Comment définir The Dropout, la série de Disney+ sur l’arnaqueuse Elisabeth Holmes, disponible ce mercredi 20 avril 2022 ? Peut-être ainsi : « Do or do not. There is no try. » Les fans de Star Wars auront évidemment reconnu les sages paroles de Yoda. Mais cette citation n’a pas inspiré que des petits Padawan en herbe : elle a également motivé la jeune milliardaire Elizabeth Holmes, au point de la placarder sur les murs de son entreprise à succès, Theranos.
Qui était Elizabeth Holmes ?
Retour en 2003, avec ses téléphones à clapets et la voix de Dido sur toutes les radios. La future entrepreneuse vient d’entrer à l’université de Stanford, pour étudier la biologie et la médecine, avec l’ambition de devenir la prochaine Steve Jobs.
Un an plus tard, à seulement 19 ans, elle imagine une machine capable de diagnostiquer n’importe quelle maladie. Pas d’aiguille ni d’analyses sanguines complexes : une seule goutte de sang et le tour est joué. Une innovation qui mènera à la grandeur et la décadence d’un empire supposé être révolutionnaire : Theranos. Avec cette entreprise aux appareils qui n’ont jamais fonctionné, Elizabeth Holmes a berné de nombreux investisseurs, des journalistes, mais aussi de nombreux médecins, pendant près de 15 ans.
Vous reprendrez bien un peu d’arnaqueurs ?
Avec une histoire aussi improbable et un personnage aussi charismatique qu’Elizabeth Holmes, il n’y a rien d’étonnant à ce que la fiction s’en empare. Basée sur le podcast éponyme d’ABC Audio, The Dropout est produit par Disney+. Mais la mini-série n’est malheureusement pas la première à décortiquer les succès et les échecs des escrocs du 21ème siècle.
En seulement quelques mois, le petit écran a déjà développé les aventures extraordinaires de l’arnaqueuse Anna Delvey dans Inventing Anna sur Netflix, ou celles du couple Neumann, à l’origine de la start-up WeWork, avec WeCrashed sur Apple TV+. Situées dans la même période que The Dropout, au début des années 2000 et 2010, ces deux séries racontaient déjà avec plus ou moins de succès le fonctionnement impitoyable du capitalisme ou les rouages du monde de la tech.
The Dropout arrive donc au moment même où nous commençons à nous lasser de ces problèmes de riches. La figure féminine féroce, les mensonges à répétition, les investisseurs crédules, la chute spectaculaire lorsque la supercherie est découverte, les ambitions débordantes des entrepreneurs… Tous les ingrédients sont réunis pour nous servir la même sauce, encore et encore.
La queen Amanda Seyfried
Pourtant, la mini-série de Disney+ parvient à tirer son épingle du jeu. Bien sûr, elle est loin d’être originale et ne s’éloigne pas radicalement des codes du genre. Mais son rythme effréné et sa capacité à dépeindre des personnages froids et calculateurs avec empathie, finit tout de même par attirer notre attention.
Elizabeth Meriwether, qui était déjà aux manettes de la sitcom New Girl, développe ici ses qualités dramatiques à la création de ces huit épisodes captivants. La réalisation est sobre, plutôt conventionnelle, mais la maîtrise est suffisante d’un point de vue narratif pour que l’on reste scotchés devant notre écran tout au long de la mini-série.
Il faut dire que The Dropout bénéficie d’une galerie de personnages fascinants et de merveilleux acteurs pour les incarner. Naveen Andrews (Lost), Stephen Fry (The Hobbit), William H. Macy (Shameless) ou Kate Burton (Grey’s Anatomy) se donnent ainsi la réplique dans une distribution de très haut niveau. Avec ces interprétations convaincantes, chaque protagoniste prend l’ampleur nécessaire pour nous émouvoir ou nous révulser, comme dans le bouleversant cinquième épisode.
À la tête de ce brillant casting, se trouve la formidable Amanda Seyfried, vue récemment dans Mank de David Fincher ou Twin Peaks : The Return. Avec le rôle d’Elizabeth Holmes, la comédienne confirme le tournant dramatique de sa carrière avec brio, après des années de comédies. L’actrice est tout simplement bluffante, reproduisant les mimiques de l’entrepreneuse avec une similarité déconcertante. Le travail sur sa voix, qui évolue au fil est épisodes, est notamment très impressionnant. Elle donne à l’arnaqueuse sans cœur suffisamment de fêlures et de duplicité pour que l’empathie pointe même le bout de son nez.
Des airs de The Social Network
En multipliant les allers-retours entre les prémisses de Theranos et les déclarations de justice données par Elizabeth Holmes en 2017, alors que son empire commence à s’effondrer, The Dropout mise avec malice sur la transformation spectaculaire de cette étudiante à l’ambition dévorante, en entrepreneuse stratège qui valait 9 milliards de dollars.
Un portrait peu flatteur, mais qui permet à la mini-série d’aborder finement les injonctions sexistes dans la tech, l’entreprenariat, les finances, l’université, bref, dans le monde en général. La narration prend également le temps de s’attarder sur la relation amoureuse toxique entre Elizabeth Holmes et Sunny Balwani, avec qui elle faisait également équipe en affaires. Si le propos est peu original, il mérite tout de même d’être rappelé, pour montrer que le patriarcat empoisonne tous les milieux sociaux, sans exception.
The Dropout est loin d’être une série parfaite, souffrant de longueurs et d’un classicisme parfois ennuyeux. Mais cette chronique technologique rappelle les grandes heures du film The Social Network avec bonheur.
Le verdict
The Dropout
Voir la ficheOn a aimé
- Amanda Seyfried mérite une pluie de récompenses
- Le propos nécessaire sur le sexisme et les relations toxiques
- Une galerie de personnages aussi attachants que déplorables
On a moins aimé
- Une réalisation plan-plan
- Un manque d’originalité
- Une énième série sur les arnaqueurs de la tech
En 2003, Elizabeth Holmes dévoilait son idée révolutionnaire : une goutte de sang pour des milliers de diagnostics possibles, grâce à un appareil médical à la pointe de la technologie. Près de 15 ans plus tard, l’entrepreneuse devenait l’une des plus jeunes milliardaires au monde, avant de connaître un effondrement spectaculaire. Jugée coupable de fraude en janvier dernier, Elizabeth Holmes passionne aujourd’hui les foules dans The Dropout, sur Disney+. La mini-série dresse son portrait avec délicatesse et nous permet de mieux comprendre l’une des plus grandes fraudes du 21ème siècle. Les huit épisodes ne révolutionnent pas le genre et manquent cruellement de piquant, mais ils valent tout de même le détour pour la performance hallucinante d’Amanda Seyfried (Mank).
Et si vous préférez le ton satirique d’Adam McKay (Vice, Don’t Look Up), sachez qu’il prépare également sa propre version de l’histoire : le film Bad Blood devrait bientôt sortir sur Apple TV+, avec Jennifer Lawrence (Hunger Games) dans le rôle de l’escroc en or.
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