En janvier 2017, Team Ninja s’immisçait dans le genre des Dark Souls avec Nioh, un savoureux mélange qui lorgnait aussi du côté de Diablo. Fils spirituel ambitieux de Ninja Gaiden, un jeu d’action exigeant initialement sorti sur la première Xbox, il n’allait certainement pas s’arrêter à un seul essai. Nous voici donc avec Nioh 2, qui reprend les mêmes arguments et sert de prologue à l’univers inspiré par des événements réels (l’époque Sengoku qui a marqué l’Histoire du Japon en raison de ses conflits).
Il n’est pas toujours aisé de réussir une deuxième fois de suite, surtout quand la concurrence ne cesse de peaufiner la formule. Nioh, premier du nom, était terni par ses problèmes d’équilibre — qui témoignaient d’un manque de maîtrise de la part de Team Ninja. Le studio est-il parvenu à dompter ses démons ? Après une bonne trentaine d’heures de jeu (et un générique de fin qui se refuse toujours à nous), le bilan est en demi-teinte.
Où est passé William ?
Nioh 2 est disponible en exclusivité sur PlayStation 4 à partir du 13 mars.
Team Ninja a choisi d’opter pour un prologue avec Nioh 2, abandonnant alors William, héros de Nioh, à son propre sort. C’est davantage une aubaine pour laisser au joueur la liberté de créer son personnage de A à Z, genre y compris, avec un outil de personnalisation très, très poussé (on se serait quand même bien passé du critère ‘Taille de la poitrine’). L’intrigue est un peu fouillis : tout juste sait-on que l’on incarne un chasseur de démons capable de se défendre en utilisant les pouvoirs des yokai (créatures appartenant au folklore nippon). Aidé par un marchand, on part à la recherche de pierres d’esprit pendant l’ascension du général Oda Nobunaga (qui deviendra un boss de Nioh). Bref, on retiendra surtout qu’il faut tuer plein de méchants.
Quitte à souffrir, autant que ce soit en enfer
L’idée de mélanger du fantastique à des faits réels, introduits par des figures historiques qui ont vraiment existé, donne beaucoup de cachet à ce Nioh 2. Cela contrebalance la direction artistique un peu déprimante, articulée autour d’une série de décors où tout est très sombre. Entre les cavernes plongées dans la pénombre et les châteaux mis à feu et à sang, on ne peut pas dire que Nioh 2 respire la joie. Ce ton est parfaitement en adéquation avec l’époque dépeinte et symbolise le type d’expérience à laquelle le joueur doit s’attendre. Quitte à souffrir, autant que ce soit en enfer.
Il n’empêche, Team Ninja aurait pu faire un effort sur la partie graphique. On comprend cette volonté de penser d’abord au framerate, afin d’assurer une fluidité sans faille dans un jeu réclamant de la précision. De ce point de vue là, c’est un sans faute. Sur une PlayStation 4 Pro, Nioh 2 ne rame jamais, quel que soit le mode vidéo choisi (vous pouvez privilégier la résolution ou le framerate). En fin de vie, la console de Sony méritait néanmoins une exclusivité bâtie avec un habillage visuel plus séduisant. Le rendu manque globalement de finesse et on ne s’émerveillera jamais devant un environnement. La comparaison avec Sekiro: Shadows Die Twice, qui partage la même ère, pourrait causer du tort à Nioh 2.
Le Diablo Souls
En matière de gameplay, Nioh 2 est bien la suite de Nioh. On retrouve une philosophie similaire, basée sur l’exigence et l’apprentissage pas à pas des différents moyens pour s’en sortir face à des adversaires qui tapent vite et fort. Il faut faire preuve de résilience pour se lancer dans l’aventure, parfois punitive. D’autant que Team Ninja n’offre même pas une introduction placée sous le signe de la douceur. Dès les premières minutes, on comprend qu’il sera nécessaire d’encaisser les coups pour mieux se relever. Pour les combats, Nioh 2 fait toujours confiance aux gardes, permettant d’alterner efficacement entre les coups de différentes puissances. La clé est toujours de faire baisser la jauge d’endurance de l’adversaire tout en veillant à la sienne.
Nioh 2 se détache de son prédécesseur en introduisant les pouvoirs yokai. Ils prennent d’abord la forme d’un contre risqué à placer, mais terriblement dévastateur quand il passe. Il y a ensuite plusieurs aptitudes puissantes que l’on peut récupérer des ennemis occis, à équiper ensuite sur son esprit protecteur. Ces deux nouvelles manières de répondre à l’adversité ajoutent un peu plus de complexité au gameplay, lui assurant une profondeur toujours aussi appréciable. De fait, Nioh 2 gagne en possibilités et accouche d’affrontements toujours plus nerveux. À mesure que l’on dompte toutes les facettes de la prise en main, ils deviennent de plus en plus accessibles — ou presque.
