Dirty John, Dr Death, Homecoming… Les podcasts envahissent nos vies et nos écrans depuis déjà plusieurs années. Jusque-là, le genre horrifique avait étonnamment été plutôt épargné par des adaptations en série. En 2022, Netflix honore le bal avec Archive 81, d’après le podcast américain de Marc Sollinger et Daniel Powell. Cette fiction repose sur le principe du found-footage, déjà bien exploité par Le projet Blair Witch ou Cloverfield au cinéma : des protagonistes découvrent des vidéos tournées à la première personne, dans lesquelles des éléments horrifiques et fantastiques donnent la chair de poule.
Dans le cas d’Archive 81, Dan Turner est chargé de restaurer de vieilles cassettes vidéo sauvées d’un incendie, datant des années 1990 et réalisées par une certaine Melody Pendras. Immergée dans un mystérieux immeuble, le Visser, pour l’écriture de sa thèse, la jeune femme découvre une secte occulte, au croisement de la sorcellerie, de la religion et de voyages temporels. Alors que passé et présent se mêlent, Dan est persuadé qu’il peut sauver l’étudiante de son destin funeste…
Une atmosphère hypnotisante
Bon, commençons déjà par les points positifs, puisqu’ils sont peu nombreux. La série fait le job et parvient à nous accrocher à grands renforts de sursauts sur canapé. Il faut dire que cette première saison bénéficie d’un atout de taille dans les coulisses : elle est co-produite par James Wan, grand réalisateur de Saw, Insidious et Conjuring (rien que ça). Des inspirations qui se ressentent dans l’ambiance inquiétante et pesante instaurée par la série.
La musique nous pousse à retenir notre souffle à chaque instant, les décors sont oppressants, tandis que les couleurs sombres ou jaunâtres instaurent un malaise grandissant sur notre petit écran. Les lieux explorés par les personnages, dont le Visser, sur lequel enquête Melody, deviennent des protagonistes à part entière, se refermant comme des pièges. De ce point de vue, Archive 81 est très réussie et offre de jolis moments d’épouvante, au fil de ses huit épisodes.
Le thriller bénéficie également d’un casting convaincant, porté par le duo Mamoudou Athie (The Get Down) et Dina Shihabi (Altered Carbon), tous deux très attachants. L’empathie pour leurs destins brisés est immédiate, renforçant ainsi les scènes d’horreur. Si certaines séquences tombent dans le gore un peu facile et inutile, comme la pénible fin de l’épisode 4, Archive 81 trouve tout de même un équilibre suffisant sur la forme pour nous faire rester jusqu’au bout.
À la recherche de la cohérence perdue
Mais le gros problème de la série se situe plutôt sur le fond. On peut légitimement se poser des questions lorsque les moments les plus crédibles relèvent du paranormal, et non pas des situations de la vie réelle. Un paradoxe vraiment dérangeant, qui nous empêche de croire pleinement à l’univers développé autour des personnages principaux, dès le premier épisode.
Ainsi, Dan accepte de réparer ces cassettes vidéos sur la base d’une photo de chien ressemblant au sien, pour le compte d’une entreprise fantôme, sur laquelle il ne parvient pas à trouver d’informations claires. Pour réaliser son minutieux travail de restauration, il accepte de vivre plusieurs semaines dans une maison isolée, au fond d’une forêt, sans réseau ni Internet. Et dans le passé comme dans le présent, Melody et Dan passent huit épisodes à fouiller des lieux dangereux en solo, à la lampe torche.
Nous pourrions continuer un moment avec ces exemples, mais cela en deviendrait presque risible tant tous les éléments d’un mauvais film d’horreur sont réunis. Parfois, l’excuse du genre ne suffit pas à faire oublier un manque de vraisemblance flagrant.
Trop de portes ouvertes
Sorcellerie antique, religion obscure, sacrifices humains, magie noire, voyage dans le temps… Archive 81 développe tant de thématiques fantastiques qu’elle ne parvient plus à leur donner une résolution convenable. L’ensemble est confus, entremêlé entre plusieurs époques avec une narration peu maîtrisée.
L’usage des archives et du found-footage, pourtant au cœur de la série, ne tient que quelques épisodes avant de s’effondrer. Les créateurs ont eu la bonne idée de faire « revivre » ces cassettes oubliées sans le filtre d’un lecteur VHS flou, pour un passage plus fluide aux années 1990. Mais l’effacement du medium originel sert de prétexte à des incohérences scénaristiques grossières. Tout à coup, le spectateur tout comme Dan, le protagoniste principal, découvrent des informations qui ne devraient pas être portées à leur connaissance. Tout s’embrouille entre passé et présent, avec l’ajout d’une autre période historique dans l’avant-dernier épisode.
La plateforme Netflix elle-même ne semble pas convaincue par son bébé, très peu mis en avant sur leur page d’accueil, malgré une présence dans le top 10 actuel en France. Avec des explications tirées par les cheveux, la série parvient difficilement à un dénouement étrange, mais pas suffisamment intrigant pour nous pousser à rester lors d’une éventuelle suite. Netflix aurait dû utiliser la magie noire du Visser pour invoquer une crédibilité à Archive 81.
Le verdict
Archive 81
Voir la ficheOn a aimé
- Des acteurs convaincants
- Une ambiance glauque à souhait
- Des cliffhangers efficaces
On a moins aimé
- La crédibilité a disparu
- Trop d’éléments non résolus
- Un lien confus entre passé et présent
Des cassettes vidéos perdues dans un incendie, un immeuble abritant une secte occulte, un clan de sorcières impliqué… Si les éléments explorés par Archive 81 peuvent intriguer les amateurs d’horreur, la série manque clairement de cohérence pour être réussie. Adaptée du podcast éponyme et co-produite par James Wan, cette première saison ne tient pas toutes ses promesses avec un univers en quête d’identité et des situations presque risibles. On reste tout de même jusqu’au bout de ces huit épisodes grâce à une atmosphère étouffante et un casting efficace. En bref, Archive 81 est facilement binge-watchable mais tout aussi aisément oubliable.
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