La fusée Space Launch System, qui doit lancer la mission Artémis I, n’a toujours pas décollé. Il semble improbable que la mission lunaire soit lancée avant le 17 octobre 2022, au plus tôt. Pourquoi faut-il attendre autant ?

Mise à jour du 9 septembre à 10h : La Nasa tente de résoudre le problème de la fuite directement sur le pas de tir, a-t-on appris le 8 septembre 2022. L’agence spatiale espère ainsi pouvoir lancer la mission Artémis I dès le 23 septembre. Même si le souci technique venait à être résolu, il reste une autre incertitude. Il faudrait que l’Eastern Range valide une demande de la Nasa : l’agence spatiale souhaite que le délai pendant lequel la fusée peut rester sur l’aire de lancement, sans refaire certifier le système de fin de vol, soit étendu.

Article original : L’imposante fusée Space Launch System (SLS) devrait rester au sol encore un bon moment. Alors qu’une deuxième tentative de lancer Artémis I vers la Lune devait avoir lieu le 3 septembre 2022, la Nasa a décidé de reporter le décollage à cause d’un problème technique. Une fuite d’hydrogène, que l’agence n’a pas pu colmater, a forcé à repousser encore le lancement de la première mission du programme Artémis.

La Nasa doit ramener le lanceur dans le VAB (« Vehicle Assembly Building »), le bâtiment dans lequel la fusée a été préparée, qui se trouve à proximité du pas de tir. On ne sait pas exactement quand le SLS en ressortira pour tenter un nouveau décollage, mais il semble peu probable qu’Artémis I soit lancée avant le 17 octobre, au plus tôt. Mais, pourquoi faut-il attendre si longtemps ?

La mission Artémis I ne peut pas être lancée tous les jours

Si la Nasa avait pu lancer la mission au début du mois de septembre 2022, elle aurait eu jusqu’au mardi 6 septembre pour le faire. La date d’un décollage de fusée ne dépend pas seulement des conditions météorologiques ou du fait que le lanceur soit prêt. Pour lancer Artémis I vers la Lune, il faut également tenir compte de « mécaniques orbitales complexes », a rappelé la Nasa. On ne peut pas envoyer la fusée n’importe quand dans l’espace, puisqu’il faut tenir compte des positions des astres pour que la mission (consistant à envoyer la capsule Orion faire le tour de la Lune) soit possible. En l’occurrence, de l’alignement entre notre planète et la Lune. Rappelons que la Terre tourne sur son propre axe, tandis que la Lune tourne autour de la Terre.

C’est pourquoi la Nasa a établi des périodes de lancement possibles pour Artémis I : elles correspondent aux jours, voire aux semaines, pendant lesquels la mission peut être accomplie, si le SLS est lancé à ces moments-là. Le résultat est « un schéma d’environ deux semaines de possibilités de lancement, suivies de deux semaines sans possibilités de lancement », résumait en mai dernier la Nasa.

Les 4 critères clés pour viser correctement la Lune

L’agence spatiale explique tenir compte de 4 principaux critères, propres à la mission Artémis I, pour déterminer à quels moments les lancements sont possibles.

  • Le jour du décollage dépend de la position de la Lune dans son propre cycle. C’est nécessaire pour que l’étage supérieur du SLS puisse prévoir correctement l’éjection de la capsule Orion, de manière que celle-ci puisse ensuite s’insérer en orbite lunaire.
  • La trajectoire de la mission doit éviter que la capsule Orion reste dans l’obscurité plus de 1h30 (ce qui arrive quand le Soleil est éclipsé, vu depuis la capsule). Ainsi, les panneaux solaires du vaisseau reçoivent assez de lumière solaire, qu’ils peuvent convertir en électricité, et Orion reste dans une plage de températures décrite comme optimale.
  • Le choix d’une date du décollage doit prendre en compte la manière dont Orion reviendra sur Terre. La capsule doit faire une « entrée par saut » (« skip entry » en anglais), une première pour un vaisseau prévu pour être habité. La manœuvre peut faire penser à des ricochets sur l’eau : Orion va plonger dans la partie supérieure de l’atmosphère, puis en sortir, et ensuite y revenir pour sa descente finale. Les vaisseaux du programme Apollo entraient directement dans l’atmosphère. La technique choisie avec Orion doit permettre de réaliser un atterrissage plus précis.
  • Enfin, il faut anticiper les conditions de luminosité du jour où Orion devra être récupéré dans l’océan Pacifique, afin de faciliter le travail du personnel.

