Le film Black Panther donnait enfin à voir un film grand public mettant en avant l’Afrique comme théâtre central de la narration et comme clé du devenir de l’humanité. Il s’avère que la littérature de l’imaginaire recèle également de trésors en la matière. Voici quatre romans dans une Afrique du futur prospère, impitoyable ou mystérieuse… De quoi changer un peu des traditionnels scénarios où tout ne se passe qu’en Occident.
Rosewater, de Tade Thompson
Direction le Nigeria, en 2066. Un biodôme d’origine probablement extraterrestre est mystérieusement apparu. Chaque année, il ouvre ses portes quelques minutes et guérit toute personne qui y pénètre. Tout autour, sous forme de donut, une ville est née : Rosewater.
Le dôme peut générer quelques effets secondaires inattendus sur les personnes qu’il soigne : parmi eux, la capacité psychique de lire dans les esprits. Karoo vit à Rosewater et possède ce don. Il est normalement agent des cyberfraudes pour une banque, mais a été recruté par les services secrets en raison de ses pouvoirs. Au fil de ses enquêtes toujours plus complexes, il va être amené à découvrir ce qui se cache derrière ce premier contact alien.
Si l’intrigue elle-même se révèle passionnante, la description d’un Nigeria du futur l’est presque encore plus — d’autant que l’auteur étant nigérian. Drones, implants cybernétiques et aliens côtoient la misère, dans une approche africaine du cyberpunk.
Qui a peur de la mort ? de Nnedi Okorafor
Qui a peur de la mort ? se rattache à la littérature de science-fiction, mais tout autant à la littérature de fantasy. L’autrice, d’origine nigériane, a gagné les prestigieux prix World Fantasy, Hugo et Nebula pour ce roman. Dans une Afrique post-apocalyptique dominée par une guerre entre deux clans, nous faisons la rencontre de Onyesonwu. Elle est une « ewu » : sa mère a été violée par un guerrier. Elle possède également des pouvoirs qui font d’elle une sorcière. Nnedi Okorafor nous conte la jeunesse d’Onyesonwu, la découverte de ses dons, puis sa quête pour sauver son peuple de la violence.
Si l’ouvrage est intensément violent, ce n’est pas pour faire du spectacle : la violence est justifiée par un message humaniste et féministe, une volonté d’aller dans les tréfonds du problème qu’est le viol (et plus largement la place des femmes en Afrique). Les ressorts narratifs Nnedi Okorafor touchent souvent au mystique, ce qui procure une dimension spirituelle à son œuvre.
Les Enfants de Poséidon, Alastair Reynolds
Les Enfants de Poséidon, dont le premier tome est joliment titré La Terre bleue de nos souvenirs, est l’un des voyages les plus complets et passionnants dans l’Afrique du futur. Au XXIIe siècle, l’Afrique est technologiquement et économiquement prospère. Le continent est devenu le leader incontesté de la conquête spatial. Les implants cybernétiques et autres innovations technologiques sont monnaie courante.
Alastair Reynolds ne fait jamais mention des pays occidentaux dans sa narration, en revanche on entend parler à plusieurs reprises de la Chine et de l’Inde. Quant à l’histoire elle-même, l’auteur s’intéresse à la vie (et aux secrets) d’une même famille. Le plus passionnant dans le cycle des Enfants de Poséidon est d’être plongé dans cette Afrique futuriste où savane, vaisseaux spatiaux et robots ne font qu’un.
Aqua™, Jean-Marc Ligny
Dans ce futur de Jean-Marc Ligny, le réchauffement climatique a accompli son œuvre en aboutissant au pire : l’eau est devenue aussi précieuse que l’or. Et comme souvent dans une telle situation, où une ressource devient rare, des inégalités s’installent. Au Burkina Faso, les choses sont particulièrement graves, la population meurt de soif et la Présidente ne trouve aucune solution viable.
Tout bascule lorsqu’une nappe phréatique est découverte dans le pays, par un hacker ayant récupéré une image satellite. Le gouvernement burkinabé se retrouve face à plusieurs problématiques, entre l’absence de moyens techniques pour exploiter la nappe, et la pression qu’une multinationale met sur elle pour se l’approprier. Aqua™ est une climate fiction de très haut vol où l’enjeu est en Afrique. Sa proximité (en 2030) et son réalisme sont terrifiants, mais l’humanisme de Jean-Marc Ligny transmet pourtant une dose d’espoir.
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