Censées être « eco-friendly », les pailles en papier se sont répandues un peu partout — des commerces de bouche aux grandes surfaces. Objectif : mettre fin à la pollution plastique. Et pour cause, si on devait additionner tout le plastique déjà amoncelé dans les océans, la balance afficherait quelque 2,3 millions de tonnes. Les pailles en papier apparaissent comme une bonne solution, vendues comme biodégradables, conçues écologiquement. Sont-elles vraiment meilleures pour l’environnement et notre santé ?
La réponse est non, selon l’étude publiée par des chercheurs belges, le 24 août 2023. Ces pailles contiennent des PFAS — substances per- et polyfluoroalkylées –, aussi appelées « polluants éternels ». Ces produits chimiques sont effectivement néfastes pour la biodiversité, pour la santé humaine et pour les écosystèmes dans leur ensemble.
Certaines pailles en papier contiennent des polluants éternels
Que viennent faire des PFAS dans des pailles pourtant en papier ? « Afin de rendre ces matériaux imperméables, des PFAS sont ajoutés lors de la fabrication, mais ils peuvent également être présents dès le début de la chaîne d’approvisionnement en raison de l’utilisation de matières premières contaminées », explique l’étude belge.
La présence de ces produits chimiques semble être particulièrement généralisée. Les auteurs ont analysé pas moins de 39 marques différentes de pailles, présentes sur le marché belge, européen et international, fabriquées en cinq matériaux différents : papier, bambou, verre, acier inoxydable, plastique.
Pour 27 des 39 marques (soit une grande majorité de 69 %), il y avait des PFAS, pas moins de 18 composés différents. Ces produits chimiques toxiques ont été détectés pour tous les types de paille, exception faite de celles (réutilisables) en acier inoxydable. C’est logique : l’acier inoxydable est un alliage par nature très résistant à la corrosion, nul besoin de l’imperméabiliser. « Les PFAS ont été plus fréquemment détectés dans les matériaux d’origine végétale, tels que le papier et le bambou », précisent les auteurs, comme on peut d’ailleurs le constater dans le graphique ci-dessus, qui illustre les concentrations de PFAS selon le type de matériaux.
Conséquence : ces pailles sont aussi néfastes que les produits qu’elles contiennent. « La présence de PFAS dans les pailles à base de plantes montre qu’elles ne sont pas nécessairement biodégradables et que l’utilisation de ces pailles contribue potentiellement à l’exposition humaine et environnementale aux PFAS », écrivent les scientifiques. Car, pour être biodégradable, des produits ne doivent pas libérer de substances toxiques.
Cette alternative au plastique n’est donc pas si vertueuse. « L’alternative la plus durable semble être les pailles en acier inoxydable, qui peuvent être réutilisées, ne contiennent pas de PFAS et peuvent être entièrement recyclées », estiment les auteurs. Ils concluent que davantage de recherches sont nécessaires sur la présence de ces produits chimiques dans les pailles, afin de mieux en caractériser l’impact potentiel sur la santé humaine, sur la faune, et sur la flore. Les quantités sont basses à l’échelle d’une paille, l’usage est occasionnel, reste donc à savoir à quel point ces PFAS peuvent « infuser » le liquide et contaminer notre muqueuse. Il existe par ailleurs quelques marques qui semblent avoir réussi à produire des pailles en papier sans PFAS, ce qui pourrait donc devenir un critère à mieux surveiller.
Récemment, du microplastique a été retrouvé pour la première fois directement dans du sang humain et même dans nos poumons, de même qu’une maladie liée au plastique est née chez des oiseaux. Les risques posés par l’exposition à la pollution commencent à être mieux compris, et même de petites quantités peuvent, au long terme, et en s’accumulant, poser problème.
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