Ce texte est extrait de notre chronique réalisée vendredi 7 octobre 2022 dans le Meilleur des Mondes de France Culture.
Remontons le temps. On est en 2009, un film sort en salle et il va marquer l’histoire du cinéma : Avatar. On y découvre la planète Pandora, que les humains convoitent pour ses ressources. Sauf qu’un peuple y habite déjà, les Na’vi. On parle souvent d’Avatar pour son avant-gardisme technique, mais il se trouve que le film était en avance sur son temps aussi comme récit écologique.
Grace, le personnage d’une scientifique dans le film, décrit ainsi l’arbre central de la planète : « D’après nos observations, il y aurait une espèce de transmission électrochimique permettant aux arbres de communiquer entre eux. Ca agirait comme les synapses entre les neurones, et chaque arbre a 10 puissance 4 connexions avec les arbres voisins. Et on sait qu’il y a environ 10 puissance 12 arbres sur Pandora. (…) C’est plus de connexions que dans le cerveau humain. Vous vous rendez compte ? C’est comme un réseau, d’une dimension phénoménale, auquel les Na’vi ont accès, et grâce auquel ils peuvent échanger des données, de la mémoire, dans des lieux tels que celui que vous venez de détruire. »
Après cette explication, le représentant de l’entreprise éclate de rire et déclare que c’est : « juste un arbre ». À l’époque, ce sujet était peu évoqué. Mais 10 ans après la sortie du film, L’Arbre-Monde, le célèbre ouvrage de Richard Powers, débarquait en librairies. Ce grand roman mettait en scène la quête d’une botaniste sur la communication entre les arbres. Et pour ce faire, Richard Powers s’est documenté sur plusieurs années les travaux scientifiques.
Car oui, c’est une véritable voie de recherche et de débat en biologie. On sait que les arbres ne sont pas des individus isolés, mais un vrai réseau, qui demande à être mieux compris.
Levons les yeux : il y a des réseaux aussi chez les oiseaux
Peut-on trouver des réseaux sociaux dans la nature ? D’une certaine façon, aussi en levant les yeux. C’est ce qu’on apprend par exemple dans le nouvel ouvrage du physicien Giorgio Parisi, Comme un vol d’étourneaux, chez Flammarion. Il nous parle des nuées d’oiseaux — quand on voit dans le ciel des dizaines de petits points noirs voler ensemble dans des formes cohérentes. Cela porte un nom : murmures. Un mot poétique, qui porte aussi la notion de communication discrète.
Giorgio Parisi a participé à des expériences dans ce domaine, qu’il décrit dans le livre. Il écrit : « les informations sur le changement de direction passent rapidement d’un oiseau à l’autre, une sorte de bouche-à-oreille rapide ». Il explique aussi que ces communications n’ont pas lieu à distance : elles ont lieu avec l’individu le plus proche, qui transmet ensuite à ceux qui lui sont proches, et ainsi de suite. Ne dirait-on pas Twitter ou Instagram ?
On s’aperçoit de plus en plus que la nature est truffée d’une communication basée sur la coopération, plutôt que sur l’accumulation individuelle ou le conflit.
Nos réseaux sociaux ne sont pas asociaux, ils sont bel et bien sociaux. Cela signifie qu’ils dépendent du modèle de société. Dans une société capitaliste de la compétition, ils seront l’expression de l’individualisme. C’est en changeant le monde que l’on changera les réseaux sociaux, et comme pour tout, l’écologie a beaucoup à nous apprendre.
Pour écouter Le Meilleur des Mondes sur France Culture
L’émission Comment peut-on réinventer nos réseaux sociaux ? a été diffusée le vendredi 7 octobre 2022 sur France Culture.
Le Meilleur des mondes est l’émission de François Saltiel, préparée avec Juliette Devaux.
- Elle est diffusée en direct tous les vendredis à 21h sur France Culture
- Elle est rediffusée le samedi à 17h
- Elle est disponible en podcast, sur Apple Podcast, Spotify, Deezer et vos autres plateformes préférées.
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