La cérémonie d’ouverture de la gamescom 2021, qui a eu lieu le 25 août, s’est terminée sur une copieuse bande-annonce de Death Stranding: Director’s Cut. Une belle mise en avant pour un jeu déjà disponible sur PS4 et PC, qu’on peut expliquer par l’amitié qui lie Hideo Kojima, créateur du titre, et Geoff Keighley, organisateur de l’événement. Cette longue vidéo s’est concentrée sur les nouveautés que réunira cette version, à paraître le 24 septembre sur PS5. Et je dois bien avouer que les images m’ont fait beaucoup de peine : qu’est devenu le Death Stranding original auquel il m’arrive encore de penser aujourd’hui ?
Outre les améliorations graphiques attendues lors de ce passage sur une console plus puissante et les apports de la manette DualSense, Death Stranding: Director’s Cut apportera son lot de contenu inédit. Mais il semblerait que Hideo Kojima soit allé un peu trop loin, privilégiant la générosité (il faut bien justifier le sous-titre Director’s Cut) au bon sens. Dès lors, cette nouvelle édition gavée de bonus ne me donne pas du tout envie. Ce trop-plein dénature l’essence même de Death Stranding.
https://www.youtube.com/watch?v=5Fxy0_hb3tE
Pourquoi Death Stranding: Director’s Cut a tout d’une trahison
Hideo Kojima, qui estime que Death Stranding: Director’s Cut n’a rien d’une Director’s Cut (ce qui constitue déjà un problème), n’a pas eu la main légère. Nouvelles options pour faciliter le gameplay (on y reviendra), nouvelles missions, modes de jeu qui n’ont rien à faire là (par exemple, l’opportunité de refaire les boss), intégration de courses de voitures (?!), nouveaux gadgets… Normalement, on devrait saluer tous ces ajouts, justifiant un peu plus un nouveau passage à la caisse. Mais Death Stranding n’est pas un jeu comme les autres, c’est une œuvre à part censée affirmer le style de son créateur. En ce sens, il ne peut pas céder à cette facilité qui consisterait à s’ouvrir un peu plus à un public d’abord hermétique, à grand renfort d’activités plus attractives. D’une simulation FedEx articulée autour de contraintes grisantes (oui, ce n’est pas vendeur), Death Stranding est en train de devenir un fourre-tout sans réelle direction, au lieu d’une source de divertissement immense.
Les ultimes secondes de la bande-annonce diffusée le 25 août symbolisent une forme de trahison. On nous promet « plus de fun » — des figures au guidon d’une moto après avoir pris des tremplins ?! — au sein d’une expérience au ton sérieux et mélancolique. Où sont passées cette somme mélancolique de toutes les peurs, cette quête inouïe de l’unification, cette notion presque poétique de l’isolement, cette galerie de personnages charismatiques ? Death Stranding n’était pas une production parfaite, encore moins universelle. Death Stranding: Director’s Cut semble parti pour mettre un peu plus en exergue les travers de son créateur : son goût pour l’absurde à outrance et sa capacité à nous imposer ses combats personnels (les nouvelles séquences d’infiltration lui permettent de faire le deuil de la saga Metal Gear, qu’il a perdue après sa rupture douloureuse avec Konami).
Et puis, que penser de toutes ces nouvelles options de gameplay qui permettront de livrer beaucoup plus facilement les colis (il y a carrément un canon pour envoyer les paquets très loin). La réussite de Death’s Stranding, d’abord narrative, se trouvait aussi dans cette propension à imposer une vraie simulation dans les déplacements, avec analyse du terrain et gestion des obstacles. Dans la Director’s Cut, on pourra équiper le héros avec des stabilisateurs avancés pour atterrir en douceur quand on se jettera dans le vide. Cette nouveauté est une fausse bonne nouvelle : Death Stranding se caricature en rendant son gameplay plus accessible, en inhibant cette exigence contre laquelle on peut pester, mais qui porte ces excellentes sensations. Le voyage de Sam Porter (incarné par Norman Reedus) passe par des difficultés à surmonter, par des phases répétitives presque décourageantes. Les enlever pour plaire au grand public ne doit pas faire partie de l’équation.
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