« Un astéroïde dangereux pour la vie sur Terre vient d’être découvert », « l’incroyable découverte d’un astéroïde tueur de planètes »… Les titres affolants annonçant la découverte d’un astéroïde menaçant pour la Terre se sont multipliés depuis le 1er novembre 2022. Toutefois, l’objet céleste dont il est question ne représente aucun risque pour l’humanité et notre planète.
Il s’agit de l’astéroïde 2022 AP7. C’est un objet géocroiseur (NEO, pour Near Earth Object en anglais), ce qui signifie que son orbite autour du Soleil peut l’amener dans le voisinage terrestre. Néanmoins, l’objet n’est pas considéré comme à risque. Le Near Earth Object Center (centre de coordination des objets géocroiseurs) de l’ESA (agence spatiale européenne) est chargé de surveiller les orbites et d’anticiper d’éventuels risques de collision. Il a actualisé pour la dernière fois la fiche de 2022 AP7 le 2 novembre 2022 : « L’objet n’est pas dans la liste à risque », peut-on y lire.
L’astéroïde finira plus probablement dans le Soleil
« 2022 AP7 ne cause aucun risque, au moins sur les échelles de temps de prédiction de nos calculs, comme tous les autres objets de cette taille, d’ailleurs », résume auprès de Numerama l’astrophysicien Patrick Michel, directeur de recherches au CNRS et responsable scientifique de la mission Hera de l’ESA. Le diamètre de 2022 AP7 est estimée à 1,2 km. « Mais son orbite ne le conduit pas sur une trajectoire qui rencontre la Terre sur les échelles de temps de nos prédictions (typiquement, un siècle). Il risque plus probablement de finir dans le Soleil comme la majorité des géocroiseurs », complète l’expert.
La Nasa anticipe les passages rapprochés des astéroïdes géocroiseurs, pour s’assurer qu’ils ne représentent pas de risque. Dans le cas de 2022 AP7, l’agence spatiale ne note aucune approche de la Terre. Seuls des passages dans les environs de Mars et de Jupiter sont listés, jusqu’en 2168.
2022 AP7 est certes le « plus gros astéroïde trouvé sur une orbite croisant celle de la Terre au cours des 8 dernières années », comme le mentionne sur Twitter le planétologue Michael Busch de l’Institut SETI, sur Twitter. Toutefois, il « est placé le long de son orbite de telle façon qu’il ne peut pas s’approcher de la Terre pendant des siècles », confirme lui aussi le planétologue, renvoyant vers une étude. Elle a été publiée en septembre 2022 dans The Astronomical Journal.
« Comme la période orbitale de 2022 AP7 est presque exactement de 5 ans, son orbite est actuellement identique à celle de la Terre, ce qui le maintient à une bonne distance », peut-on lire dans ces travaux. L’étude porte également sur deux autres astéroïdes géocroiseurs. Le communiqué présentant les travaux rappelle qu’identifier des astéroïdes dans le système solaire interne (des astéroïdes qui se trouvent donc à l’intérieur de l’orbite de la Terre autour du Soleil) est complexe. Les astronomes n’ont que deux fenêtres de 10 minutes par nuit pour observer cette région, avec un fond de ciel très lumineux à cause du Soleil.
Bientôt un télescope spatial pour traquer les géocroiseurs plus difficiles à voir
« Nous ne l’avons pas détecté plus tôt, car son orbite n’était pas favorable à l’observation depuis la Terre », complète Patrick Michel. Il ajoute que « nous avons découvert les géocroiseurs les plus faciles à découvrir depuis la Terre, et ceux qui restent à découvrir sont moins accessibles, et le seront beaucoup plus par un télescope spatial dans l’espace ». C’est justement l’objet de la future mission NEO Surveyor, actuellement en développement par la Nasa. À l’aide d’un télescope infrarouge, cette mission doit permettre de recenser les géocroiseurs de plus de 140 mètres de diamètre. Le lancement est prévu à l’horizon 2026.
Enfin, au-delà des titres sensationnalistes, il faut surtout rappeler que c’est une aubaine pour les scientifiques de découvrir encore des objets géocroiseurs de plus de 1 km. « Si l’on se réjouissait d’avoir fait l’inventaire de plus de 90 % d’entre eux, il restait important de les recenser tous pour s’assurer que nous n’avons pas de risque », détaille Patrick Michel. Même s’il faut bien garder à l’esprit que la fréquence d’impact d’objets aussi imposants est particulièrement faible (tous les 500 000 ans en moyenne).
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