Morte et désolée, Vénus ? Les derniers travaux scientifiques démontrent plutôt le contraire : la planète connaît une certaine activité en surface, en raison de volcans qui ne sont nullement éteints. Il s’agit d’une « découverte majeure », selon Paul Byrne, professeur associé en sciences de la terre et des planètes à l’université de Washington à St. Louis.
L’annonce d’un volcanisme actif sur la deuxième planète du système solaire a été faite le 15 mars 2023, lors de la 54e conférence annuelle sur les sciences lunaires et planétaires, aux États-Unis. Elle s’est accompagnée de la publication dans la revue Science d’une étude intitulée « Changements de surface observés sur un volcan vénusien lors de la mission Magellan ».
Une déduction à partir d’images de Vénus prises il y a 30 ans
C’est d’ailleurs l’autre élément remarquable de ces découvertes. Il n’y a aujourd’hui aucune sonde spatiale active autour de la planète tellurique, qui se trouve à environ 108 millions de km du Soleil. Si des vaisseaux sont passés dans les parages dernièrement (comme BepiColombo, qui vise Mercure, ou Parker, qui s’intéresse à notre étoile), il n’y a rien sur place.
C’est donc sur la base d’une mission ancienne que les travaux conduits par Robert Herrick et Scott Hensley ont reposé. La sonde américaine Magellan a été envoyée en 1989 vers Vénus — parfois qualifiée de « sœur jumelle » de la Terre, y compris par la Nasa, même si l’analogie est discutée — pour orbiter autour de Vénus pendant quelques années.
Sur zone en 1990, Magellan se lance alors dans une mission d’ampleur : effectuer la cartographie complète de la surface vénusienne. Ce travail a fait dire à l’agence spatiale américaine que Magellan « a été l’une des missions les plus réussies dans l’espace lointain ». Magellan enverra son dernier signal en octobre 1994, après avoir été précipité dans l’atmosphère de la planète.
C’est en exploitant des éléments ayant trente ans d’âge que les deux chercheurs ont pu déterminer l’existence de volcans actifs. La chance aussi a joué un peu : Robert Herrick et Scott Hensley ont replongé dans les données de Magellan, lorsqu’ils ont eu connaissance de la prochaine mission vénusienne de la Nasa avec Veritas, trois décennies plus tard.
« Je ne m’attendais pas vraiment à réussir, raconte Robert Herrick dans les pages de l’agence spatiale américaine, mais après environ 200 heures de comparaison manuelle des images des différentes orbites de Magellan, j’ai vu deux images de la même région prises à huit mois d’intervalle et présentant des changements géologiques révélateurs causés par une éruption. »
Des suspicions croissantes d’une activité volcanique récente
La présence de volcans sur Vénus est connue depuis longtemps, mais il n’y avait pas de certitude sur des éruptions récentes. En 2015, la mission Venus Express de l’Agence spatiale européenne révélait des coulées de lave à la surface. Néanmoins, les scientifiques n’avaient pas réussi à estimer l’âge de ces volcans et de ces traînées.
Des études se sont succédé, confortant à chaque fois la piste d’une activité volcanique récente. Des coulées de lave « n’ont pas plus de quelques années », était-il affirmé en 2020. « De nouvelles preuves d’une activité tectonique et magmatique récente à la surface de Vénus », indiquait une autre étude, la même année. En 2021, même son de cloche.
« Seules quelques simulations correspondent aux images, et le scénario le plus probable est qu’une activité volcanique s’est produite à la surface de Vénus pendant la mission de Magellan », continue Scott Hensley. « Bien qu’il ne s’agisse que d’un seul point de données pour une planète entière, cela confirme l’existence d’une activité géologique moderne. »
Ces faisceaux d’indices, manifestement, ne permettaient pas d’être aussi affirmatifs que l’est la Nasa aujourd’hui. « Des preuves géologiques directes d’une activité volcanique récente ont été observées pour la première fois à la surface de Vénus », avance l’agence spatiale américaine. Il fallait au moins ça pour que la « découverte majeure » sur Vénus soit effectivement de taille.
Ces travaux consacrés à l’activité volcanique de la planète sont autant d’arguments en faveur des futures missions vers la « sœur jumelle » de la Terre. En effet, outre Veritas (scan de la surface au radar et analyse de la composition), deux autres projets sont au programme : DaVinci+ (analyse de l’atmosphère) et EnVision, un programme européen.
Bien que relativement proche de la Terre, Vénus demeure mystérieuse. Il s’avère impossible de l’observer en détail depuis la planète bleue. En cause, une épaisse couche nuageuse, très opaque et surtout très hostile. Les nuages sont chargés d’acide sulfurique. Dès lors, l’analyse optique est impossible en altitude ; il faut se servir des radars.
Au sol, ses conditions sont tout aussi épouvantables : 465 °C en surface (Vénus est la planète la plus chaude du système solaire, plus que Mercure, pourtant plus proche), avec une pression écrasante (aux alentours de 90 fois celle de la Terre, au niveau de la mer). Bref, si Vénus est la sœur jumelle de la Terre, elle a vraiment mal tourné.
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