Malgré son charme indéniable, la petite bourgade de Vallée Profonde n’offre que peu de distractions. C’est sans doute la raison pour laquelle ses habitants ont pris l’habitude de passer leur temps libre dans une de ses nombreuses auberges. Qui gèrera au mieux son établissement, pour y attirer les clients les plus prestigieux ?
Les joueurs incarnent chacun le gérant de leur propre taverne. Elles sont toutes identiques en début de partie, et les plateaux individuels, représentant les auberges, sont formés de plusieurs pièces façon puzzle. Une partie dure très précisément huit tours, se déroulant tous de la même manière.
La première étape consiste, pour chaque joueur, à remplir sa taverne. Pour cela, chacun dispose d’un paquet de dix cartes. Ils sont tous identiques, mais mélangés individuellement. Chaque aubergiste retourne les cartes les unes après les autres, et les place aux emplacements appropriés : les plongeurs dans la cuisine, les serveuses en salle, les livreurs de bière dans l’entrepôt, etc. Surtout, chaque client pioché s’installe à l’une des trois tables de votre taverne. Et c’est quand elles sont toutes occupées que le joueur arrête de piocher ses cartes. Selon le hasard de la pioche, les auberges ne se remplissent donc pas de la même manière. Les cartes posées seront défaussées en toute fin de tour, et celles restantes dans le paquet serviront au tour suivant. Dès que la pioche est vide, on mélange toutes ses cartes.
Chacune a son petit effet. Le livreur de bière livre de la bière (eh oui), les clients rapportent de l’argent, etc. Mais pour cela, il faut les activer avec des dés. C’est la seconde phase du tour : chacun en lance quatre, en choisit un, passe les trois restants à son voisin de gauche et en reçoit trois de son voisin de droite. Et ainsi de suite jusqu’à ce que tous les joueurs en aient récupéré quatre. Leurs faces numérotées indiquent quelles cartes ils permettent d’activer. Le livreur, par exemple, n’accepte que des 1 et des 6. En simplifiant, on récupère ainsi essentiellement deux types de ressources : de l’argent et de la bière.
L’argent permet soit d’acheter des aides, de nouvelles cartes s’ajoutant à notre paquet. Livreurs, plongeurs, serveuses, tables pour accueillir des clients, etc. Soit de pimper son auberge, en retournant une pièce de puzzle pour la mettre sur son verso, une version améliorée du recto : ajout d’une serveuse permanente, d’une quatrième table, etc.
La bière, quant à elle, attire de nouveaux clients, qui à leur tour rapporteront de l’argent en les activant, et surtout des points de victoire en fin de partie. Le summum est même de faire venir des nobles dans son auberge, qui valent le plus de points.
Le jeu est plus complet que ça. S’y ajoutent des bonus à chaque début de tour, une piste qui tourne autour de l’abbaye (sans doute celle dont provient la bière) et qui rapporte également des bonus, des actions spéciales sur certains clients, etc. Mais la mécanique globale est bien celle-ci : faire évoluer son paquet de cartes et choisir judicieusement les dés à conserver, pour jongler entre l’or et la bière, entre l’amélioration de son auberge, grâce aux cartes et aux versos des pièces, et la récupération de clients prestigieux pour marquer des points de victoire.
Car, après le huitième tour de jeu, l’aubergiste en ayant accumulé le plus est déclaré vainqueur.
Pourquoi c’est bien
Les Tavernes de la Vallée Profonde mélange plusieurs mécaniques déjà bien connues : deck building (on améliore son paquet de cartes petit à petit), draft des dés, gestion de son or et de sa bière, optimisation de son auberge. Et alors qu’on aurait pu craindre un amalgame peu digeste, l’ensemble s’avère en fin de compte fluide et surtout rudement bien assemblé.
Bien entendu, le hasard est relativement présent, entre la pioche des cartes et les lancers de dés. Mais l’auteur a intégré de petites astuces pour venir le contrebalancer. La mécanique générale est parfaitement huilée, et les parties sont vraiment très agréables. La plupart des phases peuvent se jouer en simultané, réduisant d’autant le temps d’attente.
L’interaction est en revanche très limitée, presque inexistante. À part piquer un dé ou un client convoité par son voisin, chacun joue dans son coin. Votre stratégie ne dépendra que de vos choix propres, jamais des actions des autres joueurs.
Un mélange de mécaniques, fluide et rudement bien assemblé
Les principes du jeu expliqués en début d’article constituent le premier module. Il y en a encore quatre autres dans la boite. Chacun ajoute quelques règles et un peu de matériel supplémentaire, et se greffe aux précédents. Saltimbanques, verres de schnaps, livre d’or, départs alternatifs, etc. Le renouvellement est ainsi largement assuré, et vous pourrez augmenter crescendo la complexité des règles, et surtout les adapter aux personnes autour de la table. Les règles principales sont déjà riches et largement suffisantes pour en faire plusieurs parties sans se lasser.
Le matériel, comme souvent pour les jeux d’origine allemande, est d’excellente qualité, notamment les épaisses tuiles formant l’auberge. Bien que nous ayons lu et entendu quelques critiques négatives concernant le thème ou les illustrations, en ce qui nous concerne, c’est du tout bon : le style et les couleurs employés renvoient immédiatement à l’ambiance d’un troquet germanique de fin du moyen-âge, chaleureux et un peu glauque.
Si vous appréciez Les Tavernes de la Vallée Profonde, intéressez-vous au précédent opus du même trio auteur/illustrateur/éditeur, Les Charlatans de Belcastel, que nous n’avons malheureusement pas eu le plaisir d’essayer, mais à propos duquel nous avons lu beaucoup d’éloges. Les mécaniques y sont différentes, mais les sensations et les plaisirs ressentis en jouant sont, à priori, proches. N’hésitez pas à nous en parler en commentaire si vous y avez déjà joué.
Les Tavernes de la Vallée Profonde est un excellent jeu tout public, aussi bien familial que confirmé. Malgré l’interaction presque inexistante, le jeu est extrêmement plaisant, et les parties fluides et tendues. Et grâce à ses nombreux modules additionnels directement inclus dans la boite, le renouvellement des parties est assuré. Nul doute qu’en cas de succès, des extensions viendront encore s’ajouter… on attend avec impatience celle permettant de servir des saucisses et des bretzels.
- Les Tavernes de la Vallée Profonde est un jeu de Wolfgang Warsch
- Illustré par Dennis Lohausen
- Édité par Schmidt Spiele
- Pour 2 à 4 joueurs à partir de 12 ans
- Pour des parties d’environ 60 minutes
- Au prix de 39,90 € chez Philibert
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