Qu’il s’agisse de Mars, de la Lune ou même des galaxies les plus lointaines, 2022 a été une année riche en découvertes scientifiques parfois majeures. Sans oublier les avancées sur la présence humaine au-delà de la Terre. En cette fin d’année, voici l’occasion de faire un retour sur celles qui nous ont marqués, dans les domaines du spatial et de l’astronomie.
Le télescope James Webb, roi incontesté de 2022
Chez les astrophysiciens, comme chez le grand public, l’année 2022 a été avant tout celle du télescope spatial James Webb. Le JWST, lancé à Noël 2021, a passé l’année à nous envoyer des images plus belles les unes que les autres. Cela a commencé dès juillet, avec de premiers clichés officiels époustouflants. Mais, au-delà de l’intérêt évident pour renouveler son fond d’écran, ces clichés ont également révélé des phénomènes fascinants à travers l’Univers.
Dès le mois d’août, la NASA a annoncé une première : du dioxyde de carbone détecté dans l’atmosphère d’une exoplanète. WASP-39 b, située à 700 années-lumière de chez nous, a été scrutée par le télescope qui y a vu du CO2, grâce à l’extrême sensibilité de son filtre infrarouge. Une donnée essentielle pour en savoir plus sur les exoplanètes. C’était aussi une véritable démonstration technique de la part d’un instrument capable d’une précision jamais atteinte auparavant.
En novembre, le JWST est allé plus loin, beaucoup plus loin. Littéralement, puisqu’il a détecté rien de moins que la plus ancienne galaxie jamais observée. La lumière captée par ses instruments a été émise seulement 350 millions d’années après le Big Bang. Il y a donc plus de 13 milliards d’années ! Encore une fois, même les spécialistes les plus optimistes n’espéraient pas une telle qualité des données moins d’un an après le lancement. Un télescope aussi perfectionné que James Webb nécessite une longue période de calibrage avant d’être pleinement opérationnel. Quoi qu’il en soit, ces galaxies sont cruciales pour remonter dans le temps jusqu’au tout début de l’Univers et voir comment tout cela est apparu.
Pour finir avec le JWST, citons également une étude fascinante dans laquelle le télescope a permis l’observation d’un amas de galaxies en pleine formation. Ce proto-amas, né il y a plus de 11 milliards d’années, est à un stade extrêmement précoce de son développement, dans un environnement dense avec plusieurs galaxies en train de s’imbriquer rapidement. Un processus mal connu, car la plupart des amas déjà identifiés sont bien plus vieux et plus stables.
Mars tremble et souffle
Mars fut également au cœur de nombreuses découvertes cette année. Rien d’étonnant à cela, au vu du nombre de rovers et d’orbiteurs qui passent au peigne fin le moindre centimètre carré de sa surface.
Mais, ce qui retient particulièrement notre attention, c’est une trouvaille réalisée par un autre engin : un sismomètre. En septembre, InSight a « entendu » des météorites tomber sur Mars. Les capteurs servent à identifier les moindres vibrations dans le sol, ce qui a mené à la découverte de nombreux séismes de faible intensité. Mais, là, c’est une tout autre secousse qui a pu être analysée.
Le choc produit par la météorite a été entendue par le sismomètre. En plus, les orbiteurs ont ensuite pu aller vérifier s’il y avait bien un cratère nouvellement formé un peu plus loin, ce qui était bien le cas. Quatre impacts différents ont ainsi été entendus en un peu moins d’un an. Un beau chant du cygne pour InSight, dont les instruments sont désormais en fin de vie.
Perseverance n’a pas chômé non plus. Même si sa mission principale est bien l’identification et le stockage d’échantillons à ramener un peu plus tard sur Terre, le rover de la Nasa profite de son séjour pour faire quelques enregistrements. Le microphone placé sur SuperCam, la partie française du rover, a capté quelques sons de Mars qui ont pu être analysés. En avril dernier, une étude est revenue sur ces données et a révélé une planète extrêmement silencieuse. Un phénomène dû au fait que la pression et l’atmosphère martienne empêchent une bonne diffusion du son. D’ailleurs, les ondes sonores voyagent également moins vite que sur Terre, notamment pour les fréquences les plus aiguës.
