Faute de pouvoir assister à des concerts, confinement oblige, le public s’est rabattu en masse sur les services de streaming musical. Et la situation ne devrait pas évoluer avant quelques semaines, du moins pas avant le 15 décembre, date à laquelle est prévue une deuxième étape de déconfinement, avec de nouveaux assouplissements, si les indicateurs sanitaires sont favorables.
Si la rigueur administrative ayant conduit à la fermeture des salles de spectacle a été une aubaine pour les plateformes comme Deezer, Spotify, Apple Music, Qobuz et bien d’autres, les artistes eux-mêmes n’en ont pas du tout profité. C’est ce que dénonce l’ADAMI (société civile pour l’Administration des Droits des Artistes et Musiciens Interprètes), dans le cadre d’une action initiée contre l’État.
« Alors qu’ils sont privés de travail depuis 9 mois, les artistes ne profitent pas non plus de la remarquable croissance des plateformes de streaming », déclare l’ADAMI. Or, s’appuyant sur une étude conduite en Europe par AEPO ARTIS, la société de gestion des droits alerte sur le fait que « seulement 1 % des artistes de la musique perçoivent l’équivalent d’un Smic pour l’utilisation de leur travail sur Internet ».
Pour enfoncer le clou, elle ajoute que dans un abonnement, la part des artistes-interprètes n’est que de 4,6 % du total.
La convocation d’une commission spéciale réclamée
Dans un communiqué du 23 novembre, l’ADAMI annonce donc qu’une mise en demeure du gouvernement a été adressée par courrier quelques jours plus tôt, le 19, pour que l’exécutif — c’est plus particulièrement le ministère de la Culture et de la Communication, dirigée par Roselyne Bachelot, qui est pris pour cible — remplisse ses obligations.Sinon, l’affaire sera portée dans deux mois auprès du Conseil d’État, la plus haute juridiction administrative en France.
Dans le détail, l’action de l’ADAMI vise à contraindre les services de Roselyne Bachelot à convoquer la commission administrative « devant définir une garantie de rémunération minimale pour les artistes de la musique ». Or pour la société de gestion des droits, trop de retard a été accumulé : une réunion aurait déjà dû avoir lieu il y a plus de trois an — l’article de loi auquel fait référence l’ADAMI date de mars 2017.
Ce n’est pas la première fois que l’ADAMI s’agace de la répartition inéquitable du marché de la musique en ligne. Dès 2014, par exemple, la société de gestion, avait dénoncé cette situation dans une pleine page de publicité dans Le Monde. Déjà à l’époque, la part très faible reçue par les chanteurs et les musiciens avait été soulignée. C’était même la part la plus petite du gâteau.
Selon les calculs de l’ADAMI, un abonnement à 9,99 euros par mois se répartit comme suit :
- 6,54 € vont aux intermédiaires (70 % producteurs et 30 % aux plateformes)
- 1,99 € va à l’État, via la TVA
- 1 € va au droit d’auteur
- 0,46€ va aux artistes (l’ADAMI précisant que cette somme doit encore être répartie entre tous ceux qui ont été écoutés par l’abonné au cours du mois)
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