En 1547, l’empereur Charles V, qui régnait sur le Saint-empire romain germanique, écrivit une longue lettre longue à son ambassadeur. La missive était en grande partie codée avec un système unique en son genre, qui a caché le sens de lettre pendant près d’un demi-siècle.
Le 23 novembre 2022, une équipe de chercheurs français a enfin percé le secret, vieux de 500 ans. Que l’équipe ait réussi à déchiffrer la lettre est déjà un exploit en soi — ce qui est encore plus remarquable, c’est qu’aucun ordinateur n’aurait été capable de faire ce qu’ils ont fait.
Utiliser un ordinateur aurait pris « plus de temps que l’histoire de l’Univers ! »
L’équipe qui est parvenue à percer le mystère de la lettre est composée de 4 chercheurs français en histoire et en informatique, dont une spécialiste en cryptographie, Cécile Pierrot. Malgré leur expertise, il leur a fallu près de 2 ans pour déchiffrer le code.
Charles V utilisait en effet une technique très poussée pour l’époque, comme l’a raconté l’équipe de chercheurs à la BBC. La lettre de 3 pages, qui est conservée à la bibliothèque de Nancy, utilise plus de 120 symboles cryptés. « La première chose à faire était de catégoriser les symboles, et de rechercher des répétitions. Mais il ne s’agissait pas simplement d’un cas où un symbole représentait une lettre — il s’agissait de quelque chose de bien plus complexe », a expliqué Cécile Pierrot.
Certains symboles représentaient ainsi des mots entiers. On peut notamment voir sur la grille ci-dessus que les termes « Roy (roi en ancien français, ndlr) de France » était représenté par un point sous un trait horizontal, « Roy de Bohème », par un point sur un trait, et « Roy d’Angleterre », par un trait vertical surmonté d’un cercle.
Ce n’est pas tout : les voyelles situées après une consonne étaient remplacées par des signes diacritiques semblables à ceux utilisés en arabe, d’après la BBC. Il existait également des versions simples et d’autres complexes des mêmes voyelles, et la lettre « e », la plus utilisée en français, était la plupart du temps simplement supprimée, afin de compliquer encore plus la tâche. Enfin, dernier piège, certains symboles utilisés tout au long de la lettre n’avaient aucune signification, et étaient utilisés dans le seul but d’induire en erreur.
Au final, selon Cécile Pierrot, qui est chargée de recherche à l’INRIA (Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique), « rentrer le texte chiffré dans l’ordinateur et lui demander de les décoder » n’aurait jamais pu marcher. « Cela aurait littéralement pris plus de temps que l’histoire de l’Univers ! »
Grâce à leurs travaux et à d’autres documents conservés à la bibliothèque de Besançon, l’équipe de chercheurs a réussi à craquer le code en un peu moins de 2 ans. Ce faisant, ils ont enfin pu dévoiler les secrets de la lettre.
Dans cette dernière, Charles V parle des relations diplomatiques tendues avec la France (les deux pays avaient signé un accord de paix quelques années auparavant), et fait part à son ambassadeur de sa peur d’être assassiné. Heureusement pour lui, cela n’arrivera jamais.
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