« Pourquoi toutes les lumières sont-elles éteintes ? Je n’aime pas ça », s’étonne Caroline, héroïne de Tormented Souls. Elle s’est pourtant jetée d’elle-même dans la gueule du loup, après avoir reçu une mystérieuse photo de jumelles l’envoyant dans un endroit peu fréquentable (un manoir converti en hôpital). Où elle découvrira, bien évidemment, que de sombres desseins ont lieu, jusqu’à la plonger dans un effroi partagé avec la joueuse ou le joueur. Dans Tormented Souls, disponible pour le moment sur PC et PS5, on craint autant le noir que les étranges monstres.
Si Tormented Souls recycle un poncif (une héroïne qui part vers l’inconnu en sachant pertinemment que ce n’est pas une bonne idée), c’est parce qu’il embrasse totalement sa fibre survival-horror. Il assume son hommage aux monuments du genre, que sont Resident Evil, Alone in the Dark ou encore Silent Hill. L’idée directrice n’est pas de révolutionner la formule, plutôt de mettre en exergue de vieilles mécaniques poussiéreuses. Et les amateurs un tantinet nostalgiques risquent d’adorer.
Un vieux Resident Evil, plus de 20 ans après
Les premiers Resident Evil reposaient sur une association d’ingrédients pensés pour faire naître des sueurs froides chez les joueuses et les joueurs. Ces petits bruitages, ces craquements et grincements incessants, ces couloirs en T qu’on maudissait par peur de regarder du mauvais côté, ces machines à écrire qui permettaient de sauvegarder de manière limitée, ces munitions à bien gérer, cette caméra fixe qui se jouait parfois de la perspective, l’interdiction de tirer en bougeant… Tous ces éléments, Tormented Souls les reprend à son compte dans le but de faire naître le sentiment d’autrefois.
D’aucuns pourraient n’y voir qu’une pâle copie, sortie 20 ans trop tard. On préfère se délecter de ce plat rempli de madeleines de Proust, consommées de préférence dans le noir avec un casque sur la tête. En prime, les développeurs ont pensé à bien référencer leur jeu, avec des objets qui font directement écho à la saga de Capcom (plantes vertes, machines à écrire…). En ce sens, la promesse de l’hommage n’est jamais un mensonge.
Dans Tormented Souls, le noir est un ennemi à part entière. Quand Caroline n’y voit pas grand-chose, elle ne peut rien faire — même pas se cramponner à son arsenal de fortune. Pire, si elle reste trop souvent dans l’obscurité, elle finira par se faire consumer jusqu’à lâcher son ultime souffle. De cette contrainte naît une vraie mécanique autour du noir et, par ricochet, de la lumière. Elle passe par la nécessité d’avoir constamment une source pour s’éclairer. Elle peut être extérieure (des bougies à allumer soi-même avec un briquet, un interrupteur à actionner) ou prendre la forme d’un équipement (ode à cette lampe portable qu’on obtient dans le dernier tiers et qui permet de ne plus avoir à se soucier de l’éclairage). Cette donnée vient ajouter une bonne dose de stress à l’aventure de Caroline.
Avec et sans lumière
Tormented Souls se permet en outre de ressusciter ces énigmes qu’on a tant chéries par le passé. Elles imposent, certes, des allers-retours et des solutions parfois capillotractées, mais au moins assurent-elles un bon niveau de réflexion. Rien ne doit être laissé au hasard dans Tormented Souls, qui demande parfois de vérifier le réglage d’un outil ou d’ouvrir manuellement une bouteille avant l’utilisation. Plusieurs fois, on se dit que le studio a vraiment pensé à ces petits détails qui font toute la différence. De cette manière, le gameplay gagne en authenticité, à défaut d’être totalement irréprochable en ce qui concerne le confort.
Un vieux Resident Evil dans tout ce qu’il a de plus appréciable… et détestable
Car si le jeu est conçu pour faire revivre des souvenirs, voire des cauchemars d’antan, certains défauts sont toujours là pour rappeler qu’il appartient à une autre époque. Une époque où on pardonnait un peu plus les errements qui s’effaçaient derrière l’ambiance et la narration. Dans les grandes lignes, Tormented Souls ne veut rien faire évoluer. Par conséquent, il est nécessaire d’accepter ces limites qui ont tout pour vous faire pester. L’impossibilité de tirer en bougeant, ce qui fut longtemps reproché aux Resident Evil, en est le symbole. Ces plans fixes qui arrivent trop brusquement et nuisent à la visibilité sont également susceptibles d’agacer les moins avertis. Tormented Souls est vraiment un vieux Resident Evil dans tout ce qu’il a de plus appréciable… et détestable. Et il n’y a peut-être que cette gestion plus souple de l’inventaire pour marquer une vraie rupture. Elle ne suffira pas à ériger le titre au rang de version 2.0.
Malgré tout, on parvient quand même à passer « un bon moment ». On sort ici les guillemets pour une raison évidente : Tormented Souls n’est pas là pour être accueillant. En termes d’ambiance, on navigue vraiment dans le morbide. Sans être renversants (ne comparez pas au magnifique Resident Evil Village), les graphismes dessinent des décors effrayants qui invitent à la fuite plutôt qu’à la visite. L’architecture des lieux — réunis dans un seul bâtiment — fourmille de raccourcis bien pensés et des indispensables salles cachées, à défaut de proposer des environnements immenses à parcourir. On se croirait dans le mythique manoir Spencer du tout premier Resident Evil, ce qui insiste toujours plus sur cet ancrage dans le passé. On a vraiment vu pire, comme source d’inspiration.
Le verdict
Tormented Souls
Voir la ficheOn a aimé
- Ambiance glauque comme il faut
- L'hommage assumé à 100 %
- De vraies énigmes
On a moins aimé
- Gameplay daté
- Ergonomie datée
- Graphismes datés
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