Corinthe, 4e siècle avant Jésus-Christ. Des marchands des quatre coins de la Méditerranée viennent y vendre leurs marchandises. Vous êtes l’un d’eux, et devrez faire les choix les plus judicieux pour, sans trop de surprises, être le plus riche en fin de partie.
Chaque joueur dispose d’une feuille de score, découpée en plusieurs zones de cases à cocher : vos échoppes pour chacune des quatre denrées (huile d’olive, vin, tissus et épices), le marché où se déplacera votre intendant, votre pécule en pièces d’or et en chèvre, et quatre bâtiments que vous pourrez construire en cours de partie.
Au début de chaque manche, le premier joueur lance tous les dés, les trie, puis les place selon leur valeur sur le plateau d’approvisionnement. Mais pas n’importe comment. Les dés de plus grande valeur tout en haut, sur l’or. Les autres, par valeur croissante, remplissent les autres lignes en partant de celle du bas, les chèvres, puis on remonte tant qu’il reste des dés : huile d’olive, vin, tissus et enfin épices, la plus rare des denrées.
Puis, dans l’ordre du tour, chaque joueur prend tous les dés d’une ligne, et coche les cases adéquates sur sa feuille.
On récupère ainsi des denrées d’un seul type pour en garnir son échoppe correspondante, on déplace son intendant au marché, ou on gagne de l’or ou des chèvres.
Les échoppes complètement remplies rapportent des points de victoire : plus la denrée est rare, plus c’est intéressant. L’or et les chèvres permettent de construire les bâtiments. Ces derniers amènent des avantages en cours de partie ou des points de victoire à la fin. L’intendant est une sorte de joker, puisqu’il apporte différentes récompenses selon où il se déplace et le chemin qu’il emprunte.
Sans entrer dans les détails, la mécanique est astucieuse, et demande de jongler entre la valeur des dés et leur nombre. Et bien évidemment, les dés pris par un joueur ne sont plus disponibles pour les suivants. Ainsi, le premier joueur a plus de possibilités que les autres. Mais cette position change à chaque tour.
Le jeu s’arrête après quatre ou six manches, selon le nombre de joueurs. On additionne les différentes sources de points de victoire, et le plus grand total l’emporte.
Pourquoi c’est bien
Les jeux de type « roll&write » (ou plus généralement « n’importe quoi&write »), dont fait partie Corinth, ont la côte depuis quelque temps. Il en sort presque un nouveau tous les mois. Et ça tombe plutôt bien, car nous sommes assez friands de cette mécanique : Welcome, Second Chance et Patchwork Doodle sont quelques exemples nous ayant particulièrement plu.
Mais qu’offre donc Corinth de plus que les autres. Sans tergiverser, l’interaction est le gros point fort du jeu, élément qui fait généralement défaut aux autres représentants de cette catégorie. Il est ici impossible d’espérer l’emporter en jouant tout seul dans son coin, sans faire attention à ce que font les adversaires.
Il est ainsi primordial de choisir ses dés, non seulement pour ce qu’ils nous apportent, mais aussi, voire surtout, pour ce qu’ils retirent comme possibilités aux autres. Bref, des tiraillements en perspective, surtout à trois ou quatre joueurs.
Attention, le jeu n’est cependant pas exempt de hasard. Au contraire même, il arrive souvent qu’un joueur profite d’une chance insolente pour faire un coup exceptionnel. Mais cet aléa se lisse sur l’ensemble de la partie étant donné le nombre de tours joués.
Comme toujours pour les roll&write, inutile de s’attarder sur le matériel : des feuilles et des dés, rien de bien folichon. Ce n’est pas non plus le thème qui vous transportera, malgré des illustrations rafraîchissantes. Notons tout de même le bloc de feuilles conséquent, permettant un nombre de parties bien suffisant. C’est tant mieux, car la tendance est plutôt d’en enchaîner deux ou trois à la suite. C’est simplement dommage qu’elles ne soient pas imprimées des deux côtés.
Un roll&write avec de l’interaction
Seule petite ombre au tableau, une stratégie basée exclusivement sur l’intendant nous semble légèrement plus efficace que les autres. Surtout plus facile à mettre en place, moins contraignante. Sans constituer une martingale pour autant, il faudra bien veiller à ne pas laisser faire un joueur qui se dirigerait vers cette stratégie en se mettant à plusieurs à le bloquer.
Les vieux briscards auront peut-être reconnu des similitudes avec Yspahan, sorti en 2006. Et pour cause, l’auteur ayant commis les deux jeux s’est inspiré de sa toute première création éditée pour créer Corinth. Mais en se focalisant sur un seul aspect du jeu d’origine, pour accoucher de quelque chose de beaucoup plus simple et rapide. Croisons les doigts pour que le succès de Corinth motive auteur et éditeur à sortir une édition revue et actualisée d’Yspahan. C’est un classique oublié qui mérite d’être connu du plus grand nombre.
Bref, si vous aimez les jeux rapides et simples, mais surtout les roll&write, mais que leur manque d’interaction vous gène, foncez sur Corinth. Il combine toutes les qualités de cette catégorie de jeux, tout en palliant leur principal défaut. Un jeu simple, rapide, et vraiment plaisant.
- Corinth est un jeu de Sébastien Pauchon
- Illustré par Julio Cesar et Cyrille Daujean
- Édité par Days of Wonder
- Pour 2 à 4 joueurs à partir de 8 ans
- Pour des parties d’environ 20 à 30 minutes
- Au prix de 17,90 € chez Philibert
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