On a fait le tour de la Lune
Retournons un peu plus près de la Terre avec ce qui fut sans doute un des événements les plus marquants de l’année : la première mission du programme Artémis. Après plusieurs reports, la faute à une fusée ou à une météo capricieuse, le lancement a enfin pu avoir lieu le 16 novembre. Artémis I est avant tout une grande répétition générale, puisque le vaisseau Orion est parti sans astronaute, pour un voyage de quelques semaines, afin de faire du repérage avant la suite du programme Artémis. La prochaine étape, elle, sera bien habitée, pour un aller-retour similaire, avant Artémis III où des humains fouleront la surface lunaire.
Quoi qu’il en soit, cette mission fut un succès total, avec un vaisseau habitable qui a fait plusieurs orbites autour de notre satellite, le tout filmé et diffusé en direct. Orion est ensuite revenu sans encombres sur Terre le 11 décembre. La Nasa va maintenant pouvoir analyser toutes les données récupérées pendant ce premier vol pour organiser la suite.
Des morceaux de Terre sous la Lune
Si la Lune a été au centre de l’actualité avec le lancement du programme Artémis, notre satellite s’est aussi retrouvé dans la rubrique scientifique cette année. En août, une étude est venue renforcer la théorie selon laquelle la Lune est bien née de la Terre. Certes, c’est la théorie principale pour expliquer sa création : un impact géant sur la Terre très peu de temps après sa formation qui aurait créé un satellite en orbite. Mais, il reste quelques doutes.
Une équipe de chercheurs a donc identifié des gaz présents dans les profondeurs de la Lune, extrêmement semblables à ceux qui se retrouvent dans le manteau terrestre. Une preuve qu’ils se sont formés au même endroit il y a plus de 4 milliards d’années.
Pour arriver à cette conclusion, les scientifiques se sont intéressés à des fragments de météorite lunaire retrouvés en Antarctique, arrachés au sous-sol lunaire après un choc violent. C’est là que des gaz dits « indigènes » ont été retrouvés et apportent un argument supplémentaire aux partisans de la théorie de l’impact géant.
Une nouvelle station spatiale chinoise
La station spatiale internationale n’est pas seule en orbite autour de la Terre. La Chine aussi a désormais son propre pied-à-terre dans l’espace. Cette station spatiale chinoise a achevé son assemblage début novembre et circule à la même altitude que l’ISS. La base fut construite en un temps record, avec seulement trois modules assemblés de 2021 à 2022. Fin 2022, le quatrième équipage est à bord.
Quant à son fonctionnement, rien de très différent de ce qui se passe à bord de l’ISS : les équipages de trois personnes se relaient tous les six mois, et mènent des expériences scientifiques sur divers champs de recherche. Cette station est aussi une manière pour la Chine de s’imposer sur la scène spatiale internationale et de s’entraîner pour des vols longue durée.
En revanche, le pays suscite toujours la polémique en raison de ses lancements mal contrôlés. En novembre, la fusée Longue Marche 5B qui avait mis en orbite un des modules de la station a fini par retomber sur Terre de manière totalement incontrôlée. Ce n’est pas une première, et il n’y a pas eu de victimes. Cependant, ces petites frayeurs agacent les autres pays, où la gestion de ces débris est surveillée de près.
Une nouvelle astronaute française
Justement, concernant l’ISS, nous connaissons certains de ses futurs occupants : l’ESA a dévoilé sa nouvelle sélection d’astronautes le 23 novembre, et il y a une Française parmi eux : Sophie Adenot. À 40 ans, cette ingénieure de formation, pilote expérimentée (3 000 heures de vol en hélicoptère, tout de même), fait partie de la promotion principale constituée de 6 astronautes : un Espagnol, un Belge, un Suisse et deux Britanniques, dont le premier parastronaute John McFall.
C’est une grande nouvelle pour la France, d’autant plus marquante que Sophie Adenot n’est que la seconde femme à obtenir ce grade, plus de vingt ans après Claudie Haigneré. La prochaine étape pour la nouvelle recrue, ce sont quelques années d’entraînement : pour commencer, une année complète au Centre européen des astronautes à Cologne en Allemagne. Avant un possible décollage d’ici à 2025 au plus tôt.
