Cette semaine, le Copyright Madness revient sur quelques délires sympathiques comme l’Allemagne qui invoque le droit d’auteur à des fins de censure, un vidéaste qui se fait shooter pour avoir lu dans une vidéo un texte du domaine public ou encore Kim Kardashian qui fait preuve d’humilité et de modestie (non). Bonne lecture et à la semaine prochaine !
Copyright Madness
Garde à vous ! Parmi toutes les dérives de la propriété intellectuelle qu’on consigne chaque semaine, il y a une stratégie qu’on retrouve souvent : la revendication de droits à des fins de censure. L’État fédéral allemand nous en donne encore la preuve avec une curieuse histoire de rapports militaires publiés par un journal local. Il faut savoir que les rapports militaires outre-Rhin sont rendus publics, mais ont été réadaptés en retirant parfois certaines informations. Or, le journal est parvenu à se procurer un rapport non expurgé et l’a publié tel quel. C’est un document classé confidentiel, mais qui bénéficie seulement du premier échelon de confidentialité. L’Allemagne aurait pu invoquer la carte du secret défense pour empêcher la publication du rapport, mais a préféré sortir l’atout droit d’auteur et attaqué le journal pour contrefaçon. Fort heureusement, l’avocat général de la Cour de Justice de l’Union européenne précise dans ses conclusions que les informations contenues dans ce rapport sont souvent des informations brutes et ne peuvent bénéficier d’une protection en l’absence d’une mise en forme qui est couverte par le droit d’auteur. L’open data dans la Défense, c’est plutôt du close-combat !
Bouche cousue. Le petit monde de YouTube nous étonnera toujours par son incroyable à se renouveler dans le délire… Cette semaine, c’est Benjamin Brillaud, vidéaste qui anime la chaîne d’histoire Nota Bene, qui fait les frais du système de gestion des droits sur la plateforme. Il signale avoir reçu un « strike » (une sanction pour violation du droit d’auteur sur sa chaîne secondaire. Un événement pas si anodin, puisqu’au bout de trois avertissements, YouTube peut décider de supprimer la chaîne. Quel est son crime ? Avoir lu à haute voix un extrait d’un roman de Jules Verne dans une de ses vidéos… Cet auteur est pourtant dans le domaine public depuis longtemps et tout le monde peut le lire librement. Ici, ce n’est pas l’algorithme de YouTube qui est en cause, mais bien une personne qui a fait un signalement, avec suffisamment d’imagination pour se croire disposer des droits sur Jules Verne !
https://twitter.com/NotaBeneMovies/status/1055449562087858176
Pilule rouge. L’acteur Jet Li a expliqué récemment pourquoi il a refusé de jouer dans le film Matrix et la raison est… surprenante ! La production souhaitait en effet l’embaucher non pour jouer un rôle dans le film, mais pour enregistrer pendant plusieurs mois ses mouvements d’artiste martial afin de bénéficier d’une gigantesque base de données. Jet Li aurait dû ensuite signer une cession de droits afin que les studios deviennent « propriétaire » de tous ses gestes pour les reproduire en images de synthèse. Sentant qu’on voulait le déposséder d’un savoir-faire qu’il avait mis des années à parfaire, l’acteur a préféré refuser la proposition. Il faudra à présent que Hollywood attende la mort de Jet Li pour le ressusciter en hologramme !
Pas de droit, pas de chocolat. Douglas Hunsberg, un photographe américain, est colère et part en guerre contre un chocolatier et une entreprise de bateaux de plaisance pour violation de droit d’auteur. L’intéressé a photographié des caramels et des bateaux pour illustrer des plaquettes commerciales visant à promouvoir les services des entreprises concernées. Ces photos remontent à 20 ans. L’entreprise de confiserie a fait rééditer des plaquettes par un autre prestataire qui a intégré les photos de Hunsberg. C’est pour ce préjudice que le photographe veut obtenir une réparation et poursuit en justice ces entreprises du New Jersey. Le plus choquant dans cette histoire est de proposer d’éditer une brochure avec des photos aussi vieilles ! La propriété intellectuelle c’est comme le chocolat, gare à la crise de foie !
Trademark Madness
Ça sent le sapin. La marque Balenciaga a été prise la main dans le sac pour violation de marque pour avoir commercialisé des porte-clés en forme de sapin odorant qu’on accroche aux rétroviseurs des voitures. Car-Freshner est l’entreprise qui détient les droits de ces fameux sapins. Elle accuse la marque de luxe de reprendre la forme du sapin et les couleurs vives caractéristiques de ces désodorisants pour voiture. Selon Car-Freshner, le risque de confusion est très fort et les clients pourraient se tromper et acheter un porte-clé de luxe à la place du sent-bon. Précisons tout de même que cette petite babiole vendue par Balenciaga coûte 275 $ l’unité. La différence de prix suffit à éviter la confusion entre les deux produits. Puis encore faut-il trouver un garagiste qui vend des porte-clés Balenciaga ! C’est bien connu, l’argent n’a pas d’odeur…
En toute modestie. Cela faisait un moment que Kim Kardashian n’était pas apparue dans cette chronique et nous commencions à nous inquiéter… Cette fois, c’est elle qui se fait attaquer en justice par une maquilleuse danoise qui l’accuse d’avoir violé sa marque KW. Notre fashionista a en effet lancé récemment une gamme de cosmétiques sous la marque KKW. L’artiste danoise se plaint d’un risque de confusion dans l’esprit du public. Mais c’est la réponse de Kim qui est croustillante. Elle explique en toute modestie qu’elle est tellement connue, qu’il ne peut y avoir aucun doute pour les consommateurs lorsqu’ils achètent des produits. On peut peut-être en douter, car pour acheter tous ces produits bidon vendus par l’ex-star de télé-réalité, il faut sans doute être en pleine confusion !
Copyright Wisdom
Bricolo. Tous les adeptes de la bidouille vont pouvoir se frotter les mains aux États-Unis, car le droit à la réparation vient d’y remporter une belle victoire. Le bureau du copyright a accepté d’accorder des exemptions pour permettre aux utilisateurs de faire sauter des mesures techniques de protection (DRM) dans le but de réparer des appareils qu’ils possèdent. Cela fait des années que les fabricants de voitures, de machines agricoles ou de smartphones soutenaient qu’ils avaient le droit d’interdire les réparations en prétextant que ces machines intégraient des logiciels protégés par le droit d’auteur. Mais cette interprétation délirante ne tient plus et les bricoleurs vont pouvoir s’en donner à cœur joie. C’est aussi une manière de pouvoir lutter contre l’obsolescence programmée. On aimerait bien quand même pouvoir démonter la boîte crânienne de ces individus qui ont cherché à supprimer le droit à la réparation au nom du droit d’auteur…
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Merci à tous ceux qui nous aident à réaliser cette chronique, publiée sous licence Creative Commons Zéro, notamment en nous signalant des cas de dérives sur Twitter avec le hashtag #CopyrightMadness !
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