Une banlieue américaine colorée, de nouveaux voisins sympathiques, des plats de gratins à n’en plus finir, une voix off, un meurtre étrange… Non, je ne vous décris pas un remake de Desperate Housewives, mais bien l’ambiance de La Femme qui habitait en face de la fille à la fenêtre (ou The Woman in the House Across the Street from the Girl in the Window en VO). Derrière le titre le plus long du catalogue Netflix se cache huit épisodes aussi sombres que drôles.
Pour suivre l’intrigue, la série nous propose d’accompagner un personnage en apparence peu sympathique. Anna est une quarantenaire alcoolique, dont les verres sont remplis à ras-bord de vin. Elle passe ses journées dans son fauteuil, à observer la petite famille qui a récemment élu domicile dans la maison d’en face. Jusqu’au jour où elle est persuadée d’avoir été témoin d’un meurtre…
Mille degrés d’interprétation
Toute la série repose sur la confiance que l’on donne, ou non, à cette femme brisée par un drame familial. Cet assassinat est-il la simple et effrayante réalité ou plutôt le fruit de son imagination, alimentée par des effluves alcoolisées et un cocktail détonnant de médicaments ? Peu fiable, Anna décide pourtant de mener l’enquête de son côté, pour en avoir le cœur net. Elle nous embarque avec elle dans une intrigue faite de règlements de compte, d’arnaques, de tueurs en série et de morts mystérieuses.
Mais l’on comprend rapidement que tout ne tourne pas rond et que la série possède mille degrés d’interprétation. On peut tout à fait savourer ce thriller en huit épisodes comme les petits détectives en herbe que nous sommes, ou bien le voir comme une satire non dissimulée du genre. Avec La Femme qui habitait en face de la fille à la fenêtre, on peut cocher toutes les cases d’un bingo « Les pires clichés des intrigues policières ».
Tout est fait pour que le spectateur ne croit pas à l’histoire : certains détails se répètent à l’infini, ou au contraire sont modifiés d’une scène à l’autre. Une sorte de jeu des sept différences sarcastique comme pour souligner leur aspect factice. Sans parler des livres lus par l’héroïne, comme The Woman Across the Lake, qui rappelle avec malice tous les récits du genre, autant que le titre de la série elle-même. Tous les codes des romans de gare sont réunis, pour mieux les détourner.
Le retour de Veronica Shellstrop
Cette atmosphère surréaliste donne à la mini-série un ton singulier et très original, rarement vu à la télévision. L’humour et l’ironie ne sont distillés que par petites touches, laissant planer le doute. Des échelles de plans aux couleurs des décors, la mise en scène nous plonge dans un univers entre le rêve et la réalité, entre la satire et le macabre. Un étrange mélange qui alimentera parfaitement les théories les plus folles de fans en quête de réponses.
Même le casting, excellent, nous donne des indices sur le ton comique et méta de la série, jusqu’aux plus petits rôles : Cameron Britton (le glaçant Ed Kemper dans Mindhunter), Marc Evan Jackson (le démoniaque Shawn de The Good Place), Jim Rash (le doyen excentrique de Community)… La grande Glenn Close (Damages) fait même une petite apparition surprise, avec toute l’élégance qui la caractérise.
Et comment oublier la fabuleuse Kristen Bell, qui incarne Anna avec un plaisir non dissimulé. Avec ce personnage égoïste et aux défauts flagrants, impossible de ne pas penser à son interprétation inoubliable d’Eleanor Shellstrop dans The Good Place. Quant à l’ambiance caustique, fun et glauque à la fois de la série, elle rappelle évidemment celle de Veronica Mars. L’ombre de l’ado futée de Neptune, qui a lancé la carrière de Kristen Bell, plane sans aucun doute sur cette nouvelle série plutôt réussie.
Absurde mais savoureux
Mais on vous aura prévenu : tout est grotesque dans La Femme qui habitait en face de la fille à la fenêtre. La série s’auto-parodie en permanence et pousse tous les curseurs au maximum. Le meurtre ? Découvert dans les bois par un chien, évidemment. Le gardien de phare ? Taciturne et doté d’un béret de marin, voyons. L’arnaqueur soupçonné du meurtre ? Un strip-teaseur gentil et beau gosse qui fait des omelettes le matin, avec le sourire irrésistible qui va avec.
L’intrigue farfelue de la série culmine naturellement dans le dernier épisode, encore plus loufoque que les précédents. Pourtant, on se prend facilement au jeu. Avec huit chapitres de 30 minutes chacun, cette tragi-comédie se consume en un week-end (ou même une soirée, avec un peu de détermination). Elle laisse derrière elle une impression singulière, qui pourrait bien rester un moment dans nos mémoires de sériephiles.
La Femme qui habitait en face de la fille à la fenêtre ne plaira vraiment pas à tout le monde, mais elle en fera au moins rire certains et donnera la satisfaction d’un bon polar aux autres.
Le verdict
La Femme qui habitait en face de la fille à la fenêtre
Voir la ficheOn a aimé
- Kristen Bell, toujours incroyable
- L’atmosphère originale
- Les multiples références aux thrillers
On a moins aimé
- L’épisode final
Amateurs de polars et de comédies tranchantes, cette série est faite pour vous ! La Femme qui habitait en face de la fille à la fenêtre est une petite pépite sarcastique, qui se binge-watche aussi facilement que l’on dévore ses chocolats de Noël. C’est parfois lourd, un brin écœurant, mais ça reste délicieux. Dans ce thriller, Anna est persuadée que sa voisine a été assassinée mais personne ne la croit. A-t-elle halluciné, à force de boire du vin toute la sainte journée, ou un complot se cache-t-il là-dessous ? La mini-série en huit épisodes est portée par le talent de Kristen Bell, déjà impeccable dans Veronica Mars et The Good Place, et qui trouve à nouveau un rôle à la hauteur de ses penchants comiques. Si l’absurde ne vous fait pas peur, vous devriez accrocher, comme nous, à cette parodie savoureuse des enquêtes policières, parfois un peu ratées.
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