle quelle. Avec ses nombreuses qualités et ses rares défauts. Il y a dix ans, maintenant ou dans dix ans.
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