Il est de ces jeux qui savent définir tout un genre, qui marquent une époque. Doom et GTA ont cette envergure, à tel point que l’on parle parfois de leurs concurrents comme des Doom-like et des GTA-like. Age of Empires est aussi de cet acabit. Parmi les jeux de stratégie en temps réel, il fait partie, avec ses illustres rivaux comme Total War, StarCraft, Warcraft 3: Reign of Chaos et Command and Conquer : Alerte rouge, de ces licences qui ont magnifié le genre dont on conserve un souvenir impérissable.
Comme tout le monde, c’est avec beaucoup de surprise que l’on a appris en 2017 la mise en chantier d’un tout nouvel opus de la célèbre saga, Age of Empires IV (le jeu est disponible à partir de ce jeudi 28 octobre). Cela faisait plus de dix ans que la licence semblait délaissée, hormis la sortie de quelques extensions et versions remasterisées : le dernier épisode, Age of Empires III, datait de 2005 et il n’avait pas laissé une trace mémorable. Il s’était même avéré plutôt décevant par rapport à ses deux prédécesseurs. Au point d’ailleurs que l’on ne l’évoque jamais vraiment. Un enfant dont on aurait un peu honte. Il est dans la famille, mais bon.
Mais qu’importe Age of Empires III. L’annonce constituait une bonne surprise, comme lorsque l’on recroise un ami d’enfance perdu de vue depuis plusieurs années. Cette surprise a cependant soulevé des questions légitimes : à quoi faut-il s’attendre ? A-t-il changé ? A-t-il mûri ? Tout sera-t-il comme avant ? En somme, va-t-on avoir l’impression de reprendre contact comme si on s’était quitté la veille ? Hé oui, on parle bien d’Age of Empires IV, pas de ce camarade un temps oublié, mais c’est tout comme.
Age of Empires : Le Retour du Roi (des RTS)
Pour rappel, Age of Empires IV est disponible dans le Xbox Game Pass dès le jour de sa sortie. L’abonnement, facturé 9,99 € par mois, permet de découvrir d’autres jeux vidéo.
C’est donc ce 28 octobre 2021 que les retrouvailles officielles entre le public et Age of Empires démarrent, avec la sortie générale du jeu de stratégie en temps réel. Et disons-le tout net, puisque nous avons eu l’occasion de passer plusieurs heures en amont avec Age of Empires IV : quel plaisir de retrouver ce vieil ami que l’on n’avait pas revu depuis tout ce temps ! On s’inquiétait un peu, car nos souvenirs étaient toujours vivaces, et on craignait de les altérer un peu avec une déconvenue, mais les retrouvailles avec cette suite au célèbre RTS ont été très plaisantes.
Cette suite n’est en réalité pas tout à fait chronologique : si Age of Empires premier du nom se passait dans l’Antiquité, le suivant à l’époque médiévale et le troisième en pleine époque coloniale, Age of Empires IV opère un retour dans le temps pour s’insérer au Moyen-Âge. De fait, la comparaison avec Age of Empires II: The Age of Kings est inévitable, mais ce n’est absolument pas au désavantage du nouvel opus, malgré tout le mérite que l’on associe bien volontiers au II. Au contraire : la profondeur du IV est incomparable.
C’est évidemment logique et c’était attendu. Pas loin de 20 ans séparent ces deux jeux et il aurait été ahurissant que Relic Entertainment, le studio en charge du développement, ne parvienne pas à insérer des tas de nouvelles mécaniques, en profitant des acquis en matière de développement, alors même que les RTS sont sa spécialité. On lui doit entre autres toute la série Warhammer 40,000: Dawn of War, dont la réputation dans ce domaine est solide. Et on ne va pas se mentir : si vous comparez à Age of Empires II, Age of Empires IV est systématiquement victorieux, quel que soit le critère étudié.
Graphismes, bruitages, interface, musique, gestion de la caméra, commandes… le fossé est incroyable. Cela n’a d’ailleurs pas grand sens de se lancer dans un comparatif, car ce sont deux jeux venant de deux époques différentes. On s’en rend compte jusque dans les animations des personnages et les interactions avec les bâtiments : nos bonhommes sont par exemple capables de passer entre deux maisons de la même faction placées côte à côte sans que cela n’entraîne un quelconque conflit de polygone. C’était inimaginable en 1999 avec AoE II.
Pour qui a déjà joué à un Age of Empires, l’acclimatation à Age of Empires IV sera immédiate ou presque. On a une campagne, du multijoueur (jusqu’à huit) et des options de partie rapide contre l’IA. Il faut toujours traverser différents âges (quatre en tout) pour accéder à des unités en plus, des technologies plus avancées et des bâtiments additionnels. Et il faut toujours accumuler des ressources (nourriture, or, bois, pierre) pour soutenir l’effort de guerre contre l’ennemi, qu’il soit contrôlé par l’ordinateur ou bien dirigé par quelqu’un d’autre, quelque part dans le monde. Plusieurs civilisations sont proposées (huit au lancement du jeu) et, bien sûr, chacune a ses forces et ses faiblesses.
Mais il y a aussi des changements d’ordre tactique et stratégique à souligner. Comme le disent Sun Tzu ou Carl von Clausewitz, le terrain peut faire toute la différence dans AoE IV, grâce à la mécanique de l’embuscade. Vous pouvez mettre hors de vue des unités dans une forêt dense pour tendre un traquenard à une colonne adverse qui ne se doute de rien. Vous pouvez jouer sur les hauteurs d’une colline pour gagner un avantage face aux unités en contrebas. Vous pouvez vous positionner derrière une crête pour tenter une manœuvre sur le flanc de l’armée ennemie ou par l’arrière.
