Moon, premier film de Duncan Jones, fils de David Bowie, isole l’acteur Sam Rockwell sur la face cachée de la lune. Une double prouesse.

On parie que vous n’avez pas vu… est un rendez-vous imaginé par la rédaction de Numerama pour vous proposer des films méconnus ou moins évidents que les chefs d’œuvre de leurs réalisateurs et réalisatrices.

Il n’est pas toujours facile d’être le fils de. Surtout quand le père en question se prénomme feu David Bowie, icône immortelle dans la mémoire collective. Duncan Jones est bien obligé de faire avec. Et avant d’être propulsé à la tête du projet risqué Warcraft : Le Commencement et d’avoir dit oui à Netflix avec Mute, l’intéressé avait donné naissance à Moon, petit film qu’il a co-écrit et réalisé avec un budget dérisoire pour le genre SF (cinq millions de dollars).

Un baptême remarqué qui lui a valu diverses nominations dans des festivals et, notamment, un British Academy Film Award du meilleur nouveau scénariste, réalisateur ou producteur britannique en 2010. En bref un long métrage à voir autant pour l’excellence d’un premier essai ouvrant les portes d’Hollywood que pour la performance remarquée de l’acteur Sam Rockwell (le méchant d’Iron Man 2).

La farce cachée de la Lune

Moon suit les tribulations de Sam Bell, cosmonaute ayant accepté un contrat de trois ans l’envoyant dans une station située sur la Lune, où est minée une ressource qui sert de solution à une crise énergétique sur Terre. À deux semaines de l’échéance, synonyme de retour auprès des siens, sa femme et sa fille, Sam commence à avoir des hallucinations jusqu’à avoir un accident qui viendra rebattre les cartes et briser le peu de certitudes qui l’animaient. Ou quand être dans la lune prend tout son sens.

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Dès les premières minutes, Duncan Jones subjugue par son sens de l’esthétique et du cadre, une qualité sans aucun doute inscrite dans son ADN. Convoquant les pépites ayant marqué sa jeunesse, principalement des films cultes de SF (Alien, 2001, Odyssée de l’Espace), il filme une station spatiale froide comme un cercueil, étreignant son unique occupant dans une longue et lente agonie.

Et éloigne volontairement le plan pour insister sur l’isolement d’un héros cherchant du réconfort auprès d’un robot aux réponses pré-mâchées (coucou HAL 9000). Puis s’en rapproche quand la lutte devient plus personnelle et intime.

Des personnages ordinaires perdus dans l’espace.

Un va-et-vient à l’orée de la schizophrénie, le tout baignant dans un traitement ne tombant jamais dans la science-fiction vaine et m’as-tu vu (le design des vaisseaux et de la station est simpliste), encore moins dans la frénésie sous LSD (un poncif quand le héros devient fou). Plutôt dans le réalisme scientifique qui fait froid dans le dos. Une autre référence aux longs métrages l’ayant bercé : des personnages ordinaires sont confrontées à la difficulté de vivre dans l’espace — une unité de lieu extraordinaire.

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Loin d’être un inconnu à l’époque de Moon (on l’avait croisé dans La Ligne Verte), Sam Rockwell porte le film sur ses épaules, mais aussi sa tête. Seul — ou presque –, s’abandonnant à la tourmente et au désespoir, son personnage perd pied. Si Duncan Jones voulait le pousser dans ses derniers retranchements, il ne s’y serait pas pris autrement. Confronté à lui-même, au sens propre comme au figuré, Sam Rockwell livre l’une des meilleures performances de sa carrière, pleine de nuances et à multi-facette.

« Je savais que je devais lui offrir un défi qu’il ne pouvait pas refuser, j’ai donc pensé à lui jouant plusieurs rôles », explique Duncan Jones dans les colonnes de TimeOut. La prestation, mêlant talent de l’acteur et ingéniosité du réalisateur, porte un scénario juste et trompeur. Tout ce qu’il faut, sans fausse note. 

Pour l’anecdote, sachez que Mute, inspiré cette fois du chef-d’œuvre Blade Runner et accessible sur la plateforme Netflix, s’apparente à une suite spirituelle de Moon. Outre certains clins d’œil, elle n’hésite pas à inviter Sam Rockwell, ce qui donne lieu à un caméo savoureux. Pour Duncan Jones, il y a cette idée d’établir un univers entier puisqu’un troisième film dans cette veine a été écrit. De quoi s’inspirera-t-il ?

Moon est disponible en DVD et Blu-ray sur Amazon.

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