Solo, le film, a une histoire peut-être aussi chaotique que Solo, le plus grand pilote de la galaxie. Pour Disney, c’est un de ces projets maudits qui doit changer de réalisateur en plein milieu du tournage et pour lesquels les directeurs de casting ont préféré une belle gueule à un acteur dont le talent est reconnu. Dans le meilleur des scénarii, une excellente réalisation parvient à sublimer des acteurs moyens. Mais quand la direction par à vau-l’eau, tout est compromis…
Ajoutez à cela une idée pas folichonne (qui a envie de démystifier un personnage aussi légendaire ?) et les recettes industrielles de Disney qui souhaite servir du Star Wars jusqu’à la fin des temps, comme on sert des sushis sur des chaînes automatiques dans un fast-food à volonté et vous aurez la recette parfaite du raté industriel.
Mais Disney n’est pas n’importe quel studio. Les équipes de talent qui nous ont fait vibrer par trois fois avec Le Réveil de la Force, Rogue One et Les Derniers Jedi ont-elles réussi à conjurer le mauvais sort ?
L’heure de trop
Solo ne raconte au fond qu’une histoire : celle du fameux Kessel Run. Ce nom ne vous dit rien ? C’est une anecdote que raconte Han Solo dans ses premières minutes à l’écran : le Faucon Millenium, dit-il pour rassurer ses mystérieux clients, a fait le Kessel Run en 12 parsecs. Cette information qui n’a aucun sens pour comprendre l’histoire qui va lancer la saga semble impressionner ses convives : 41 ans après, Star Wars va nous raconter cette anecdote.
Mais quand bien même il s’agit du sujet principal du film, on peine à y arriver. L’introduction de Solo est aussi molle et faible que le générique qui n’a aucune idée, ne reprenant ni l’esthétique des introductions canon, ni le côté in medias res violent qui donnait à Rogue One son ton dès le premier accord de l’orchestre. On suit un jeune Solo qui peine à convaincre dans des courses poursuites ennuyeuses. C’est assez perturbant d’ailleurs car on sait Disney habile quand il s’agit d’en mettre plein les yeux : ici, on a l’impression de voir des Twingo de l’espace faire la course en ligne droite. On est loin de l’intensité et de la vitesse de la course de pods du premier épisode tant décrié.
Jusqu’au premier frisson du film, qui arrive à peu près à l’heure de tournage, les références vont s’enchaîner. Celui qui connaît Star Wars par cœur prendra ces informations avec des « ah, ça vient de là » dubitatifs. On apprend pourquoi Solo, pourquoi le flingue de Solo, pourquoi Chewbacca, pourquoi les dés en or de Solo qui pendouillent à l’avant du Faucon depuis l’épisode IV et ont fait une apparition remarquée dans les Derniers Jedi. On ne s’était jamais posé les questions, mais nous avons maintenant les réponses. Soit, merci. Le spectateur qui ne connaît par Star Wars passera complètement à côté et s’en portera tout aussi bien.
Si on en était resté là, on aurait quitté Solo sur une comédie romantique qui ne fait pas rire, des références et une série de personnages creux faisant des pew pew pas convaincants. Bref, un Marvel moyen.
Le Kessel Run
Et puis vient le premier frisson. Le film change de ton lors de la rencontre entre Solo et Lando et, heureusement, les personnages secondaires apportent de la matière au film. Les prestations de Donald Glover, Woody Harrelson et Phoebe Waller-Bridge qui joue un droïde révolutionnaire cherchant à libérer ceux de son espèce de l’asservissement des humains biologiques relèvent clairement le niveau et donnent du corps à l’ensemble. Même Emilia Clarke, effacée dans la première partie du film, prend de l’assurance et donne à voir une meilleure facette de son jeu d’actrice.
Côté histoire, c’est aussi là que le film prend son envol et va enfin raconter le Kessel Run, une entreprise suicidaire pour, Han Solo oblige, rembourser des dettes. Cela pète dans tous les sens, le Faucon Millenium (de Lando) est mis à rude épreuve, ça pew pew de manière plus convaincante avec des lasers qui filent droit : bref, on est à nouveau dans le gigantisme de Star Wars et on se sent à l’aise dans cette galaxie lointaine qui avait à peine eu le temps de nous manquer depuis Les Derniers Jedi.
Le film ne s’embarrasse plus de références et de dialogues niais (la plupart des blagues tombent d’ailleurs à plat) : on a enfin une vraie histoire à faire progresser, de l’action conventionnelle, de la musique qui nous fait vibrer et un véritable enjeu galactique pour nos héros de fortune qui vont aller de déconvenue en déconvenue. C’est toute l’histoire de Han Solo qui est contenue dans la dernière heure du film : un brillant pilote, imposteur au grand cœur, qui se fait avoir plus souvent que son porte-monnaie le lui permettrait.
Et même si ce dernier souffle nous donne un grand sourire pendant de longues minutes, jamais Solo ne connaîtra de moment de grâce
Même si ce dernier souffle nous donne un grand sourire pendant de longues minutes, jamais Solo ne connaîtra de moment de grâce. Il n’y a pas de perfect shot, pas de plan à couper le souffle, pas de réplique à faire fondre le cœur des fans. Comme on dit pour ces films à la recette bien préparée pour les salles obscures, disposant d’un écran immense et d’un système son à faire vibrer… « c’est un bon divertissement ». Assurément. Mais est-ce que cela suffit à en faire un bon Star Wars ?
Le verdict
Solo : A Star Wars Story
Voir la ficheOn a aimé
- Le Kessel Run
- Lando Calrissian et son univers de space dandy
- L'intrigant twist final
On a moins aimé
- C'est mou
- Alden Ehrenreich est plat
- Ce n'est pas drôle (alors que Solo est drôle)
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