Des astéroïdes moins menaçants et plus fascinants
Cette année 2022 fut riche en astéroïdes. Tout d’abord, lors de la mission DART, avec cet orbiteur qui s’est écrasé fin septembre pour faire dévier Dimorphos. L’opération de « défense planétaire » (il s’agissait d’un exercice) s’est déroulée avec succès : l’astéroïde a bien changé de trajectoire, comme prévu. Il va maintenant falloir attendre encore quelques années pour qu’une autre sonde, nommée Héra, parte pour constater les dégâts d’un peu plus près.
En attendant, un autre corps a fait parler de lui : Ryugu. La sonde Hayabusa-2 avait ramené quelques fragments de sa surface pour les étudier, et ils ont révélé quelque chose de particulièrement intéressant : des acides aminés. Ces molécules sont souvent désignées comme des « briques de vie », c’est-à-dire des ensembles d’atomes suffisamment complexes pour, dans de bonnes conditions, créer les premières phases de la vie.
Cela veut-il dire que de la vie a pu apparaître sur Ryugu ? Non, aucune chance en l’absence d’eau ou d’atmosphère. En revanche, c’est un argument supplémentaire pour dire que la vie a pu apparaître sur Terre grâce à l’apport de matériel venu de l’extérieur. Des astéroïdes ou des comètes qui auraient « nourri » la planète, avec des éléments essentiels au développement des êtres vivants.
Bételgeuse et les milliards d’autres
Partons maintenant à la rencontre des étoiles, avec la petite chouchoute de la rédaction de Numerama : Bételgeuse. L’étoile qui a fait espérer l’apparition d’une supernova après avoir diminué drastiquement sa luminosité en 2019 a continué d’avoir un comportement vraiment étrange. En avril, The Astrophysical Journal fait état d’une étoile en train de « rebondir ». Un phénomène qui ferait suite à une expulsion d’une grande quantité de matière d’un seul coup. Cela se traduit par des mouvements internes assez inhabituels, qui permettent à l’étoile de retrouver sa stabilité après cet important déséquilibre.
Au final, encore une fois non, il n’y aura malheureusement pas de supernova à observer dans un avenir proche. En revanche, Bételgeuse demeure fascinante pour découvrir tous les mécanismes qui se produisent au cœur d’une étoile durant son existence.
Une étoile, c’est bien, mais que diriez-vous de 1,8 milliard d’étoiles ? C’est ce qui a été repéré dans le dernier catalogue du télescope Gaia dévoilé en juin dernier. L’engin de l’ESA continue son travail de cartographie de notre Voie lactée et au-delà. Dans son dernier volume, le télescope a analysé consciencieusement les trajectoires et les luminosités des étoiles pour déduire leur température, leur masse ou leur âge. De quoi donner du travail aux scientifiques, qui vont maintenant chercher à en apprendre plus sur certaines d’entre elles. Une cinquantaine d’études ont été publiées juste après la révélation du catalogue.
En attendant tout cela, Gaia va continuer d’observer les astres lointains, mais également les galaxies, les quasars, et même les astéroïdes. Un avant-goût du prochain catalogue (encore incomplet) pourrait être publié en 2023.
Les trous noirs prennent la pose
Finissons ce tour d’horizon avec les objets parmi les plus fascinants de l’Univers : les trous noirs. Chaque année apporte son lot de découvertes sur ces phénomènes mystérieux, et pour 2022, l’événement le plus marquant a sans doute eu lieu le 12 mai dernier. Les équipes de l’Event Horizon Telescope ont révélé, pour la première fois, une image de Sagittarius A*, le trou noir au centre de notre galaxie.
Ce trou noir supermassif de plus de 4 millions de masses solaires se situe à un peu plus de 25 000 années-lumière de la Terre. Les scientifiques ont mis cinq ans à réussir à en prendre une image sur laquelle on distingue des traces orangées : le gaz qui entoure le trou noir. C’est la deuxième image que nous possédons d’un trou noir, après la révélation de la première sur M87 en 2019.
Un peu plus près de nous, à « seulement » 5 000 années-lumière de la Terre, un autre objet similaire a suscité quelques débats. Il n’est pas certain à 100 % qu’il s’agisse bien d’un trou noir. Pourtant, c’est bien un objet compact qui se promène dans notre galaxie à la vitesse de 160 000 km/h. Sa masse est telle qu’il a dévié la lumière des étoiles alentour, et si la découverte est bien confirmée, il s’agirait du premier trou noir vagabond identifié dans notre Voie lactée.
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