L’hélice du petit Cessna 152 tourne au ralenti sur la piste 22L de l’aréoport de Nice. J’ajuste la mixture, les volets sont dans la bonne position, la tour de contrôle est informée de mon départ. La météo est bonne et la visibilité est excellente, comme souvent sur la Côte d’Azur en juillet — d’autant que le fameux LFMN a ses pistes qui donnent directement sur la mer. Je désactive les freins de parking et je pousse la manette des gaz. Le Cessna, l’un des avions-écoles les plus utilisés, vrombit. L’hélice tourne de plus en plus vite et l’avion avance.
20 secondes plus tard, l’engin volant qui n’a jamais vu le ciel dit bonjour aux poissons, après une sortie de piste spectaculaire qui l’a conduit tout droit dans la baie.
Une simulation complète
Oui, Flight Simulator 2020 est bien un simulateur de vol. Pour faire décoller un Cessna 152, il faut se rappeler qu’un avion à hélice comme lui est dépendant du couple moteur et monter la manette des gaz progressivement jusqu’à atteindre une vitesse au sol suffisante pour décoller. En plus, la trajectoire sur la piste doit être corrigée au palonnier — l’avion ayant tendance à virer à gauche quand il est au sol. Ces informations n’étaient pas indiquées à l’écran, puisque le jeu était configuré sur une conduite réaliste des avions. Pour apprendre ces subtilités, le pilote virtuel débutant arpente les forums, pages spécialisées et autres manuels des différents avions, reproduits à la perfection dans le jeu. Flight Simulator, comme le pilotage d’avion dans la vraie vie, ne pardonne pas.
Mais contrairement à des simulations bien plus ardue — et même aux vieilles versions de Flight Simulator encore utilisées par certaines écoles de pilotage –, il apprend. Conscient que l’aviation n’est pas un domaine à la portée de toutes et tous, contrairement, par exemple, aux simulateurs de camion qui reprennent tout de même les principes de la conduite automobile, Asobo a prévu de nombreux tutoriels.
Et ils sont extrêmement pédagogiques, reprenant assez fidèlement ce qu’un véritable instructeur pourrait vous transmettre comme connaissance. Par exemple, on ne vous lance pas sur un décollage ou un atterrissage immédiatement : le premier vol est une découverte de l’avion, de ses commandes en vol et des options de caméra. En mode simulation, elles simulent la tête d’un pilote, dans son siège, mais vous pouvez bien entendu opter pour une caméra à l’extérieur de l’avion pour profiter du paysage.
On se laisse prendre par la main par l’instructrice de vol, qui nous laisse petit à petit les commandes. Le jeu propose également un système d’objectif qui permet de se familiariser avec la navigation en douceur. Une fois ces bases acquises, c’est toute la richesse promise par Asobo qui s’offre aux amatrices et amateurs de simulation de vol — et la vraie plus-value du titre.
La modélisation des cockpits est jouissive. Chaque bouton ou presque est actionnable d’un clic de souris — ou, pour les plus fortunés, avec un système HOTAS complet reproduisant l’intérieur. De l’ordinateur de bord aux modules gérant le pilote automatique, en passant par les volets, les lumières, la cabine… tout y est. Les avions présentés sont tous de véritables modèles et Asobo semble avoir tout fait pour que la physique du jeu s’approche au plus près de la réalité. Vous ne ferez pas faire un looping à un Boeing 747 en tirant à fond sur le manche. Les plus tatillons regretteront que les accidents ne soient que des écrans noirs — on imagine que les constructeurs n’ont pas autorisé la destruction de leur appareil à l’écran.
En bref, pour les passionnés de simulation, tout y est et, sceau Microsoft oblige, tout semble mieux packagé que dans les autres grands simulateurs. Les menus sont clairs, les commandes sont bien détaillées, les choix à faire avant le décollage sont explicites. L’éditeur propose même de briser la simulation quand on le souhaite, avec un écran permettant par exemple de sortir une sorte de GPS, bien plus parlant pour un néophyte que les VOR et les trajectoires utilisées dans l’aviation. On se plait également à voir que tous les joysticks, yoke, palonniers et manettes des gaz sont parfaitement reconnus par le système, avec une modélisation 3D de chaque outil qui pointe les boutons à mesure qu’on les édite. Les configurations par défaut sont d’ailleurs excellentes et presque plug and play, même avec des marques différentes.
