« L’avenir est à nos portes. Et il se fera sans vous », assène Ed Harris à Tom Cruise, comme pour rappeler l’inéluctable. À bientôt 60 ans, l’acteur phare repousse toujours plus loin les limites du possible, retardant film après film, performance après performance, l’échéance. Renfiler le costume de Maverick, pilote de chasse casse-cou et arrogant, pour Top Gun: Maverick, n’est qu’un symbole. Mais au-delà du trip égocentrique se cache un blockbuster magistral, porté par une authenticité audacieuse et une sincérité remarquable.
Surtout, Top Gun: Maverick réussit un pari assez fou : transformer ce qui n’était qu’un plaisir coupable pour ado qui rêvaient de séduire sur Take My Breath Way, après avoir enfourché une moto cheveux au vent. Il part pourtant d’un enjeu simpliste, mais qui touche à l’intime : le pardon et toute la rancœur qui y est liée. Au-delà des F18 qui ne font qu’atterrir et décoller dans un ballet aérien ahurissant, il y a l’histoire d’un héros qui a évolué. D’un acteur, aussi.
Top Gun: Maverick est une suite magistrale
Il faut se souvenir de ce qu’était Top Gun à sa sortie en 1986, à savoir d’abord un film pour garçons qui aspiraient à devenir des hommes. Où des pilotes de chasse sexy arborent leur corps d’éphèbe et portent des 501 moulants le temps d’un match de beach-volley. Soit l’hyper virilité dans ce qu’elle a de plus cliché et, sans doute aussi, de plus abject. Il n’empêche, beaucoup de quarantenaires, voire de trentenaires, se sont vus en Maverick, héros désinvolte dénué de super-pouvoirs, incarné par un Tom Cruise qui, a l’époque, n’était surtout connu que pour son apparence. Depuis, l’acteur est devenu une machine hollywoodienne, un faiseur de (grand) spectacles, nanti d’une carrière parsemée de (vrais) moments de bravoure.
Alors, bien sûr, ce Top Gun: Maverick n’est parfois rien d’autre qu’un moyen de rappeler à tout le monde que Tom Cruise est encore dans le coup, la star réalisant elle-même ses cascades, comme s’il fallait compenser. Mais il accepte aussi de briser le sourire Oral B, voire de partager un peu la couverture avec la new generation (Glen Powell et Milles Teller pour ne citer qu’eux). Top Gun: Maverick est un film d’exploits justifiés par l’impossibilité de faire le deuil d’un père tué en plein vol (Goose) ou la nécessité de rendre hommage à une figure qui paraissait invincible (Iceman, devenu aphone, comme Val Kilmer). Peu importe ce qui se passe à l’écran, l’action renvoie à l’émotion.
Top Gun: Maverick parvient donc à tirer le maximum d’un récit d’une mission en apparence impossible, que doit chapeauter un héros en apparence has-been. Il aurait pu tomber dans la facilité, enchaînant les références grasses, ce que le blockbuster s’applique à faire dès l’apparition des étoiles de Paramount, puis quand Danger Zone retentit. On entre alors dans Top Gun: Maverick avec le sentiment d’être en terrain connu, comme revenu à une autre époque. Mais on en ressort avec l’impression d’avoir pris on ne sait combien de G. C’est presque un contre-pied : au ton à limite du ridicule de son prédécesseur, il répond avec un sens affirmé pour le grand cinéma. Celui qui transporte, fait sourire et fend le cœur. Et, bien sûr, en met plein les yeux.
Des séquences aériennes ahurissantes
En plus d’un fond qui étonne par sa justesse, en dépit de quelques longueurs et facilités (oui, Tom Cruise Maverick se relève toujours et a le beau rôle), Top Gun: Maverick reste un film avec des avions. Et il faut souligner l’incroyable réalisation de Joseph Kosinski qui, avec ses équipes, orchestre des séquences aériennes de haute voltige, au sens propre comme au figuré. En extérieur, les trajectoires serrées sont élégamment appuyées par des plans parfaits, accentuant la notion de danger et faisant honneur au métier de pilote de chasse. Dans le cockpit, la mise en scène façon selfie témoigne de l’implication presque invraisemblable du casting.
Cette recherche de l’authenticité à tout prix, imposée par Tom Cruise, est une ode au cinéma qui détruit le factice et les effets spéciaux pour faire illusion. Il finit par s’inscrire dans une forme de cinéma à l’ancienne, pour mieux faire écho au Top Gun de 1986. Il y cette volonté incontestable de rester dans le traditionnel, pour plaire aux fans et en donner pour leur argent aux autres. À chaque F18 qui quitte le sol, on prend uppercut sur uppercut. Puis, à la redescente, sans parachute, on est simplement ravi de voir Maverick renaître de ses cendres, lui qui passe son temps à se brûler les ailes. On n’oserait presque écrire que Top Gun: Maverick peut vous emmener au septième ciel — mais c’est tout comme.
Le verdict
Top Gun: Maverick
Voir la ficheOn a aimé
- Tom Cruise, au top de sa forme
- Bien plus qu’un nouveau plaisir coupable
- Les séquences aériennes
On a moins aimé
- Il faut aimer Tom Cruise
- Il faut aimer les avions
- Où est passée la chanson Take My Breath Away ?
Top Gun: Maverick s’impose comme la suite qu’on n’espérait pas. Au-delà du trip égocentrique de Tom Cruise, l’homme toujours plus d’Hollywood, et du festival aérien ahurissant, il y a un film bien ficelé. Il se nourrit de morceaux de bravoure, qu’il entrecoupe de moments touchant davantage à l’intime de héros du passé, jamais vraiment prêts à raccrocher.
Loin de l’hommage simpliste gorgé de fan service, Top Gun: Maverick fait du spectacle une nécessité et, par ricochet une force. C’est du très grand cinéma, porté par un casting vraiment impliqué (Tom Cruise, mais pas que) et une réalisation de très haut vol.
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