En salles ce 16 février 2022, l’adaptation d’Uncharted déçoit. Ce n’est pas à cause du casting, qui fait de son mieux, avec notamment Tom Holland et Tati Gabrielle. Mais c’est la faute à une absence quasi totale d’écriture émotionnelle, à l’absence de crédibilité, et à l’absence de… de la gravité sur Terre.

Tenez-vous bien : l’adaptation d’Uncharted est un film de fantasy. Oui car, sinon, comment expliquer qu’il soit possible de courir sur des caisses en basse atmosphère, de s’asseoir paisiblement sur une voiture en chute libre, de presque faire voler des carcasses de bateau dans les airs ? Ou alors Uncharted est un spin-off de Spider-Man, car Tom Holland a, semble-t-il, conservé ses pouvoirs. Autrement, il n’aurait probablement pas survécu aux deux tiers de ses blessures.

En tant qu’adaptation, au cinéma ce mercredi 16 février 2022, Uncharted est malheureusement décevante. Non que le film ne soit pas divertissant, fort d’un casting par ailleurs excellent. Mais la comparaison est douloureuse à chaque instant : les jeux vidéos de Naughty Dog sont mieux réalisés et mieux écrits que le long-métrage. L’adaptation passe totalement à côté du potentiel qui lui était fourni.

RIP la physique

L’erreur initiale d’Uncharted est probablement d’avoir annihilé toute crédibilité à sa mise en scène. La physique y est inexistante. Et ce n’est même pas que certaines scènes sont simplement « spectaculaires » : elles sont tout bonnement impossibles. Ce n’est pourtant pas un film de fantasy et le réalisme doit nous aider à rester ancrer au récit. Le manque de crédibilité atteint cependant un niveau tel que les enjeux perdent quelque peu en saveur. À commencer par les enjeux humains.

C'est Nathan Drake ou Spider-Man au juste ? Cette scène n'a aucun sens dans un film d'exploration. // Source : Sony
C’est Nathan Drake ou Spider-Man au juste ? Cette scène n’a aucun sens dans un film d’exploration. // Source : Sony

Les deux derniers opus vidéoludiques d’UnchartedA Thief’s End et The Lost Legacy — avaient poussé la cinématographie assez loin. Quand on aime l’exploration, les vieux objets, l’histoire, l’archéologie, il s’agissait d’un cocktail parfait. Il y avait des rebondissements, de l’action, un scénario simple qui restait bien ficelé, mais aussi des moments calmes où l’émotion prenait plus de place en livrant des séquences touchantes.

Ces jeux avaient d’emblée une dimension cinématographique venant englober l’interactivité, une démarche assez typique du studio Naughty Dog. L’adaptation aurait pu développer cela. Le jeu, par exemple, implique de tuer : le film aurait pu humaniser les personnages en ne les transformant pas en tueurs. C’est raté, Nathan Drake et les autres déciment à tour de bras sans aucun état d’âme (cependant Nathan dit « désolé » à un homme avant de le jeter dans le vide, brave garçon). Mais l’adaptation ne passe pas seulement à côté de l’opportunité de faire mieux, elle fait moins bien. Les jeux sont mieux écrits, mieux réalisés, et laissent une empreinte émotionnelle incommensurablement plus élevée à la fin. En bref, le constat est rude : le jeu est plus cinématographique que le film.

Le casting sauve le film

Tout n’est pas raté dans Uncharted. La photographie lui confère une beauté indéniable. On est servi en spectacle visuel. Le film bénéficie aussi d’un casting excellent, qui nous aide tant bien que mal à nous amuser. Les acteurs et actrices livrent tous et toutes, presque sans exception, une performance impeccable. C’est assez remarquable : parvenir à interpréter avec des couleurs des personnes qui ont été écrits sans couleurs. Le casting sauve littéralement le film de sa fadeur.

Tom Holland confirme son charme à toute épreuve : il sait autant nous faire rire que susciter de la compassion. Tati Gabrielle, de son côté, se révèle assez hypnotisante en « grande méchante ». Clairement, on espère la revoir bientôt au cinéma dans des rôles de composition plus développés, car le potentiel de l’actrice est palpable. On regrettera que le personnage de Chloe Frazer soit quelque peu gâché, là encore, par une écriture trop vide, mais Sophia Ali parvient à donner du relief à son personnage, ce qui, là encore, n’était pas simple.

Tati Gabrielle dans Uncharted. // Source : Sony/Playstation/Columbia
Tati Gabrielle dans Uncharted. // Source : Sony/Playstation/Columbia

Si vous allez voir Uncharted en salles, ne vous attendez pas à un grand moment de cinéma. Il sera plaisant de voir de bons acteurs et de bonnes actrices, et de beaux décors. Mais ce n’est pas ce film qui changera ce qui semble être pour l’instant la malédiction des adaptations de jeux vidéo : la crainte de s’émanciper mélangée à la nécessité de rester fidèle provoque un entre-deux ingérable pour les scénaristes et réalisateurs, brisant toute créativité et empêchant au long-métrage de trouver une expression artistique convaincante. Résultat, on est juste pressé de pouvoir jouer à un Uncharted 5.

Le verdict

En sortant de la salle, le constat est rude : le film Uncharted est moins cinématographique que les jeux Uncharted. Le scénario est télescopé et ne laisse aucune empreinte émotionnelle. La mise en scène a totalement oublié la moindre once de crédibilité, à des niveaux vraiment trop stratosphériques (même en faisant appel à notre imaginaire, le manque de réalisme finit par déconnecter des enjeux humains).

Seul le casting réhausse l’ensemble, en livrant d’excellentes performances, et même avec quelques révélations, en particulier Tati Gabrielle que l’on aimerait revoir. Nous n’avons pas la moindre envie d’une suite — malgré la scène post-générique — mais plutôt de rejouer aux jeux ou d’espérer Uncharted 5.

En bref, le film Uncharted est une déception, alors que l’on pouvait enfin oser croire en une adaptation réussie étant donné le potentiel des jeux. Vous ne passerez pas un mauvais moment, le spectacle est là, le casting est au rendez-vous, mais le long-métrage est aussitôt vu aussitôt oublié.

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