Galilée a révolutionné notre vision du cosmos en regardant le ciel à l’aide du télescope qu’il avait nouvellement construit. Au début du 17e siècle, il a notamment découvert que la planète Jupiter dispose, elle aussi, de lunes. Un épisode marquant de l’histoire des sciences.
Dans les réserves de l’université du Michigan, quelque part où seuls les bibliothécaires peuvent se rendre, l’on trouve une pièce d’importance liée à cet épisode : un manuscrit daté de 1609, où Galilée évoque l’une de ses premières prises de conscience de ce qu’il observe, et où il dessine même un diagramme censé représenter le mouvement des lunes jupitériennes.
« Ce manuscrit d’une seule page est l’un des grands trésors de la bibliothèque de l’université du Michigan. Il reflète un moment crucial de la vie de Galilée qui a contribué à modifier notre compréhension de l’univers », explique l’université sur le site de ses collections.
Sauf que ce manuscrit ne provient pas réellement de Galilée et ne date clairement pas du 17e siècle. Comme le rapporte le Washington Post, l’université a posté à la mi-août, sur son site, une mise à jour : « la bibliothèque a conclu que ce ‘manuscrit de Galilée’ est en fait une contrefaçon datant du 20e siècle ». Cette conclusion n’aurait pas été possible sans un mail reçu en mai 2022, provenant d’un certain Nick Wilding.
Provenance douteuse, filigrane douteux : ça fait beaucoup
Nick Wilding, professeur d’Histoire à l’université de Géorgie, avait déjà acquis une réputation lorsque, en 2012, il avait apporté des preuves scientifiques qu’une édition soi-disant spéciale du Sidereus Nuncius de Galilée était en réalité fausse. Depuis, son expertise pour repérer les contrefaçons est reconnue.
Alors, quand l’université du Michigan a reçu un mail de Nick Wilding, en mai 2022, exprimant de « sérieux doutes » sur leur manuscrit dédié à Jupiter, le conservateur de la bibliothèque a immédiatement déclenché une enquête. Les preuves apportées par Wilding remettent notamment en question le filigrane et la provenance du manuscrit :
- Le filigrane du papier lui-même contient la mention BMO, liée à la ville de Bergamo. Cela suggère d’emblée une date de production récente : il n’existe pas le moindre document comportant ce filigrane et datant d’avant 1770.
- Il n’existe par ailleurs aucune trace du manuscrit avant 1930, et ce, en dépit d’une documentation très complète de nos jours des travaux de Galilée. Pire, on sait maintenant que le cardial Pietro Maffi, qui l’a authentifié lors de son arrivée aux enchères en 1934, l’a fait en comparant le manuscrit à deux autres qui, depuis, ont été certifiés faux. Même le point de référence n’était pas le bon à l’époque.
L’authenticité du manuscrit est donc réfutée. « Wilding a conclu que notre manuscrit de Galilée est un faux du XXe siècle exécuté par le célèbre faussaire Tobia Nicotra. Après que nos propres experts ont étudié ses preuves les plus convaincantes — concernant le papier et la provenance — et réexaminé le manuscrit, nous nous sommes ralliés à sa conclusion », constate l’université. Rappelons que le faussaire Tobia Nicotra avait été condamné à deux ans de prison et à une lourde amende pour falsification, quant à, entre autres, des documents liés à Galilée (sauf que ce manuscrit lié aux lunes jupitériennes ne lui avait pas été attribué à l’époque).
Mais alors que va devenir le document ? Sa place dans la collection va être « reconsidérée », explique l’université dans un post du 17 août, « en commençant par une mise à jour de ses métadonnées ». Malgré tout, la contrefaçon pourra « servir les intérêts de la recherche, de la formation et de l’enseignement dans le domaine des faux, des contrefaçons et des canulars, une discipline intemporelle qui n’a jamais été aussi pertinente.»
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