À quelles dates Artémis I peut-elle décoller ?

En tenant compte de toutes ces considérations, la Nasa a établi les dates possibles pour le décollage d’Artémis I. L’agence avait ainsi prévu que, si Artémis I ne pouvait pas partir le jour J, il restait 157 dates de repli. Sur le calendrier suivant, on voit en vert les dates auxquelles le décollage de la mission est possible, avec des variations : en vert foncé, ce sera une longue mission (38 à 42 jours) ; en vert clair, la mission sera plus courte (26 à 28 jours). Cette durée dépend du nombre de tours que la capsule peut faire autour de la Lune : soit un demi-tour, soit un tour et demi. La Nasa a préféré se laisser le choix, pour disposer de davantage de dates permettant de lancer la mission. Par ailleurs, aucun décollage ne peut avoir lieu les jours en rouge et gris.

Le calendrier de la Nasa avec les dates de lancement possibles. // Source : Capture d'écran Nasa
Le calendrier de la Nasa avec les dates de lancement possibles. // Source : Capture d’écran Nasa

Mais ce n’est pas fini. À tout ceci, il faut ajouter des contraintes, liées au remplissage du réservoir de l’étage principal de la fusée. Le jour du lancement, les réservoirs sont remplis d’oxygène et d’hydrogène liquide. Mais, une fois que cet étage est plein, si le lancement est annulé, il va falloir réapprovisionner les réservoirs. Par conséquent :

  • Il ne peut pas y avoir plus de 3 tentatives de lancements en 7 jours,
  • Il doit y avoir minimum 48 heures entre la tentative n° 1 et la n° 2,
  • Et minimum 72 heures entre la tentative n° 2 et la n° 3.

On peut maintenant reprendre le déroulement des événements. Une première tentative pour lancer Artémis I a eu lieu le lundi 29 août. La deuxième tentative a eu lieu le samedi 3 septembre. Après ce deuxième essai, la Nasa a décidé de ne plus tenter aucun décollage début septembre. On voit sur le calendrier que cela aurait été envisageable jusqu’au 6 septembre : il est certain que ces dates sont désormais écartées.

Après 25 jours maximum, retour au garage pour le SLS

Mais, alors, pourquoi ne pas lancer la fusée à partir du 19 septembre ? On voit sur le calendrier de la Nasa toute une série de dates disponibles, du 19 septembre jusqu’au 4 octobre (à l’exception des 29 et 30 septembre). Toutefois, la Nasa ne peut pas laisser sa fusée SLS sortie indéfiniment. L’agence doit se conformer aux exigences de l’Eastern Range (le champ de tir, géré par l’US Air Force, qui inclut Cap Canaveral et le centre spatial Kennedy), pour certifier le système de fin de vol de son lanceur. Ce système est obligatoire sur toutes les fusées, pour des questions de sécurité. Or, la fusée ne peut pas rester plus de 25 jours sur le pas de tir, sans que les batteries de ce système soient vérifiées — vérification qui doit avoir lieu dans le VAB.

Actuellement (à la date du 6 septembre), la fusée est sur son pas de tir depuis le 16 août. C’est la date à laquelle elle a été sortie du VAB. En tenant compte des 25 jours, cela veut dire qu’elle doit quitter le pas de tir, au plus tard… le 10 septembre. Soit, peu avant la date à laquelle les lancements redeviennent possibles en septembre.

En plus, on ne sait pour l’instant pas combien de temps la fusée devrait rester dans le VAB, une fois qu’elle y sera revenue. Cela dépendra probablement du temps nécessaire pour résoudre le problème de la fuite. On connaît au moins le temps qu’il lui faut pour rouler entre le bâtiment d’assemblage et l’aire de lancement : 8 à 12 heures.

Avec tous ces éléments en tête, il semble très peu probable que la fusée soit prête à nouveau sur le pas de tir, après être rentrée au VAB, pour un lancement avant le 4 octobre. Au plus tôt, on peut ainsi espérer un lancement à partir de la prochaine date en vert sur le calendrier, soit le 17 octobre.

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