Trois nouvelles particules ont été découvertes au Grand collisionneur de hadrons. Elles sont « exotiques ». Mais pourquoi sont-elles considérées comme peu ordinaires ?

Quelle est la différence entre matière et antimatière ? Pour le savoir, il faut notamment étudier un type de particules élémentaires : les quarks beauty. C’est justement l’objectif de la collaboration LHCb, basée au Grand collisionneur de hadrons. Si l’accélérateur de particules vient de passer à une puissance record, il n’a pas attendu sa mise à niveau pour apporter de nouvelles données.

Comme l’a révélé le CERN, lors d’un séminaire tenu le 5 juillet 2022, trois particules exotiques ont récemment été découvertes. Ce sont trois nouvelles configurations de quarks. Mais qu’est-ce que cela signifie exactement ?

Un mélange pas banal de saveurs

En physique quantique, les saveurs n’ont pas la même implication que dans votre cuisine. Elles désignent un ensemble de caractéristiques, dont la charge électrique. Ainsi, il existe six quarks différents pour six saveurs : quark down, quark up, quark strange, quark beauty, quark charm, quark truth.

Ces différents quarks se combinent par paire ou par trio pour former des particules composites appelées hadrons. En somme, les particules élémentaires que sont les quarks sont comme des briques distinctes qui s’assemblent. Mais, parfois, l’assemblage est plus complexe que prévu, par quatre ou par cinq quarks. Cela forme alors des hadrons dits « exotiques », car ils sortent de l’ordinaire.

C’est pour cette raison que les nouvelles particules détectées récemment au Grand collisionneur de hadrons ne sont pas banales. Sauf qu’elles ont, en plus, des particularités supplémentaires :

  • Un « pentaquark » (5 quarks) composé d’un quark charm et d’un antiquark charm, et d’un quark up, d’un quark down et d’un quark strange. Il s’agit tout bonnement du premier pentaquark découvert à contenir un quark strange.
  • Un « tétraquark » (4 quarks) doublement chargé électriquement. Il a été observé avec son « homologue neutre », ce qui forme au total deux nouveaux tétraquarks. « Il s’agit de la première observation d’une paire de tétraquarks », explique le CERN.
Les deux nouveaux tétraquarks. // Source : CERN
Les deux nouveaux tétraquarks. // Source : CERN

Ces trouvailles sont d’autant plus significatives du fait de leur importance statistique. La certitude statistique d’une observation, en physique, est basée sur l’écart-type : on considère une observation certaine à 5 écarts-types. Le pentaquark est à 15 écarts-types, le premier tétraquark est à 6,5 écarts-types et le deuxième tétraquark à 8 écarts-types.

Le « zoo de particules 2.0 »

La découverte de hadrons exotiques n’est pas inédite. En 2021, une particule avec une « double dose de charme » était mise au jour. Mais cela s’accélère nettement ces dernières années, à mesure que les accélérateurs de particules marchent à plein régime.

« Plus nous effectuons d’analyses, plus nous trouvons de types d’hadrons exotiques », explique, sur le site du CERN, Niels Tuning, qui coordonne l’expérience du LHCb. « Nous vivons actuellement une époque de découvertes semblable à celle que nous avons connue dans les années 1950, lorsque l’on a commencé à découvrir un véritable ‘zoo de particules’ – en l’occurrence des hadrons. »

C’est sur la base de ce zoo de particules découvert dans les années 1950 que l’on en sait autant aujourd’hui sur les hadrons classiques et leur modèle. Toutes les découvertes récentes de hadrons exotiques sont en train de forger, selon Niels Tuning, un « zoo de particules 2.0 ». Il n’y a pour l’instant aucun modèle établi, à proprement parler, sur les hadrons exotiques. Ces nouvelles trouvailles nous y emmènent, tout en faisant évidemment avancer les connaissances sur les hadrons et les quarks de manière plus générale.

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