Un homme rentre chez lui après une dure journée de travail (et, en plus, il avait encore oublié ses clés). Il est chaleureusement accueilli par sa femme, qui lui a préparé une jolie surprise. Puis, au bout de 5 minutes, montre en main, un mystérieux homme se présentant comme un policier interrompt la « soirée du bonheur » pour accuser la femme du meurtre de son propre père. Le mari se débat puis se prend un coup de poing. Le revoilà en train de rentrer chez lui, toujours chaleureusement accueilli par sa femme qui n’a visiblement aucun souvenir de ce qu’il vient de se passer. L’homme agit alors différemment : il ne se débat plus et se fait étrangler. Hop, retour à la case départ.
Vous l’aurez compris, le jeu vidéo Twelve Minutes — dévoilé à l’E3 2019 — s’articule autour d’une boucle temporelle. On connaît le point de départ — un couple chahuté par un prétendu policier — charge ensuite à la joueuse et au joueur de tirer au clair cette accusation, jusqu’à une finalité assez compliquée à discerner.
Le concept, plutôt novateur dans le monde du jeu vidéo, n’est pas inédit. Au cinéma, on a vu Tom Cruise revivre toujours la même bataille dans Edge of Tomorrow. Twelve Minutes cherche donc à s’approprier cette notion de jour sans fin en y ajoutant des interactions. Et il transforme l’exercice… en enfer.
Twelve Minutes est tout simplement un enfer
Twelve Minutes est disponible depuis le 19 août sur Xbox One, Xbox Series S, Xbox Series X et PC. Il est déjà dans le Xbox Game Pass.
Twelve Minutes s’appuie sur une caméra en vue du dessus, permettant d’avoir une belle visibilité sur une unité de lieu hyper réduite (un simple appartement T2, du genre qui coûterait malgré tout assez cher dans une capitale). Il se présente comme un point’n’click, qui demande d’explorer les lieux à la recherche d’indices pour mieux comprendre ce qui se trame. Dans cette ambition de devenir peu à peu un terrain pour expérimenter différents scénarios, Twelve Minutes brille. Il y a un côté puzzle indéniable, qui force à se creuser la tête pour imaginer des situations donnant accès à toujours plus d’informations. Néanmoins, Twelve Minutes est vite paralysé par des incohérences qui se mettent au service d’un twist malsain à la crédibilité très douteuse et de séquences choquantes, que le jeu nous force à revivre.
Le scénario joue la carte du mystère, puis arrondit les angles quand cela l’arrange
Le twist en lui-même n’est pas le fond du problème. Il est même une réussite si l’on s’en tient à la forme, puisque littéralement personne ne le verra venir (on ne dira rien ici, d’ailleurs, ça n’en vaut pas vraiment la peine). C’est le cheminement qui ne fonctionne pas et lève peu à peu le voile sur des mécaniques absurdes. Elles révèlent des comportements illogiques au sein du casting, qui prend vie grâce à un trio d’acteurs renommés (James McAvoy, Daisy Ridley, Willem Dafoe) et malgré tout impliqués.
D’une scène à l’autre, on perçoit des failles dans leurs réactions, laissant la joueuse ou le joueur dans l’incompréhension totale face à des phrases contradictoires et répétées en boucle. Elles sont liées à l’obligation de valider des jalons pour arriver jusqu’à un dénouement dont on peine hélas à dessiner les contours.
Il est rageant de ne pas débloquer une nouvelle ligne de dialogue importante, simplement parce qu’on a manqué de faire une action déterminée à un moment déterminé. Ce défaut, lié à la boucle temporelle, force à toujours revivre les mêmes moments, jusqu’à l’écœurement. Et la frustration finit par arriver.
On passe une heure à fouiller l’appartement de fond en comble pour tenter de faire entendre raison à sa chère et tendre (qui a vraiment le sale rôle dans l’histoire, avec des réactions parfois très absurdes). À contrario, le fameux twist sorti d’un chapeau magique est un peu trop facilement accepté par les protagonistes. Derrière les fiascos qui se répètent inlassablement, on devine l’escroquerie : le scénario joue la carte du mystère, puis arrondit les angles quand cela l’arrange. Par conséquent, on ne sait jamais vraiment où Twelve Minutes cherche à nous faire aller, ni quelle fin sera la bonne (la notion de moralité est très abstraite). « À quoi bon ? », me suis-je plusieurs fois dit.
Twelve Minutes ne peut même pas masquer ses trous scénaristiques dans un gameplay irréprochable. Bien au contraire. La prise en main parvient à devenir inconfortable, avec pourtant si peu d’interactions possible. Elle demande de réaliser des manipulations complexes pour produire des actions simples. En prime, elle impose des déplacements lourds, alors qu’il est parfois nécessaire d’être précis — et rapide — pour parvenir à ses fins. À ces désagréments s’ajoutent des bugs de collision grossiers, lesquels décrédibilisent un jeu qui se veut réaliste au-delà de la manipulation du temps. On sent que tout le budget est allé dans ce casting vocal aguicheur plutôt que dans les finitions.
À l’arrivée, en plus d’être difficile à avaler en termes de narration, l’expérience est tout simplement pénible, sur le fond comme sur la forme. Jamais amusant, encore moins fun, Twelve Minutes, hormis un concept et son trio de stars, n’a vraiment rien pour lui.
Le verdict
Twelve Minutes
Voir la ficheOn a aimé
- Le casting vocal impliqué
- Le concept, à la base
- L'appartement bien rangé
On a moins aimé
- Des incohérences trop voyantes
- Ce twist répugnant
- Gameplay trop lourd
+ rapide, + pratique, + exclusif
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