Avec The New Order et The New Colossus, Bethesda a remis la franchise Wolfenstein sur le devant de la scène — et sur d’excellents rails. Le studio MachineGames a respecté à la lettre les codes de la franchise, qui consiste à tuer des nazis à la pelle dans un futur imaginaire où ils auraient gagné la Seconde Guerre mondiale. Ce contexte mêlant histoire et liberté d’écriture est loufoque à souhait et sert un gameplay taillé pour se vider la tête.
En prime, les développeurs s’étaient fait particulièrement plaisir sur la narration, avec une vraie place donnée à B. J. Blazkowicz, héros charismatique du duo de FPS hérité d’une franchise fondatrice de tout un genre devenu très populaire. Pour Wolfenstein: Youngblood, MachineGames, assisté par Arkane Studios, entend passer un cap. En plus de l’introduction d’un mode coopératif, il y a cette envie d’ajouter une surcouche RPG. Ne serait-ce pas trop d’un seul coup ?
Deux pour le prix d’un
Graphiquement, Youngblood s’inscrit dans la veine de The New Colossus. La direction artistique, volontairement sombre, s’appuie sur un moteur technique solide. Sur Xbox One X, on peut choisir la résolution dynamique pour bénéficier d’un framerate qui titille les 60 fps constants (c’est le paramètre par défaut) ou privilégier la précision de l’image. On aurait quand même apprécié des cinématiques mieux compressées tant elles tranchent avec les phases de gameplay.
L’intrigue de Wolfenstein: Youngblood démarre sous les meilleurs auspices. On apprend que ce bougre de B. J. Blazkowicz a fondé une famille après avoir débarrassé les États-Unis de la menace immédiate. Sa femme a donné naissance à des jumelles que les parents entraînent à devenir des machines à tuer (car les nazis sont toujours dans les parages et contrôlent l’Europe). À chacun son enfance… Bref, un beau jour, B. J. Blazkowicz disparaît. Il serait parti pour une opération à Paris. C’est le moment choisi par les deux héroïnes pour mettre leur apprentissage en pratique. Elles filent donc en douce, direction la capitale française à la recherche de leur papa.
Hélas, alors que l’on pourrait s’attendre à une écriture dans le ton des derniers opus, Youngblood dilue très vite l’intrigue dans une structure semi-ouverte qui ne sied pas vraiment à l’installation d’une histoire marquante. Passée une introduction encourageante et hormis quelques saynètes qui mettent en exergue la personnalité insouciante des jumelles (elles découvrent la violence), on est vite rattrapés par la réalité du gameplay lourd. À savoir que le jeu reprend à son compte cette notion de missions — annexes comme principales — rangées en niveaux. Héritée des vrais mondes ouverts à la Far Cry, cette facette force les joueurs à gagner de l’expérience pour avancer sans réel fil rouge à défaut de les immerger dans une intrigue prenante.
Dès lors, il y a moins cette impression de participer à quelque chose de grand et il y a surtout moins de place pour une narration maîtrisée. Il est dommage de voir MachineGames sacrifier l’une des forces de The New Order et The New Colossus pour une forme certes plus dans l’air du temps, mais finalement moins adaptée à l’argument old school. En cédant aux sirènes du monde ouvert, Youngblood se perd en route.
Plus on est de fous…
Cette structure en monde semi-ouvert pose également problème pour la tenue de l’expérience au global. Vous n’aimez pas le farming (qui consiste à enchaîner des tâches additionnelles pour pouvoir avancer dans la campagne principale) ? Passez votre chemin.
Concrètement, on a accès à un hub où plusieurs personnages invitent à remplir des objectifs sur une carte traversée par un métro (que l’on peut prendre sans acheter de ticket à partir du moment où il n’y a plus de soldats nazis dans la zone). Du coup, on enchaîne les allers-retours, on revoit constamment les mêmes décors, on tue mille fois les mêmes ennemis… jusqu’à pouvoir accéder sereinement à la suite des vrais événements. Le fait est que MachineGames et Arkane Studios ont un peu forcé le trait : les adversaires, qui montent aussi en niveaux, apparaissent parfois de nulle part, sans crier gare et par vague.
On note aussi une cassure dans le rythme général. La composante RPG encourage à passer du temps dans les menus pour choisir les compétences que l’on veut équiper (grâce aux points que l’on gagne au fur et à mesure) et pour améliorer ses armes (grâce à l’argent que l’on ramasse). C’est parfois contre-intuitif et jamais tout à fait en phase avec un gameplay qui pousse à foncer tête baissée avec style, sans trop se soucier du reste (y compris de ses barres de vie et d’armure). Parmi les autres bizarreries de Youngblood, on note une difficulté inégale : parfois on a l’air invincible, parfois on tombe comme une mouche sans trop savoir pourquoi.
Vous n’aimez pas le farming ? Passez votre chemin.
Le principal argument de Wolfenstein: Youngblood provient de son mode coopératif (spoiler : on n’y a joué qu’à deux pour écrire le test). C’est la raison pour laquelle MachineGames a remplacé un héros par deux protagonistes. L’idée est louable : après tout, annihiler une horde de nazis et de robots (nazis) avec un ou une ami·e est appréciable. Le titre aurait quand même gagné à pousser le concept un peu plus loin, les opportunités de vraiment se sentir associés et solidaires étant assez rares. Elles se résument à quelques portes et coffres à ouvrir en duo, à la possibilité de ressusciter l’autre (ce qui baisse mécaniquement le challenge) ou encore à ces trois vies bonus que l’on partage. Il n’y a pas, par exemple, de discussions à avoir sur les munitions à ramasser (elles ne sont pas communes). C’est un peu trop individualiste, d’autant que les deux héroïnes ne se différencient pas sur des capacités propres — en dehors des choix de personnalisation effectués par les participants.
À l’arrivée, on retiendra de Wolfenstein: Youngblood cette volonté de faire différemment, mais un peu dans la maladresse. Il n’en demeure pas moins un FPS nerveux au gameplay idéal pour qui souhaite se défouler en se battant contre le mal absolu. Mais plutôt à deux, pour ne pas s’ennuyer.
Le verdict
Wolfenstein: Youngblood
On a aimé
- Ce gameplay old school
- Le mode coopératif
- L'élan de changements
On a moins aimé
- Coopération sous-exploitée
- Structure semi-ouverte bancale
- Les allers-retours incessants
Pour les fans des deux derniers Wolfenstein, le spin-off Wolfenstein: Youngblood sera une nouvelle entrée dans cet univers invitant simplement à occire des nazis par centaines. C'est un argument suffisant en soi mais il faudra composer avec les changements opérés par MachineGames.
Le mode coopératif ? Il se contente du strict minimum et n'encourage que très peu les actions en duo. La structure semi-ouverte ? Elle dilue l'intrigue et désamorce la narration, qui était une grande force de The New Order et The New Colossus. La surcouche RPG ? Elle est un peu contre-nature. Derrière ces évolutions maladroites se cache tout de même un FPS au gameplay old school jouissif. Suffisant ?
+ rapide, + pratique, + exclusif
Zéro publicité, fonctions avancées de lecture, articles résumés par l'I.A, contenus exclusifs et plus encore.
Découvrez les nombreux avantages de Numerama+.
Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci
Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.
Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :
- 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
- 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
- 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.
Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.
Vous voulez tout savoir sur la mobilité de demain, des voitures électriques aux VAE ? Abonnez-vous dès maintenant à notre newsletter Watt Else !
Certains liens de cet article sont affiliés. On vous explique tout ici.