« Ils ne servent à rien, ils sont complètement dépassés ». Voici ce que nous confiait récemment un ancien cadre d’EMI en parlant du SNEP, le Syndicat National de l’Edition Phonographique. Il semble que le sentiment soit de plus en plus partagé, pour l’ensemble de ces organisations professionnelles de maisons de disques, dont les actions les plus visibles sont celles qui détruisent le lien de respect entre les artistes et leur public. Depuis l’avènement de Napster, la RIAA aux Etats-Unis et la Fédération Internationale de l’Industrie Phonographique (IFPI) sur l’ensemble du globle (le SNEP en est membre) n’ont fait que lancer de grandes campagnes de répression contre le piratage, sans aucun résultat. Pire, ils ont commis d’énormes erreurs stratégiques, en éliminant un à un tous les réseaux P2P avec lesquels ils pouvaient encore négocier pour les tourner à leur avantage (Napster, Kazaa, Audiogalaxy, Morpheus, WinMX, eDonkey…), et ont encouragé ainsi le développement de réseaux open-source incorruptibles (BitTorrent, eMule…). Leur nouvelle erreur s’apprête à être de chasser les utilisateurs de ces réseaux open-source, ce qui va provoquer le développement des réseaux sécurisés anonymes, qui ne leur donneront même plus la possibilité de faire des études statistiques et marketing sur l’utilisation des réseaux.
Le bilan des SNEP, RIAA et IFPI est nul. Depuis 5 ans, le marché du disque a chuté de 50 %. En bonne partie parce que ces organisations n’ont pas su comprendre le nouvel environnement de la distribution musicale, et se sont concentrées dans une obstination à renforcer les DRM alors que les clients criaient qu’ils ne voulaient pas en entendre parler, et à vouloir vendre la musique en ligne aussi cher que les CD en magasin. Quand AllofMP3, toute illégalité mise à part, a montré qu’il était possible de vendre de la musique en ligne en répondant à la demande, la RIAA, l’IFPI et le SNEP n’ont eu que les mots « plainte » et « fermeture » à la bouche.
Pas surprenant, donc, d’apprendre par Reuters que EMI songe fortement à couper drastiquement dans le budget accordé chaque année à la RIAA et l’IFPI. La maison de disques britanniques, qui a été récemment rachetée par le fonds Terra Firma, fait bien sûr partie des plus grand donateurs avec les trois autres majors, Warner Music, Universal Music Group et Sony BMG. Selon l’IFPI, les quatre majors investissent environ 64 millions de livres sterling chaque année, soit 90 millions d’euros, pour la financer elle-même, la RIAA, et d’autres associations nationales comme le SNEP.
Une réduction des sommes allouées à ces organisations fait peur aux analystes, qui y voient par conséquent une réduction de la lutte contre le piratage, qui causerait chaque année plusieurs milliards d’euros de manque à gagner. Mais peut-être Terra Firma pense-t-il que la meilleure manière de lutter contre le piratage est d’avoir une attitude exclusivement portée sur l’offre plutôt que sur la répression de la demande…
EMI était aussi la première major – et pour le moment la seule, à avoir arrêté totalement les DRM.
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