Il nous est impossible de faire le tour de ce type de jeu, tant sa profondeur et sa justesse ne semblent accessibles qu’à de véritables pilotes. Mais il est clair qu’après avoir passé des centaines d’heures sur X-Plane 11, il sera difficile de se séparer de Flight Simulator, tant les sensations de vol sont excellentes et le spectacle absolument époustouflant.
Google Earth avec des avions
J’ai choisi l’aéroport de Nice pour mon premier vol, car c’est celui de la ville où je suis né. Je voulais évidemment voir comment Asobo avait modélisé ce paysage que je connais sur le bout des doigts et j’ai fait immédiatement ce court vol d’émerveillement. Je n’ai respecté aucune procédure, procédé à aucune checklist. J’ai simplement mis les gaz et profité du paysage, sublime, qui parvient dans les situations météorologiques les plus déchaînées à tirer à fond une 2080 Ti de Nvidia, réglages en ultra — la version testée n’était peut-être pas aussi bien optimisée que la version finale. Cette météo, que l’on peut changer en temps réel pendant le vol, est l’un des éléments qui font d’ailleurs le plus décrocher la mâchoire des joueurs et joueuses. Après cela, j’ai enchaîné sur le petit aérodrome de Lognes, où j’ai fait mon premier vrai vol.
Quand j’ai installé Flight Simulator sur un ordinateur de la rédaction, Rémy Pivois, directeur commercial du groupe Humanoid, a eu la même réaction : « Va à Châteauroux ! » m’a-t-il demandé, avant de poursuivre : « c’est une piste super longue, on y fait décoller des A380 ! » Je me suis exécuté et j’ai découvert, Boeing 747 dans les mains, cette fameuse piste d’entraînement au décollage et à l’atterrissage, où les manœuvres de type touch and go sont multipliés par les très gros porteurs. La piste n’a pas l’air large, mais qu’importe, l’immense 747-8 décolle sans problème.
À ce moment, l’expérience grand public est lancée. On survole les lieux de l’enfance (« Oh le stade de rugby ! ») et on apprécie la modélisation cartographique complètement époustouflante quand on s’éloigne un peu du sol. Jamais un simulateur n’a été aussi beau, ce qui, avec l’ordinateur qui suit, est une invitation au voyage. En ajoutant ce jeu qui coûte dans sa version la plus onéreuse près de 120 € au Game Pass, Microsoft sait que des joueurs casual s’essayeront au titre sans accessoire, simplement pour survoler des lieux. Un peu comme ces personnes qui peuvent passer des heures sur Google Maps ou Google Earth, à explorer un monde numérique. Ici, le pilotage devient secondaire et c’est l’émerveillement qui compte.
On sait déjà que la niche des amateurs de simulation de vol et les pilotes seront les utilisateurs au cœur de l’expérience Flight Simulator. Celles et ceux qui iront jusqu’au bout du titre, utilisant le simulateur d’avarie et le trafic aérien réel, avec les fonctionnalités multijoueurs. Celles et ceux qui passeront de longues minutes sur YouTube à suivre des tutoriels pour configurer l’ordinateur de bord d’un avion avant un décollage, à réviser l’alphabet phonétique international ou à faire des vols internationaux de plusieurs heures. Mais jamais Asobo ne laisse les joueurs occasionnels sur le côté du terrain. La vraie prouesse, c’est que lancer un petit Flight Sim depuis un canapé avec une manette est possible et pourra même être plaisant.
Pari gagné ? Reste à voir si le jeu saura garder de son pouvoir de fascination, grandement dû à ses finitions exemplaires, sur des configurations abordables… et sur Xbox One, console sortie en 2013.
Galerie
Le verdict
Microsoft Flight Simulator
Voir la ficheOn a aimé
- Magnifique
- La simulation sans concession
- Et pourtant accessible
On a moins aimé
- Exige une grosse config
- Quelques textures grossières au sol
Flight Simulator ne déçoit pas. Révélé en grande pompe pas des images à décrocher la mâchoire, le roi des simulateurs de vol revient dans une mouture 2020 qui réussit la prouesse d’être tout à la fois extrêmement complexe et réaliste pour les passionnés et accessible pour les curieuses et les curieux.
Difficile de savoir s’il saura contenter sur la durée et s’il touchera également les professionnels de l’aviation, mais ce qui est sûr, c’est que le titre d’Asobo est aussi complet et fourmillant de détails qu’il est agréable et intuitif à prendre en main.
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