En 2017, Alice Oseman publiait le premier tome de son roman graphique Heartstopper. D’abord conçue comme un webtoon, une bande-dessinée à lire sur Internet, cette fiction a réuni une grande communauté de fans virtuels avant d’être couronnée de succès en librairie. Depuis, difficile de passer à côté de cette saga en quatre volets, adaptée le mois dernier en série sur Netflix.
Heartstopper met en scène la romance entre deux garçons anglais. Charlie, musicien introverti un brin geek, rencontre ainsi Nick, joueur de rugby très populaire. L’un est gay et a été harcelé après avoir subi un coming-out forcé quelques mois plus tôt. L’autre se pense hétéro, mais a en réalité peu questionné sa sexualité. Ensemble, ils vont entamer une histoire d’amour si mignonne qu’il est impossible de ne pas craquer pour leur merveilleuse romance.
Dans le Panthéon des séries queers
Grâce à une atmosphère aérienne et des couleurs pastels, Heartstopper développe un univers sucré et délicat, bercé par une bande originale pop à souhait. La réalisation rend même régulièrement hommage au format dessiné d’origine, en insérant de jolies transitions animées. Du côté du casting, Joe Locke (Charlie) et Kit Connor (Nick) composent de magnifiques personnages, aux émotions à fleur de peau.
Heartstopper fait ainsi souffler un vent de fraîcheur longtemps attendu sur la grande famille des personnages queers. Elle entre même directement dans le Panthéon des meilleures séries du genre. Il faut dire que les romances gays et lesbiennes ont rarement droit à leur happy end. De Buffy contre les Vampires à The 100 en passant par How to Get Away with Murder ou Looking, les drames, les amants toxiques et le mal-être sont bien plus souvent explorés que des relations épanouies. Seules des séries comme Sense 8 faisaient, jusque-là, exception à la règle.
Une narration d’une grande douceur
Avec son esthétique cosy et ses thématiques importantes sans être pesantes, il faut avouer que Heartstopper fait un bien fou au moral et à la représentation LGBTQIA+. Bien sûr, on parle de coming-out, de harcèlement, de transition de genre ou d’homophobie intériorisée. Mais ces sujets sont abordés au milieu de tant d’autres et, surtout, ils ne définissent pas les personnages de la série.
Nick et Charlie ont une grande galerie de qualités, de défauts ou de centres d’intérêt, et s’épanouissent dans de nombreux aspects de leur vie. À leurs côtés, d’autres personnages sont, eux aussi, développés à leur juste valeur. On rencontre ainsi Tao, cinéphile blasé, Isaac, passionné de littérature, Elle, qui change de lycée après sa transition ou Tara et Darcy, un couple solide et joyeux.
Un parti pris d’une grande douceur qui détonne avec le reste des productions du genre. Mais les huit épisodes de cette première saison ne se contentent pas de casser les codes de la fiction queer. Ils s’attachent également à offrir une représentation plus diversifiée de l’adolescence dans son ensemble.
Enfin des ados introvertis et gentils
Euphoria, Skins, Genera+ion, Sex Education… Les séries pour adolescents incarnent régulièrement cette période charnière à grands renforts de sexe, drogue et rock’n’roll. Heartstopper prend le contre-pied de ces récits de gueule de bois et de spleen mélancolique, pour proposer des personnages attachants, enjoués et plutôt sages. Milkshakes, soirées cinéma, fanfare du lycée et parties de bowling forment ainsi le quotidien de Nick, Charlie et leur bande. Mais c’est ça qui fait tout le charme de la série, comme l’a notamment souligné The Guardian il y a quelques semaines.
Si les ados rebelles et populaires ont connu des décennies de représentation sur le petit écran, les teenagers timides, fans de Donnie Darko, de Naruto ou de pratiques artistiques en tout genre, ont rarement eu leur heure de gloire. La comédie musicale survoltée Glee avait commencé à changer la donne au début des années 2000, mais depuis, Euphoria avait signé le grand retour de la débauche adolescente.
Heartstopper offre enfin une représentation digne de ce nom à tous les laissés pour compte, sans jamais les traiter comme des victimes, comme c’est le cas habituellement. Au contraire, ces personnages sont forts, intéressants et complexes.
Heartstopper ressemble bien plus à notre adolescence qu’Euphoria
On pourrait peut-être se dire que cette narration élude la réalité de la débauche adolescente pour s’axer sur des protagonistes prudes et beaucoup trop gentils pour être vrais. Il faudra sûrement attendre la prochaine saison, qui devrait couvrir les tomes 3 et 4 du roman graphique, pour voir apparaître des thématiques plus graves, notamment autour de la santé mentale. Mais Heartstopper a ceci d’unique qu’elle trouve toujours la légèreté, même dans les moments les plus difficiles.
Et, à vrai dire, la série ressemble davantage à l’adolescence de beaucoup d’entre nous, que n’importe quel épisode d’Euphoria. Il est si agréable de pouvoir enfin s’identifier à des vécus bienveillants, tendres, mais réalistes sur les tourments de cette époque complexe.
Au même titre que Sex Education avant elle, la série anglaise apporte sa pierre à l’édifice d’une meilleure représentation, plus juste et diversifiée. Heartstopper rend aux ados gays et introvertis la coolitude qu’ils méritent, et c’est pour ça qu’on l’aime.
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