« Allô Beijing ? Zhurong ne répond plus. » Le rover chinois envoyé sur Mars n’a pas donné de nouvelles depuis le mois de mai 2022 ! Au début, rien d’inquiétant : Zhurong était censé passer en mode hibernation pendant l’hiver martien. Mars entrait dans une période de six mois, durant laquelle le manque de Soleil rendait l’alimentation en énergie plus compliquée.
Mais, les autorités chinoises attendaient des nouvelles pour le mois de décembre, ce qui n’a pas eu lieu. « Le réveil de Zhurong est dépendant de la température et du niveau d’énergie solaire, précise à Numerama Andrew Jones, spécialiste du suivi du rover pour le site SpaceNews. C’est pourquoi nous attendions un réveil autour de l’équinoxe de printemps qui se produit mi-décembre dans l’hémisphère nord. »
Le silence assourdissant de Beijing au sujet de Zhurong
Alors, pourquoi Zhurong ne s’est-il pas réveillé comme prévu ? Malheureusement, à ce stade, il faudra se contenter d’hypothèses, car les autorités chinoises sont particulièrement silencieuses à ce sujet. « C’est assez normal que la Chine ne dise rien sur le déroulement de la mission, considère Andrew Jones. Mais, par le passé, il leur est arrivé d’annoncer l’échec ou la fin d’un projet spatial, donc s’ils n’ont rien dit, c’est peut-être parce qu’ils attendent de nouvelles informations. »
Quiconque cherche à suivre d’un peu près le spatial chinois sait à quel point les informations sont rares et précieuses. Beijing verrouille sévèrement toute communication et ne laisse passer les informations triées qu’une fois que tout est bien lissé et parfait, quitte parfois à prendre son temps, loin de la frénésie publicitaire à laquelle la Nasa a habitué le monde occidental.
Résultat, en attendant une annonce officielle, il faut se contenter de fouiller dans les différentes données ou de consulter Weibo, le Twitter chinois sur lequel des journalistes donnent parfois quelques informations. Ainsi, certains journalistes sur place ont révélé que Tianwen-1, l’orbiteur qui accompagnait Zhurong lors de son lancement, continuait d’opérer normalement. Ce qui n’indique pas de nouvelle information sur le rover, mais rassure déjà un peu !
Zhurong a-t-il pu tomber en panne, tout simplement, pour ne jamais se réveiller ? Si oui, avec le retour de meilleures conditions, l’engin pourrait finir par sortir de son hibernation. Les derniers relevés de températures donnés par Perseverance évoquent un mercure à −20 degrés Celsius au niveau du cratère Jezero, ce qui est très froid. Sachant que Zhurong est un peu plus au nord que Perseverance, dans une région encore plus fraîche, il attend peut-être un climat un peu plus clément pour relancer ses batteries. Des températures autour des −15 degrés seraient suffisantes pour récupérer suffisamment d’énergie.
Zhurong est même programmé pour se réveiller automatiquement que lorsque le thermomètre monte à cette température. Pour Andrew Jones, c’est une possibilité : « Peut-être que la Chine attend juste de meilleures conditions. Ce qui expliquerait pourquoi elle n’a pas encore fait d’annonce définitive. » Dans ce scénario, ce n’est qu’une question de temps avant de pouvoir voir le rover repartir explorer la planète rouge.
L’hypothèse de la tempête de sable
Mais, l’autre hypothèse est un peu plus pessimiste : une tempête de sable. Ici, le problème serait tout autre, car si les panneaux solaires de Zhurong sont recouverts de poussière, il lui est impossible de se recharger. Le site d’information South China Morning Post cite des sources anonymes selon lesquelles cette hypothèse serait privilégiée par l’agence spatiale chinoise, qui tente de retrouver le contact via l’orbiteur. Mais, toujours selon ces sources, il y aurait une impossibilité de télécharger les données prises par Tianwen-1.
Quel crédit accorder à ces informations ? Difficile à dire, car le South China Morning Post est souvent critiqué pour son manque d’impartialité. Il serait trop proche du pouvoir chinois, selon ses détracteurs.
D’un autre côté, l’hypothèse est très probable. Zhurong ne possède pas d’autres sources d’énergie que ses panneaux solaires, et s’ils sont obstrués, rien ne peut le réveiller. Les tempêtes de sable ne sont pas rares sur Mars, l’atterrisseur InSight en a fait les frais récemment ! Même si les panneaux solaires du rover chinois sont censés être à l’épreuve de la poussière, une trop grande quantité pourrait dépasser leurs capacités. Si Zhurong est bien dans cette situation, il faudrait une image prise par un orbiteur pour réussir à distinguer ses panneaux solaires et voir si le problème vient bien de là. Beijing attend donc certainement la confirmation avant d’annoncer quoi que ce soit.
De toute façon, le régime chinois n’a pas à rougir de cette mission, même si elle s’arrêtait là. Zhurong était un engin prévu pour arpenter la surface de Mars pendant trois mois et il a poursuivi sa route durant un an. Il a parcouru près de deux kilomètres et a effectué toutes les tâches que l’on attendait de lui. « Zhurong est un grand succès pour la Chine, assure Andrew Jones. Que ce soit au niveau technique avec le lancement et l’atterrissage, ou du point de vue scientifique, tout est parfait. »
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