Les exoplanètes potentiellement habitables ne sont pas forcément similaires à la Terre. Une nouvelle étude imagine des planètes habitables avec une atmosphère complètement différente et appelle à garder l’esprit ouvert pour détecter une vie extraterrestre.

Quelque part dans l’Univers, voire dans notre galaxie, se trouve peut-être une planète semblable à la Terre, qui possède de l’eau liquide à sa surface, une atmosphère riche en diazote, un climat tempéré, et pourquoi pas des êtres vivants apparus grâce à la chimie du carbone.

Ou alors, peut-être que la vie a trouvé un autre chemin pour apparaître sur des astres absolument différents de tout ce que nous connaissons. Une étude parue dans Nature Astronomy le 27 juin 2022 décrit un de ces mondes imaginables. Les auteurs se sont demandé si des planètes à l’atmosphère radicalement différente de celle de la Terre pouvaient tout de même abriter de l’eau liquide, et donc, être habitables. « Nous avons découvert que ces planètes avec une atmosphère riche en hydrogène et en hélium pouvaient, sous certaines conditions, conserver une eau liquide à leur surface pendant des milliards, voire même des dizaines de milliards d’années », raconte à Numerama la principale autrice, Marit Mol Lous.

Le système planétaire TRAPPIST-1. // Source : Flickr/CC/ESO/M. Kornmesser
Le système planétaire TRAPPIST-1. // Source : Flickr/CC/ESO/M. Kornmesser

La chercheuse de l’Université de Berne s’est intéressée à ces planètes qui possèdent une atmosphère dite primordiale, celle qui se forme en même temps que les planètes. Pour la Terre, cette atmosphère, constituée des éléments les plus légers comme l’hydrogène ou l’hélium, s’est rapidement estompée, balayée par les vents solaires, avant d’être remplacée par un air riche en éléments plus lourds : le diazote et le dioxygène.

La vie sous l’atmosphère primordiale

Pourtant, la théorie prévoit l’existence de planètes qui auraient pu conserver cette atmosphère primordiale. Il s’agirait de planètes rocheuses assez grosses, plus que la Terre, et qui seraient suffisamment loin de leur étoile pour que les radiations soient moins fortes et maintiennent l’hydrogène en place. L’équipe de Marit Mol Lous s’est ici attaquée à la question de l’évolution de ces planètes. Et, si les conditions sont réunies (une masse importante, une atmosphère épaisse, une bonne distance de l’étoile…), la possibilité de voir un climat tempéré persister à la surface existe.

Cela pourrait vouloir dire que la liste de planètes où la vie est susceptible d’apparaître vient de grandir. Mais, ce n’est malheureusement pas si simple. « Notre modèle est compliqué à tester, reconnaît Marit Mol Lous, car ce sont des planètes qui sont difficiles à repérer actuellement. » Les planètes rocheuses sont plus petites que les géantes gazeuses, et si elles sont loin de leur étoile, elles sont aussi moins brillantes, et donc quasiment invisibles avec nos télescopes. En plus, si jamais l’une d’entre elles était identifiée, nous serions tout juste capables de déterminer sa masse et sa taille, mais pas la composition précise de son atmosphère.

Alors à quoi bon ? Pourquoi imaginer des planètes hors d’atteinte qui pourraient, potentiellement, abriter la vie ? « Il y a beaucoup de pièces manquantes dans ce puzzle, considère Marit Mol Lous. Nous ne comprenons pas complètement comment la vie est apparue sur Terre, nous ne savons pas bien quels sont les pré-requis pour les planètes. Je pense que la bonne stratégie serait de se demander pour quelles planètes nous sommes certains qu’il ne peut pas y avoir d’eau liquide. »

La Terre n’est pas un optimum

C’est le but avoué de cette étude : inciter la communauté scientifique à garder l’esprit ouvert sur l’habitabilité et sur les conditions nécessaires à l’apparition de l’eau liquide, et par extension, de la vie. Même si les moyens mis en œuvre pour détecter d’autres êtres vivants dans l’Univers sont considérables, il faut se rappeler que nos connaissances restent extrêmement limitées. Nous manquons d’expérience dans la mesure où nous ne disposons que d’un seul exemple de planète où la vie est apparue : la Terre. Dans ces conditions, impossible de savoir quels sont précisément les éléments indispensables à l’apparition de la vie. Nous n’avons aucun moyen d’être certains que notre planète représente bien une situation optimale pour voir proliférer des êtres vivants, il existe peut-être des environnements bien plus favorables.

Vue d'artiste du télescope James-Webb dans l'espace. // Source : Flickr/CC/Kevin Gill (image recadrée)
Vue d’artiste du télescope James-Webb dans l’espace. // Source : Flickr/CC/Kevin Gill (image recadrée)

« Nous recherchons surtout des planètes qui ressemblent à la Terre, et c’est une bonne idée, assure Marit Mol Lous. Mais, est-ce qu’il s’agit du seul type de planète habitable ? Nous ne le savons pas. Il faut se rappeler que la vie peut être complètement différente ailleurs. » À l’heure où des technologies plus performantes comme le télescope spatial James Webb seront très bientôt capables de caractériser l’atmosphère d’exoplanètes lointaines, trouver ce type de monde pourrait devenir une réalité. Mais Marit Mol Lous nuance : « Le problème de ces environnements plus exotiques, c’est que nous avons plus d’incertitudes, et il y a une grande part de spéculations. Au moins, avec une planète qui ressemblerait à la Terre, nous aurions beaucoup plus d’informations, car nous connaissons mieux notre planète. »

Au moment de chercher une exoplanète habitable, commencer par quelque chose qui ressemble à ce que nous connaissons est une bonne stratégie, mais il faut garder à l’esprit que d’autres configurations sont possibles. Pour Marit Mol Lous il y a une question intéressante à se poser : « Quels aspects de l’habitabilité sont universels, et lesquels peuvent être différents de la Terre ? » Peut-être que l’air que nous respirons n’est pas le seul à pouvoir voir éclore la vie, et si cela reste une supposition, les télescopes toujours plus performants qui scrutent notre Univers nous apporteront sans doute un jour une réponse.

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