Alors que le gouvernement prépare un plan de sobriété énergétique, une pétition plaide pour éteindre tous les panneaux publicitaires lumineux. Est-ce que cela servirait de couper ces écrans ?

Pour faire face à la crise énergétique et au passage de l’hiver, l’extinction de tous les panneaux lumineux publicitaires en France peut-elle faire la différence ? La question ne se pose pas pour les signataires d’une pétition, qui plaident pour un arrêt définitif des écrans numériques publicitaires, que l’on croise dans les centres commerciaux, les gares, les aéroports ou dans la rue.

Mise en ligne le 13 septembre 2022 sur la plateforme GreenVoice, la pétition a réuni un peu plus de 6 300 signatures, dont des représentants d’organisations écologistes et citoyennes (GreenPeace, Attac, les Amis de la Terre, Oxfam…), des parlementaires, un économiste, des activistes et un philosophe. Tous interpellent le président de la République pour qu’il intervienne en ce sens.

panneau publicité
Un exemple de panneau au Royaume-Uni. // Source : JCDecaux

Cette mesure, suggèrent-ils, permettrait d’ailleurs de soutenir les buts de l’exécutif. La pétition rappelle « qu’au cœur de l’été, le gouvernement a annoncé un grand plan de sobriété en réponse à la grave crise énergétique que traverse l’Europe. Les mesures adoptées doivent renforcer notre indépendance énergétique et faire baisser nos consommations de 10 % d’ici à 2024. »

Il s’avère que le gouvernement a tenu le 14 septembre une conférence de presse sur la crise énergétique. À cette occasion, la Première ministre Elisabeth Borne a acté le prolongement du bouclier tarifaire en 2023 (avec une hausse limitée à 15 % des prix du gaz et l’électricité) et l’envoi de chèques « énergie » de 100 à 200 euros pour 12 millions de foyers en 2022.

Rien de spécifique n’a été dit au sujet de ces écrans numériques lors du point d’étape. Ce pourrait changer en octobre, car le plan de sobriété énergétique, qui vise à réduire de 10 % la consommation énergétique d’ici à deux ans, sera présenté au début du mois suivant. Des annonces sur les panneaux lumineux pourraient avoir lieu, surtout si la pétition gagne en signataires d’ici là.

Quelle est la consommation des panneaux publicitaires lumineux en France ?

Se pose toutefois une question : quel est le poids concret de ces dispositifs sur la consommation en France ? La réponse à cette question se trouve dans un document de RTE (Réseau de Transport d’Électricité, le gestionnaire du réseau de transport d’électricité dans le pays, filiale d’EDF). Et il ressort que ce n’est pas le levier le plus spectaculaire à actionner.

RTE a estimé que la réduction de ces écrans aurait pour effet d’éviter 0,5 TWh (térawatt-heure). En comparaison, une année de consommation en France représentait 475 TWh en 2019 — une année somme toute normale, hors crise sanitaire et guerre en Ukraine. En somme, une telle action influerait sur à peine 0,1 % du total.

C’est très faible au regard d’autres leviers plus efficaces (recours au télétravail, allongement des durées de vie des équipements, usage accru du covoiturage, réduction de la vitesse de circulation, consommation d’une alimentation moins transformée, etc.), dont l’activation produirait des gains plus massifs. Mais ils ne sont pas toujours simples à actionner.

RTE leviers
Plusieurs leviers identifiés par RTE, par secteur. // Source : RTE

Il s’avère que l’extinction de ces panneaux lumineux fait partie des mesures assez faciles à mettre en œuvre, sur lesquelles les résistances sont faibles, voire nulles. RTE, d’ailleurs, classe ces écrans parmi les consommations « superflues », au même titre que l’éclairage de devantures, dans un document concernant l’hiver 2020-2021. Le gestionnaire plaide pour limiter ces panneaux.

Le nombre de panneaux lumineux installés en France est important, et en hausse (on en comptait 3 000 en 2013). Selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, dans un rapport daté de 2020, un écran de 2 m² consomme 2 000 kWh par an. En comparaison, la consommation moyenne d’électricité d’un ménage, hors, chauffage et eau chaude, est de 2 700 kWh par an.

Pris isolément, le levier consistant à éteindre les panneaux publicitaires lumineux ne suffira pas à atteindre l’objectif d’une baisse de 10 % en deux ans. Mais ne pas s’en servir, alors qu’il s’agit d’un des plus accessibles, pourrait ajouter de la difficulté. D’autres leviers sont plus performants, certes, mais leur emploi pourrait générer beaucoup plus de résistance dans la population.

Cette problématique doit s’inscrire dans une réflexion d’ensemble, à tous les niveaux, des plus hauts (l’usage de la voiture individuelle, la consommation de viande) au plus bas (les écrans publicitaires). Cela, d’autant plus si l’on souhaite piloter cette sobriété et ne pas la subir. Une situation qui se concrétiserait alors par des rationnements, voire des coupures.

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