Le Nintendo Labo est venu rappeler à tout le monde toute l’ingéniosité, la créativité et l’imagination de Nintendo quand il s’agit de trouver des nouvelles manières de jouer. Pendant que les autres reprennent leur course à la puissance ou s’étripent sur le marché de la réalité virtuelle, le géant japonais transforme de vulgaires bouts de cartons en accessoires donnant naissance à des expériences interactives inédites.
C’est tout un savoir-faire, doublé d’une volonté de faire évoluer le segment toys-to-life sur lequel Warner Bros. et Disney se sont cassés les dents et d’un certain sens de la communication retrouvé (la promesse a vite été comprise, comme naguère celle de la Switch). Mais le concept, si prometteur soit-il, affiche déjà certaines limites et cache un business model qui fait hérisser le poil. Analysons un peu.
Nintendo Lab : pourquoi c’est cool ?
Nintendo se fiche bien de savoir dans quelle époque on vit. Et c’est tant mieux. Son Labo ne s’inscrit pas dans l’air du temps et refuse de céder aux sirènes du gamin d’aujourd’hui qui préfère une tablette à des briques LEGO. Avec son produit attendu pour avril, la firme nippone ajoute une couche atelier pratique au jeu vidéo, sans tomber dans la complexité non plus (pas de colle ni de peinture).
On n’est pas dans l’art plastique, mais plutôt dans la construction ludique à partir de patrons et de schémas dispensés sur l’écran de la Switch. On peut imaginer des parents passer des après-midi à concevoir ces fameux Toy-Con en compagnie de leurs enfants. C’est déjà un sacré argument à faire valoir, sans oublier les possibilités de personnalisation (nous y reviendrons).
Ensuite, le Nintendo Labo reste quand même une mine d’or d’expériences à vivre. Comme toujours avec ce type de proposition, on peut s’attendre à des trucs réussis et des trucs ratés. Mais l’un des leitmotive s’articule autour de la découverte. Et on ne découvre pas toujours des choses cool. Une fois que vous avez monté votre canne à pêche en carton, vous allez donc pouvoir pêcher virtuellement grâce aux technologies embarquées dans la Switch. Là aussi, Nintendo s’est cassé la tête pour optimiser les caractéristiques en mettant à contribution l’interface tactile de la Switch, le capteur infrarouge du Joy-Con droit ou encore les vibrations HD par un jeu d’emboîtement. Exemple avec le piano : pour faire sortir les bonnes notes, le Joy-Con capte les surfaces réfléchissantes situées au dos des touches et transmet les informations à la console.
Ce n’est pas juste du carton : c’est du grand art.
Pour le moment, Nintendo Labo se cantonnera à des mini-jeux qui amuseront quelques heures. On espère dès lors que le champ d’application s’étendra vers de vrais jeux. On pense à un Mario x Labo nanti d’un gameplay mélangeant l’exigence de la franchise avec la promesse des Toy-Con. On a le droit de rêver.
Nintendo Lab : pourquoi c’est pas cool ?
On peut rester ébahi pendant des jours sur le Nintendo Labo, en affirmant que c’est génial, que Nintendo repousse les limites en faisant différemment. Ce n’est pas faux. Mais la cible du concept — les enfants — est déjà une première barrière. Quel individu âgé de plus de cinq ans a envie de pêcher avec une canne en carton en 2018 ? La question mérite d’être posée. De même, combien de temps le Nintendo Labo peut-il tenir sur la durée ? Le pack de base, vendu 70 $ et reposant sur cinq constructions, ne devrait pas occuper plus d’une après-midi, les jeunes ayant tendance à vite s’amuser, vite zapper. L’autre problème suscité par cette cible.
En l’état, sur sa partie physique, Nintendo Labo est moins bien qu’une boîte LEGO. Avec une boîte LEGO, vous pouvez construire, déconstruire, modifier, améliorer, repenser. Avec Nintendo Labo, il faudra se plier à un plan et s’y tenir, nonobstant la solidité du carton (un point qui reste obscur, mais qui forcerait les gens à repasser à la caisse). Du côté de la partie virtuelle, Nintendo Labo semble un peu trop reposer sur des mini-jeux plutôt que des jeux à proprement parler. On a suffisamment reproché ce défaut à la réalité virtuelle pour ne pas le citer, aussi, ici.
Et puis il y a le prix… 70 $ pour trois bouts de carton et l’application qui va avec ; 80 $ pour ressembler à une tortue ninja jouer au robot. Nintendo Labo reprend le juteux business model des toys-to-life, le même qui a précipité le glas du segment avec des kits additionnels à acheter, à acheter et à acheter.
On peut parler de DLC physique sachant que Nintendo n’a pas oublié d’intégrer des microtransactions prenant la forme de packs de personnalisation (stickers, pochoirs, etc). La justification est la même : ce n’est pas grave puisque ce n’est que cosmétique. Mouais.
Du coup, on a quand même bien envie d’essayer Nintendo Lab pour répondre à l’appel de la curiosité. C’est la première grande victoire de Nintendo : avoir réussi la communication. Maintenant, on a très peur de vite passer à autre chose. Comme avec tous ces concepts simplistes qui font d’abord rêver avant d’être trop vite oubliés.
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