Age of Empires IV approfondit aussi tous les à-côtés du jeu
Mais en fin de compte, ce qui nous a le plus surpris, c’est l’approfondissement de tous les à-côtés du jeu vidéo. La campagne pour le jeu en solo bénéficie d’une narration très poussée, avec une voix off qui recontextualise les batailles auxquelles on prend part, avant et après chaque mission. C’est un véritable cours d’histoire qui s’offre à nous, qui peut évoquer, toutes proportions gardées, les « discovery tours » d’Ubisoft avec la série Assassin’s Creed. La présentation est différente, mais la logique est la même.
Plus remarquable encore est l’usage d’une réalité augmentée pour appuyer le propos historique. Un exemple ? Pour raconter un épisode impliquant la cité de Bayeux, Microsoft, qui édite le jeu, est allé jusqu’à faire des plans de la ville en se servant d’un drone. Les vidéos qui en ont résulté ont ensuite servies de support pour incruster des petits bonhommes virtuels. L’idée, ici ? Montrer la progression d’une colonne de fantassins à proximité de la cathédrale de Bayeux, pour concrétiser la narration de la voix off.
La mise en scène est épatante pour donner de l’épaisseur au récit, avec des items divers que l’on peut débloquer en cas de succès d’une mission. Et pour qui souhaite simplement avancer sans difficulté, le jeu propose un mode Histoire justement, qui correspond à un mode très facile : les attaques contre vous seront réduites au minimum et d’une faible ampleur. Trois autres échelons de difficulté (facile, intermédiaire, difficile) sont disponibles, selon votre goût du challenge et votre maîtrise des RTS.
Pour qui est un habitué des jeux de stratégie, AoE IV ne surprendra pas dans ces modes de jeu. Le mode « Escarmouche », par exemple, permet de lancer rapidement des parties en multijoueur contre l’IA : 1 contre 1, 3 contre 3, 4 contre 4, avec des réglages pour corser ou non la difficulté et déterminer les conditions de victoire, mais aussi les paramètres de début d’une partie (taille de la carte, âge de départ, apparence de la carte, position des équipes, connaissance du terrain).
Les amateurs de défi pourront aussi se challenger avec le mode « Art de la guerre », car il s’agit de mettre à l’épreuve joueurs et joueuses sur des compartiments précis du jeu. Par exemple, le développement de l’économie en early game, c’est-à-dire l’économie primitive, celle que l’on amasse au cours des premières minutes. Cela demande de maintenir un flux de ressources constant et surtout de s’organiser pour déterminer l’ordre de production (par exemple, un autre bâtiment ou un nouveau fermier ?).
Des médailles sont décernées selon la vitesse à laquelle vous complétez les défis. Ne vous y trompez pas, cela peut vite s’avérer ardu. Si la médaille de bronze est obtenable sans déployer trop d’efforts, il faudra supprimer tout temps mort dans votre flux pour espérer décrocher l’argent. Et pour la médaille d’or, pas le droit à l’erreur : tout doit être parfait ou presque. En somme, il va vous falloir chauffer les APM (actions par minute) et ne pas hésiter à utiliser les raccourcis au clavier, pour gagner quelques dixièmes de seconde.
L’une des questions qui peut se poser avec un jeu comme Age of Empires est sa durée de vie. Si vous n’êtes pas un mordu du multijoueur, vous pourriez avoir le sentiment d’avoir vite fait le tour. On le confesse, nous n’avons jamais été très brillant en multijoueur en RTS. Du temps du portail web Goa, nous avons subi quelques défaites cuisantes sur Ages of Empires II. Nous n’avions alors pas un très haut APM, c’est le moins que l’on puisse dire. Et comme on a vieilli depuis, il est certain que nos réflexes se sont émoussés.
Le nouveau volet parvient cependant à vous donner envie de revenir, avec un système de quêtes journalières — terminer une partie, remporter une victoire avec une merveille, gagner avec telle ou telle civilisation, produire un certain nombre d’unités pendant une partie ou acheter toutes les améliorations pour un type d’unité. Cela vous donne des points d’expérience faisant progresser votre profil. Il y a aussi des sortes de hauts-faits, les maîtrises. En les accomplissant, vous pouvez débloquer des petites récompenses.
Mais surtout, la durée de vie d’Age of Empires IV à long terme pourrait être fonction de l’arrivée des mods, pour personnaliser fortement les parties. Cette fonctionnalité ne sera pas proposée dès le lancement du jeu, mais arrivera ultérieurement. En fonction du degré de latitude que laissera Microsoft à sa communauté, les joueurs et les joueuses pourront prolonger plus ou moins leur expérience. Et leurs retrouvailles avec ce vieil ami qui finalement nous manquait plus que ce que l’on pensait.
Le verdict
Age of Empires IV
Voir la ficheOn a aimé
- Les graphismes, le son, la jouabilité, l'interface...
- Les explications historiques à grand renfort de vidéos et de réalité augmentée
- Le mode « Art de la guerre » pour s'entraîner et performer
- Il y a le « Wololo »
On a moins aimé
- Si vous goûtez peu au multijoueur, vous risquez de vite faire le tour du jeu
- Pas de mods au démarrage (mais ça va changer)
- Temps de chargement un poil longs
- Le « Wololo » a un peu changé
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