Il faut savoir dans quoi on se lance avec Vampire: The Masquerade – Swansong, plongée lente et exigeante dans l’univers d’un jeu de rôle créé par Mark Rein-Hagen et publié en 1991. En termes de narration, le RPG de Big Bad Wolf Studio est d’une densité inouïe, susceptible d’assommer les moins avertis, les mêmes qui pensaient découvrir un simple jeu d’action dans la peau d’un vampire (un argument qui se tient). Vampire: The Masquerade – Swansong relève plutôt de l’épreuve, capable d’agacer par ses nombreux errements et d’enthousiasmer par la profondeur de son récit.
En toute franchise, Vampire: The Masquerade – Swansong serait sans aucun doute une référence des jeux narratifs si les finitions étaient à la hauteur des ambitions du studio. Hélas, Big Bad Wolf Studio donne trop souvent l’impression de s’être perdu dans un développement difficile à assumer, jusqu’à faire errer la joueuse ou le joueur dans un labyrinthe tout à la fois fascinant et éreintant. Malgré tout, Vampire: The Masquerade – Swansong parvient à être suffisamment envoûtant pour qu’on s’y accroche, comme des crocs dans une jugulaire.
Trois aventures en une seule
Disponibilité
Vampire: The Masquerade – Swansong est disponible depuis le 18 mai sur PS4, PS5, Xbox One, Xbox Series S, Xbox Series X et PC.
Le code rouge a été déclenché, signifiant qu’il y a péril au sein du clan de la Camarilla, à Boston. Le prince Hazel Iversen demande alors à trois sujets — Emen, Leysha et Galeb — d’endiguer rapidement la crise au risque d’ébranler toute une institution, sous fond de chasse des vampires. Lutte de pouvoir, trahison, corruption, complot, politique… Toutes les thématiques du genre y passent, accouchant d’une vaste affaire au casting immense, quoiqu’un peu trop éparpillé. Les développeurs puisent volontiers dans le lore de Vampire: The Masquerade, ce qui plaira aux puristes au risque de mettre un peu de côté les néophytes (qui devront lire toutes les informations distillées au fur et à mesure).
Se plonger dans Vampire: The Masquerade – Swansong, c’est accepter de passer de longs moments à écouter et à lire — un peu moins à jouer. Quand on n’est pas assommé par un scénario aux arcs touffus, on participe à de longues phases d’investigation. On incarne à tour de rôle les trois sous-fifres du Prince, tous dotés de pouvoirs qui ajoutent une dose de surnaturel aux enquêtes. On pourra par exemple envoûter quelqu’un pour lui soutirer des indices, prendre l’apparence d’un ennemi pour se faufiler plus facilement ou se téléporter vers des zones a priori inaccessibles. Dans l’esprit, il fait beaucoup penser aux Life is Strange, dont les héros disposent aussi de pouvoirs pour avancer.
Emen, Leysha et Galeb disposent en outre d’une personnalité qui leur est propre, chacun avec leurs doutes, leur passé et leurs tourments. Il faut souligner à ce sujet l’incroyable travail d’écriture, qui laisse apprécier différents niveaux de lecture quant à la place du trio sur l’échiquier. Leysha, plus particulièrement, crève l’écran avec ses troubles qui gangrènent son aventure personnelle. En prenant le temps de faire évoluer psychologiquement ses personnages, Vampire: The Masquerade – Swansong évite d’en faire de vulgaires pions sans aucune âme.
Des finitions qui font pester
Bien trop occupé à raconter une histoire, Vampire: The Masquerade – Swansong délaisse totalement la partie action — alors qu’on joue des vampires très puissants. Les traditionnels combats sont en réalité remplacés par des joutes verbales, où il faut choisir les bonnes phrases pour triompher, au moyen de deux jauges limitées (dont une qui peut être remplie en se nourrissant de sang). À ce sujet, Big Bad Wolf Studio aurait pu se montrer un peu moins opaque. Certaines réactions ne sont accessibles que si l’on dispose de suffisamment de points dans la caractéristique ad hoc.
Or il est difficile d’anticiper, d’autant que la progression est hyper lente et ne permet jamais de se sentir à l’aise avec cette mécanique de gameplay. Les options sont trop nombreuses, entre le piratage, les compétences verbales et les pouvoirs de persuasion, et on n’évolue pas assez pour être polyvalent. Il faut dès lors faire des concessions, et renoncer à être en mesure de tout faire. D’aucuns diraient qu’il s’agit d’un moyen de gonfler la durée de vie, en offrant la possibilité d’explorer chaque chapitre sous des prismes différents. C’est vrai, mais on aimerait quand même sentir une vraie évolution à chaque heure passée.
Notons d’ailleurs que la notion de choix est primordiale dans Vampire: The Masquerade – Swansong. À plusieurs moments, nos actes et nos décisions influencent le déroulé de l’aventure, avec des conséquences négatives ou positives — ou plus superfétatoires (un simple chemin annexe). On pourra gagner un trait de caractère intéressant ou, a contrario, susceptible de devenir une tare. Pour bien s’en sortir, il vaut mieux prendre le temps de peser le pour et le contre, après avoir pris soin de fouiller les décors. Les à-côtés sont nombreux dans Vampire: The Masquerade – Swansong, quand on accepte de quitter le fil conducteur. Les occasions manquées également.
Le RPG narratif a donc des arguments solides à faire valoir, dans sa manière de raconter, de jouer avec la temporalité, de pousser ses héros dans leurs retranchements ou encore de s’appuyer sur des énigmes ni trop dures ni trop simples. Malheureusement, il les noie dans une forme assez indigne. Visuellement, Vampire: The Masquerade – Swansong souffle le chaud et le froid, entre sa direction artistique parfois inspirée, ses graphismes trop souvent grossiers (on y a joué sur PS5) et ses animations très rigides.
À ces défauts esthétiques, s’ajoutent des bugs bien plus gênants, qui bloquent la partie et forcent à la redémarrer. On pâtit en outre d’un manque de lisibilité, dans ce qu’il faut faire et dans ce qu’on voit. À tel point que vous pourriez perdre plusieurs minutes à enchaîner les va-et-vient, simplement parce qu’une minuscule clé posée sur un bureau vous aurait échappé. Pour apprécier Vampire: The Masquerade – Swansong, il faut vraiment s’accrocher.
Le verdict
Vampire: The Masquerade – Swansong
Voir la ficheOn a aimé
- Écriture généreuse
- Trois personnages intéressants
- L’univers Vampire: The Masquerade
On a moins aimé
- Mécaniques de gameplay un peu opaques
- Progression trop lente
- Finitions à revoir
La marche n’était-elle pas un peu trop haute pour Big Bad Wolf Studio ? Très certainement. Car si Vampire: The Masquerade – Swansong ne manque pas d’atouts et d’arguments pour séduire, force est de constater qu’il est freiné par des finitions indignes de ses ambitions. C’est dommage, et il est nécessaire de s’accrocher pour se plonger dans un univers fascinant, dense et bien raconté.
C’est quand il faut appuyer sur les touches d’une manette que Vampire: The Masquerade – Swansong affiche de sérieuses limites, jusqu’à agacer. On préférera retenir ses dialogues, ses cinématiques et ses longs textes, tous participant à une adaptation un peu assommante d’un jeu de rôle culte (Vampire: The Mascarade). Pas inintéressant, mais très rebutant.
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