Il a fallu attendre la rentrée scolaire 2017 pour qu’un manuel représente enfin correctement l’appareil génital féminin : en septembre dernier, les éditions Magnard ont repensé leurs schémas, présentant le clitoris comme partie intégrante de la vulve. Un an plus tôt, la chercheuse indépendante Odile Fillod, spécialisée dans la sociologie des sciences et de la vulgarisation scientifique, créait un modèle de clitoris imprimable en trois dimensions.
Pour contribuer à une meilleure connaissance du sexe féminin, un projet d’encyclopédie en ligne a vu le jour au Mexique. Porté par Zoe Mandelson, Jackie Jahn et María Conejo, cette encyclopédie baptisée « Pussypedia » a d’abord fait l’objet d’une campagne de financement participatif en novembre dernier sur Kickstarter. Ce crowdfunding est désormais clos, et auréolé de succès : au total, les trois Mexicaines ont récolté plus de 18 500 €.
Un tabou culturel
« Une fois, j’ai cherché sur Google si, oui ou non, toutes les femmes pouvaient éjaculer. Je n’ai rien trouvé de concluant sur le sujet, mais je suis tombée sur l’article d’une revue médicale au sujet de l’orgasme clitoridien, et de l’orgasme du point G, qui ne sont en fait pas deux choses distinctes. […] J’étais certaine que n’importe quelle personne avec une chatte [ndlr : « pussy »] de mon entourage voudrait connaître cette information », écrit ainsi Zoe Mandelson pour présenter la genèse de Pussypedia.
La journaliste constate alors que la plupart des observations médicales sur le sexe féminin se bornent à sa fonction reproductive. « En dehors de la médecine, les personnes avec une vulve vivant en Occident ont été privées d’informations sur leurs corps pendant des siècles, pour des raisons culturelles, religieuses et patriarcales », poursuit-elle.
Avec Pussypedia, l’objectif est donc de pallier ce manque d’informations, et d’offrir à toute personne qui le souhaite de parfaire sa connaissance des organes génitaux féminins. Par la même occasion, les porteuses du projet veulent lutter contre certains tabous, comme ceux associés aux menstruations.
L’encyclopédie en ligne sera ainsi gratuite et bilingue, puisque rédigée en espagnol et en anglais. Le site proposera à ses visiteurs une représentation du vagin et des autres organes de l’appareil génital féminin, en trois dimensions. Chaque article devrait intégrer des visualisations en 3D pour expliquer les thèmes abordés.
Un schéma en trois dimensions
Or, une grosse partie du travail des créatrices de Pussypedia va justement consister à récolter des informations de qualité. « La plupart des informations que nous apprenons sur notre corps viennent des annonceurs, qui essayent de nous vendre des produits dont nous n’avons non seulement pas besoin, mais qui nous font aussi du mal », poursuit Zoe Mandelson.
Règles, ménopause, sexualité, masturbation, contraception, prévention des infections sexuellement transmissibles et IVG feront partie des thèmes abordés par l’encyclopédie. Les créatrices de Pussypedia veulent ainsi vulgariser les connaissances scientifiques sur le sexe féminin, et apporter des éléments de réponse à certains débats — comme la relation entre le clitoris et le vagin dans le plaisir sexuel.
Une approche inclusive
Rédigée dans un langage accessible, la plateforme devrait également prendre soin de parler à toutes les personnes dont le sexe est socialement considéré comme féminin, mais qui ne se sentent pas forcément appartenir à ce genre.
En tant que femmes cisgenres, les porteuses du projet souhaitent solliciter l’avis de personnes transgenres ou non binaires pour proposer une encyclopédie la plus inclusive possible. Une partie des fonds récoltés lors du crowdfunding sera utilisée à cette fin.
« Nous nous réapproprions le mot chatte »
Les trois Mexicaines expliquent enfin pourquoi elles ont préféré le terme de « pussy » à ceux de vagin ou de vulve : « Nous nous réapproprions le mot chatte car nous aimons ce mot. De plus, le mot vagin ne fait référence, anatomiquement, qu’au canal vaginal ». Surtout, les créatrices de Pussypedia préfèrent éviter de parler de sexe féminin, pour lui préférer l’expression « personnes avec une chatte » (« people with pussies »), qu’elles jugent plus englobante et représentative.
Leur « encyclopédie de la chatte » devrait être mise en ligne en 2019.
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