Cet article contient de nombreux de spoilers sur l’épisode 6 de la saison 8 de Game of Thrones, car c’est un résumé de l’épisode 6 de la saison 8 de Game of Thrones. Eh oui !
Que retiendra-t-on de Game of Thrones dans une décennie ? Probablement qu’il s’agissait de la dernière fresque sérielle à avoir généré tant de passion, d’angoisse, de jubilation, d’attente et de frustration avant la consécration des plateformes de streaming. Le dernier volet aura beau laisser un goût amer en bouche, la série restera dans l’histoire pour son fond comme pour sa forme. Et la déception actuelle s’estompera au prix d’une nostalgie inévitable : vous vous souvenez quand on attendait encore, chaque semaine, que soit diffusé le nouvel épisode d’une série ?
Ce sixième et dernier épisode intitulé The Iron Throne est à l’image d’une saison 8 qui semble avoir pris la forme d’une géante bande-annonce, à la place de ce que l’on aurait aimé être une conclusion a minima deux fois plus longue. Où les showrunners DB Weiss et David Benioff, assurément impatients d’en finir avec la production qui régissait leur vie depuis 8 ans, sont parvenus à amener l’histoire à sa conclusion, mais non sans passer par la voie express.
Des très grosses ficelles narratives
Aussi ces 75 dernières minutes semblent-elles, comme les récents épisodes avant elle, précipitées. Où l’on assiste à ce qui semblait inéluctable : la mort de Daenerys aux mains de Jon Snow qui, dans son seul éclair de lucidité de la saison (il ne savait, au final, vraiment pas grand chose), se résout à lui planter une dague dans le cœur.
Mais pour que l’on croie à cette issue — bien qu’elle ait été évoquée plus tôt dans la série —, les scénaristes ont insisté, lourdement, très lourdement, sur la malveillance de la nouvelle Reine. L’épisode 6 s’ouvre sur ce qui ressemble en toute simplicité au sacrement d’un régime nazi, code couleur (le drapeau Targaryen s’étend en noir et rouge sur les ruines de Port-Réal) et esthétique militaire respectés au pied de la lettre. Daenerys arrive, tout en blondeur et habits de cuir noir, hurlant à ses troupes galvanisées que la guerre n’est, en fait, pas terminée. « Nous ne déposerons pas nos lances tant que nous n’aurons pas libéré tous les peuples du monde », hurle la nouvelle éphémère Reine du Royaume des Sept Couronnes. Il convient bien sûr d’entendre le terme de libération au sens « Thanos-ien » de son interprétation : libérer, c’est surtout massacrer.
« À présent, vous êtes des libérateurs. Vous avez libéré la ville de l’emprise d’un tyran », lance Emilia Clarke, que l’on ne peut s’empêcher de plaindre pour avoir vu son personnage se transformer en quelques épisodes de started-from-the-bottom-libératrice-des-esclaves-Daenerys en une tortionnaire sans discernement. Encore une fois, la destinée était crédible, mais la réalisation a été bâclée, à l’image de cet échange de huit minutes (!) entre Tyrion Lannister et Jon Snow, où l’un tente de convaincre l’autre qu’il faut éliminer la Reine-Meurtrière, mais qui ressemble plus à une discussion enflammée entre fans sur Reddit. « Elle a tué plus d’innocents que tous les Lannister dans leur vie ! » « Mais elle a libéré des esclaves ! » « Elle a toujours exécuté quiconque se mettait sans son passage… » « Mais elle a quand même vu son dragon et sa servante mourir sous ses yeux ! »
Le générique en disait déjà long sur l’avenir de Daenerys
On cédera une chose aux esprits derrière ce dernier épisode : le destin tragique de Daenerys n’était pas vraiment un secret. Le générique de l’épisode 6, qui se terminait jusque-là par une image du Trône de Fer surplombé du lion des Lannister, se conclut ici par un siège vide sans emblème. Si la (presque) héritière des Targaryen avait été amenée à régner à la fin de la série, c’est probablement le symbole de sa maison (un dragon à trois têtes) qui se serait affiché. Le destin du Trône de Fer était autre : la première partie de l’épisode est ainsi scellée par le feu de Drogon qui, découvrant le corps inanimé de sa Mère assassinée, fait rugir ses flammes les plus bouillantes pour faire fondre l’objet symbolique que toutes et tous convoitaient.
Aussi bizarre qu’il soit de rendre hommage à des images de synthèse, il faut souligner que le dragon Drogon livre probablement l’une des meilleures performances d’acteurs de l’épisode.
Bran le Brisé monte sur le trône
S’en suit un deuxième volet de cet épisode final tout en douceur et résolution — mais il faut faire vite car il ne reste déjà plus que 30 minutes ! — d’un grand nombre d’intrigues laissées en suspens. Où Jon Snow sera condamné à retourner à perpétuité à la Garde de Nuit (et s’ébrouer dans la neige avec Ghost) pour avoir tué la Reine, Arya partira explorer les mers pour faire avancer l’état de la géographie mondiale car elle est une déesse sans attaches, et Sansa sera (enfin) sacrée Reine du Nord. Qui, alors, pourra bien monter sur le trône ? À l’image de siècles d’histoire mais également dans une métaphore toute contemporaine du monde du travail, le meilleur poste est offert à un homme qui n’avait rien demandé. Et qui se paie le luxe d’affirmer que, bien qu’il n’en ait pas envie, il l’accepte avec grâce pour le Bien Commun. Bran l’invalide devient Bran le Brisé, dirigeant du Royaume des Six Couronnes (sans le Nord, qui obtient le droit de rester indépendant).
La notion de bien commun, elle, est rapidement nuancée par les éclats de rires de l’ensemble des Nobles qui constituent ce nouvel étrange Conseil improvisé, après la proposition de Samwell Tarly d’organiser des élections démocratiques. Ce rire, salutaire, est donné aux fans un peu comme une carcasse de souris à un dragon affamé : rassurez-vous, nous restons cyniques comme aux débuts de la série, clin d’œil appuyé.
En 2015, Daenerys lançait, l’air suffisant et assuré : « Lannister, Targaryen, Baratheon, Stark, Tyrell… Ils sont tous des rayons d’une même roue. L’un est au sommet, puis l’autre, puis l’autre, et elle continue de tourner en écrasant ceux qui se situent en-dessous. Je ne vais pas arrêter la roue. Je vais briser la roue. » Elle ne pouvait pas avoir plus tort.
Cette roue, mentionnée à nouveau à maintes reprises dans l’épisode final de Game of Thrones, existe toujours : qu’elle soit celle qui soutient le fauteuil en bois du nouveau roi Bran le Brisé ou celle, métaphorique, qui continuera de voir « nommé » au Trône de Fer un nouveau dirigeant issu des classe hautes et nommé par ses pairs. Heureusement, l’Histoire se souviendra de l’ère précédente (celle où ils étaient des dizaines à s’exterminer pour décrocher le pouvoir) grâce au travail de l’archimestre Embrose (on l’a googlé pour vous) qui a tout consigné dans un livre… intitulé… A Song of Ice and Fire, du nom de l’œuvre de George R. R. Martin à l’origine de cette adaptation qui risque de faire couler beaucoup d’encre, pour des années à venir.
Que Ghost veille sur vous.
Valar Morghulis (on aurait bien aimé).
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