Il est vrai que la majorité des séries policières se ressemblent : un meurtre tragique, une résolution parfois prévisible et quelques épisodes pour occuper nos dimanches pluvieux de flemme. Et puis, de temps en temps, une pépite émerge pour rejoindre le Panthéon des Cluedo du petit écran. Avec seulement sept épisodes, Mare of Easttown tutoie déjà les cieux, rejoignant des séries cultes comme Twin Peaks, Broadchurch ou True Detective.
Comme ses aînés, ce thriller, déjà disponible sur OCS et désormais sur Canal+, met en scène une localité en apparence parfaite. À Easttown, les secrets habitent tous les foyers et les fractures sociales sont visibles à chaque coin de rue. C’est dans cette ville qu’elle connaît depuis toujours que Mare, flic désabusée et cabossée par la vie, enquête sur la disparition de Katie et le meurtre d’Erin, deux adolescentes.
Petite communauté, grands problèmes
Bercée d’une lumière automnale, cette petite bourgade mélancolique et sans avenir de Pennsylvanie devient l’un des personnages principaux de la série. Ses habitants rêvent de la quitter, mais y reviennent toujours, par manque de moyens financiers ou d’attachement sentimental. La réalisation de Craig Zobel (The Leftovers) et la délicate musique de Lele Marchitelli (The New Pope) subliment leur quotidien morose, créant ainsi une identification immédiate à ces familles en quête d’une vie meilleure, les ados en tête. Tous plus mal dans leur peau les uns que les autres, ils sont enfermés dans ce trou paumé, cherchant à sortir la tête de l’eau par tous les moyens, même illégaux.
Comme toute série policière qui se respecte, Mare of Easttown évoque ainsi la délinquance, la consommation de drogue ou la prostitution. Bien sûr, certains événements sont rapidement expédiés et quelques résolutions cèdent à la facilité. Mais ces incohérences scénaristiques ne parviennent pas à entacher la justesse de l’ensemble : les rebondissements sont surprenants et le dénouement inattendu.
D’autant que l’enquête relativement classique de la série est toujours abordée sous l’angle de l’intime. Au terme de ces sept épisodes, chaque personnage a livré ses failles et ses faiblesses, tout en nuances. Il faut dire que ces protagonistes sont portés par un solide casting : Julianne Nicholson (Masters of Sex), Jean Smart (Legion), Sosie Bacon (13 Reasons Why) ou David Denman (The Office) livrent tous des performances poignantes, toujours à fleur de peau. Mention spéciale au jeune policier Evan Peters, longtemps enfermé dans ses rôles iconiques d’American Horror Story et de X-Men/Wandavision, qui trouve enfin un rôle à la hauteur de son talent dramatique.
Un personnage féminin loin des stéréotypes
Mais le véritable atout de Mare of Easttown, est celui de son titre : Mare, lieutenant de police le jour et mère meurtrie la nuit. Alors qu’elle tente toujours de se remettre d’un drame familial, la quarantenaire doit affronter deux enquêtes parallèles, tout en essayant de combler les attentes de ses proches. Mare est une femme blasée, directe, sans fards (littéralement), qui boit beaucoup, mange des gros burgers dans sa voiture et de la pizza froide, a besoin d’une pause clope de 10 minutes pour débuter sa journée et n’a pas de temps à perdre. Et lorsqu’elle se prépare pour un rencard, elle utilise les vieux tubes de rouge à lèvres qui traînent dans ses fonds de tiroirs.
Et ça fait un bien fou de voir ça à l’écran : des personnages féminins crédibles, ordinaires, qui ne collent pas aux clichés habituels. Mare est une femme d’abord antipathique, pour laquelle on ressent de plus en plus de compassion au fil des épisodes grâce à la prestation remarquable de Kate Winslet.
Kate Winslet, le phare d’Easttown
Dix ans après son rôle inoubliable dans Mildred Pierce, la fabuleuse actrice de Titanic et The Reader fait ici son grand retour à la télévision. Dans Mare of Easttown, elle retrouve d’ailleurs Guy Pearce (Memento), son partenaire de jeu de l’époque. La comédienne compose ici un rôle authentique, dans toute sa complexité, avec ses multiples fêlures personnelles. Elle impose ainsi Mare comme le phare mélancolique dans la nuit des habitants d’Easttown. Grâce à la force de cette interprétation, Kate Winslet a d’ailleurs obtenu un Emmy Award ainsi qu’un Golden Globes bien mérités.
Par le biais de la trajectoire personnelle de Mare, ce thriller parle magnifiquement de deuil, de doutes, de fragilités, de culpabilité et de la pression personnelle et professionnelle que l’on fait peser sur soi. Dans la deuxième moitié de la saison, les moments d’une grande intensité émotionnelle se succèdent et secouent jusqu’au spectateur le plus insensible.
En cette période politique et sanitaire toujours sombre, Mare of Easttown ne vous redonnera pas la banane, c’est certain. Mais elle peut tout de même mettre du baume au cœur des accidentés de la vie et accrocher les détectives en herbe en manque d’enquête à résoudre. Mare ne laissera personne indemne, on vous le garantit.
Le verdict
Mare of Easttown
Voir la ficheOn a aimé
- Kate Winslet, inoubliable
- Un personnage féminin loin des clichés
- Un casting très solide
- Une enquête captivante
On a moins aimé
- Quelques incohérences
- La fin de l’épisode 5
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