À quoi ressemblera la France en 2100 ? Elle sera probablement plus chaude de 4 degrés selon le gouvernement, qui souhaite en tout cas s’y préparer. C’est déjà ce qu’avait expliqué le ministre de l’Écologie, Christophe Béchu, en février 2023. « Préparer notre pays à quatre degrés, ça veut dire anticiper beaucoup de changements », avait-il prévenu. On sait maintenant que cette anticipation devrait intégrer un nouveau plan d’adaptation français au changement climatique — ou PNACC.
Il a existé deux précédents PNACC, en 2011 puis en 2018, mais ces derniers intégraient seulement les trajectoires de l’Accord de Paris — viser 1,5°C pour ne pas dépasser 2 degrés –, et non un scénario à 4 degrés. Pour préparer ce nouveau plan, le ministre ouvre, à partir de ce 23 mai, une consultation publique.
Mais pourquoi le gouvernement incorpore-t-il soudainement une trajectoire à 4°C — qui semble si élevée ?
Le scénario le plus pessimiste : 4 à 5 degrés de réchauffement
En réalité, cette trajectoire est ajoutée à la première. Le prochain plan d’adaptation français au changement climatique contiendra donc deux scénarios :
- Celui de l’Accord de Paris, avec un objectif de 2°C ;
- Celui, plus pessimiste, de 4°C de réchauffement.
La prise en compte de ce scénario pessimiste provient de plusieurs sources. Le dernier avis 2023 du Conseil national de la transition écologique mentionne cette possibilité, en écrivant qu’il « regrette que la tendance actuelle des émissions mondiales de gaz à effet de serre mènerait à un réchauffement global de 4°C d’ici la fin du siècle tandis que les engagements actuels des États mèneraient à un réchauffement global de 3°C environ ».
Un réchauffement de 4 degrés est depuis longtemps considéré comme le scénario pessimiste possible. Au sein du rapport du GIEC, notamment, il existe communément plusieurs projections liées aux émissions de gaz à effet de serre, en fonction des politiques climatiques choisies par la communauté internationale. Ce sont les « trajectoires socio-économiques partagées » — shared socioeconomic pathways (ou SSP). Ces projections sont des trajectoires jusqu’à 2100.
- Scénario SSP1-1.9 : un maintien des températures en deçà de 1,5 °C (très improbable à ce stade)
- Scénario SSP1-2.6 : une augmentation entre 1,5 et 2 °C
- Scénario SSP2-4.5 : une augmentation de presque 3 °C
- Scénario SSP3-7.0 : une augmentation de presque 4 °C (ou « entre 3 et 5 °C » dans cette estimation lointaine)
- Scénario SSP5-8.5 : une augmentation de presque 5 °C
Le niveau de risque global sur les écosystèmes (et donc aussi l’humanité) s’accroît au fil de ces scénarios. Une étude parue début 2023 indiquait, par exemple, qu’un réchauffement à 4°C impliquerait que « petits et gros glaciers seraient touchés et 80 % des glaciers seraient alors amenés à disparaitre, avec une élévation du niveau des mers de 15,4 cm. »
Le nouveau scénario envisagé par la France est donc celui du SSP3-7.0. Le gouvernement semble dorénavant l’estimer comme une trajectoire crédible, étant donné que le pays connaît déjà un réchauffement de +1,8 °C et que l’année 2022 était la plus chaude depuis le début de l’ère industrielle. Si une telle situation adviendrait, il faudra notamment s’attendre à un risque de sécheresse multiplié par 4, à des canicules de deux mois, à des déplacements de population sur les côtes. De fait, il faudra végétaliser les villes, adapter les infrastructures ou même les assurances.
Mais l’adaptation à un tel scénario pessimiste ne doit pas être un abandon des mesures de mitigation. Comme le signalait le dernier rapport GIEC, les actions doivent être prises dès maintenant, rapides et amples.
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