Nioh 2 gagne en possibilités
Comme le héros — ou l’héroïne — est plus fort que dans Nioh, Team Ninja n’a pas hésité une seule seconde à imaginer des boss capables de nous ridiculiser. Ce constat s’accompagne de déséquilibres encore très présents, renvoyant à la notion de punition qui fait naître un sentiment de frustration. Dans un jeu comme Nioh 2, l’équilibre doit être compliqué à trouver et on peut vite pousser le curseur un peu trop loin. Certains ennemis, trop vifs dans leurs enchaînements d’attaques puissantes, ne donnent aucun droit à l’erreur. Et tout porte à croire que le studio japonais n’a pas encore mis le doigt sur le bon bouton.
Heureusement que Nioh 2 donne les clés pour s’en sortir. Mais cela oblige à se coltiner des menus compliqués et austères pour découvrir des sorts défensifs et/ou offensifs très utiles. Si on veut triompher sans souffrir, il est nécessaire d’optimiser la construction et la progression de son personnage, par exemple en choisissant la voie de la spécialisation (exemple : faire constamment appel à la magie). Dans Nioh 2, plus vous utilisez quelque chose, plus vous en devenez un maître. Il est donc vivement encouragé de bien lire toutes les informations disponibles dans l’interface pour prendre les bonnes décisions et se faciliter la vie.
Toujours la même structure
En ce qui concerne la structure du jeu, Team Ninja n’a rien changé. Alors que les Dark Souls et les autres titres de From Software s’appuient sur une même zone bardée de raccourcis, Nioh 2 empile les niveaux répartis dans des chapitres (ils offrent eux-aussi des raccourcis pour aller plus facilement vers le boss). On y perd forcément en termes de possibilités d’architecture, bien que certains environnements paraissent un peu mieux pensés que d’autres. C’est surtout vrai pour ceux qui bénéficient d’un soupçon de verticalité.
Une durée de vie qui dépasse facilement les 40 heures
Le loot est toujours une composante importante dans Nioh 2. Tout au long de l’aventure, on récupère des objets, des armes et des pièces d’équipement. Cette philosophie rappelle les Diablo, avec un butin généré parfois à outrance. Il s’inscrit dans la progression, qui s’appuie en parallèle sur un système de points d’expérience classique (spoiler : on peut tout perdre quand on meurt) et des points de maîtrise. Là encore, on notera la complexité d’un jeu qui multiplie les couches au point de perdre celle ou celui qui ne prendrait pas le temps de bien appréhender tous ces éléments primordiaux. À l’exigence intrinsèque liée à la nécessité d’être attentif durant les combats, Nioh 2 ajoute celle qui consiste à tout assimiler.
Pour finir, personne ne pourra attaquer Team Ninja sur sa générosité. Les vingt missions principales qui composent l’histoire aboutissent à une durée de vie qui dépasse facilement les 40 heures (cela dépendra du nombre de game over). Ce contenu de base est associé à des objectifs annexes et un mode difficulté supérieur (Crépuscule). Si jamais vous êtes bloqués devant un boss, vous pourrez toujours faire appel à la coopération. Promis, personne ne viendra vous juger.
Le verdict
Nioh 2
Voir la ficheOn a aimé
- Un gameplay riche comme il faut
- Du contenu à la pelle
- Les pouvoir yokai, un vrai plus
On a moins aimé
- Parfois très déséquilibré
- Jamais loin du 1.5
- Aussi beau que le 1, donc moche
Avec Nioh 2, Team Ninja peaufine un peu sa formule en ajoutant quelques cordes supplémentaires à l’arc mis à la disposition des joueurs. En résulte une expérience toujours aussi exigeante, hélas nantie de déséquilibres parfois énervants. Face à ce défaut, la volonté de se surpasser donnera envie à certains de poursuivre jusqu’à en ressortir littéralement éreinté.
Jamais très loin du Nioh 1.5, Nioh 2 donnera du fil à retordre à celles et ceux avides de défis. Il leur faudra simplement passer par une très longue phase d’apprentissage, tant le jeu est complexe à bien des niveaux. Il leur faudra accepter, aussi, cet habillage visuel indigne d’une exclusivité.
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