Si beaucoup de jeux proposent des modes coopératifs, peu d’entre eux peuvent vraiment être définis comme des productions coopératives. Trop souvent, ils permettent effectivement de jouer en duo, mais sans vraiment offrir de purs moments de collaboration. Chacun fait alors sa vie de son côté, ce qui tue la promesse initiale. Heureusement, il existe le studio Hazelight Studios, qui est devenu un spécialiste des jeux jouables uniquement en duo. Après A Way Out, il nous propose, depuis le 26 mars, It Takes Two.
Et c’est particulièrement brillant.
Autant l’affirmer tout de suite : oui, It Takes Two impose d’être deux joueurs ou joueuses, que ce soit à distance (en ligne) ou, mieux, sur un même canapé (en local). Sans quoi, il ne serait pas un bon jeu coopératif. Néanmoins, il n’est pas nécessaire d’acheter deux fois le jeu pour en faire profiter un ami, à partir du moment où il joue sur la même plateforme. D’une certaine manière, Hazelight Studios pense à celles et ceux qui pourraient avoir du mal à trouver un partenaire : c’est toujours plus simple de convaincre quelqu’un quand c’est gratuit.
Une générosité débordante
It Takes Two n’est jouable qu’en version originale sous-titrée en français. Dommage pour la compréhension de certains dialogues prononcés dans le feu de l’action.
Sur bien des points, It Takes Two ressemble à une production Pixar. Il s’articule autour de Cody et May, qui forment un couple sur le point de divorcer. En annonçant cette mauvaise nouvelle à leur fille, ils vont être transformés en deux petites poupées. Les voilà obligés de collaborer pour retrouver leur forme humaine, grâce aux conseils avisés de l’énigmatique Docteur Hakim, auteur d’un livre sur la thérapie de couple.
Cody et May doivent mettre de côté leurs conflits et leurs reproches pour se rabibocher une bonne fois pour toutes. Cette intrigue très touchante, qui part un peu dans tous les sens, est en quelques sortes une mise en abîme du gameplay. Il s’agit d’une manière intelligente de lier le fond et la forme, sachant que It Take Two ne manquera jamais de vous arracher un petit sourire. Les inspirations sont nombreuses et font extrêmement de bien, surtout par les temps qui courent.
On se croirait autant dans Toy Story qu’à Disneyland
Hazelight Studios se nourrit du passif tumultueux des deux amoureux pour accoucher de situations parfois abracadabrantes. Où l’on passe par tous les états et tous les décors, à combattre/aider des personnages loufoques (exemple : l’aspirateur laissé à l’abandon). It Takes Two est d’une variété hallucinante. Là, on prête main forte à des écureuils pour se débarrasser d’un nid de guêpes (dont ne s’était pas occupé le mari). Ici, on se retrouve dans un château à la recherche d’un jouet en forme d’éléphant. Il y a carrément une séquence où l’on chevauche un bébé araignée aux yeux attendrissants — même les phobiques craqueront. Non seulement It Takes Two traite le sujet de la séparation avec justesse mais, en prime, il mise sur une créativité totale pour donner naissance à une expérience qui ressemble à un parc d’attractions. On se croirait autant dans Toy Story qu’à Disneyland. Le plaisir est immédiat et, surtout, il ne nous quitte jamais.
It Takes Two ne ressemble à aucun autre jeu alors qu’il adore emprunter à droite et à gauche, pour que chaque chapitre fourmille d’idées. On n’est d’ailleurs jamais au bout de ses surprises. Quand on croit avoir fait le tour d’une mécanique, une autre la remplace. Ce schéma se répète jusqu’au dénouement et témoigne de l’envie des développeurs de renouveler constamment l’expérience.
Le principe fonctionne à merveille, puisqu’il se nourrit de la narration pour matérialiser ce que l’histoire simpliste raconte en divers éléments de gameplay. Cody a la main verte ? Hop, le voilà doté d’un pouvoir lui permettant de devenir une plante. May est la bricoleuse du couple ? Elle aura l’occasion de s’amuser avec un marteau. Il faut dès lors comprendre que Cody et May ont chacun un rôle à jouer.
La collaboration cimente le jeu
It Takes Two n’est donc pas un jeu où l’argument coopératif ne serait qu’un artifice. La collaboration cimente le jeu de A à Z. Tout au long de leur aventure très colorée, Cody et May recevront des compétences différentes, qu’il est alors nécessaire de combiner pour avancer. En résultent des petites énigmes qui ne vous demanderont pas de réfléchir très longtemps, simplement de communiquer pour trouver la solution. Le challenge est loin d’être insurmontable, y compris pendant les quelques combats qui pimentent l’épopée (il faut que les deux héros meurent en même temps pour perdre la partie). La diversité des approches fait qu’on s’y accroche, la volonté de découvrir la trouvaille d’après comme motivation.
Entre deux moments où il est nécessaire de faire fonctionner — un peu — sa matière grise, It Takes Two demande du doigté pour sauter sur des plateformes plus ou moins exiguës. Il vous arrivera de tomber, sans réelle conséquence dramatique pour la suite des événements. Hazelight Studios a par ailleurs pensé à intégrer des mini-jeux secrets et optionnels, lesquels permettent à Cody et May de régler leurs comptes, en un-contre-un. Vous l’aurez compris, on ne s’ennuie jamais dans It Takes Two. Plus important encore, les deux joueurs ne s’amusent pas dans leur coin. Le fait que les deux héros ne se jouent pas tout à fait de la même façon pourrait même pousser certains à faire le jeu une deuxième fois — avec l’autre point de vue.
À l’arrivée, il n’y a que techniquement que l’on pourra déplorer quelques menus défauts. Très joli sur Xbox Series X, grâce à un travail sur les textures, les détails et les matières, le jeu édité par Electronic Arts n’assure pas toujours une fluidité infaillible. On a aussi pu constater quelques bugs qui ont forcé à relancer la partie (l’un des personnages était bloqué dans un décor) et des soucis de caméra (qui ne se place pas toujours correctement). Petite précision : l’écran est scindé en deux, même quand vous jouez avec un ami en ligne. Original, cet élément permet de toujours garder un œil sur ce que fait l’autre pendant la bonne dizaine d’heures réclamées pour voir le générique de fin. Gare aux disputes, surtout en couple.
Le verdict
It Takes Two
Voir la ficheOn a aimé
- Une vraie expérience coopérative
- D'une générosité et d'une variété affolantes
- Le pass ami (qui permet de n'acheter qu'une seule fois le jeu)
On a moins aimé
- Il faut un ami disponible
- Quelques couacs techniques
- Manque d'un soupçon de challenge
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