La phrase du président de la République résonne encore : « j’aime la bagnole », avait déclaré Emmanuel Macron, lors de son allocution télévisée — où il annonçait repousser encore la fin du charbon dans le pays. Il se trouve que le nouveau rapport « grand public » du Haut conseil pour le climat, publié début octobre 2023, intègre un comparatif des différentes sources d’émissions de gaz à effet de serre en France (durant l’année 2022). Les transports sont en tête et, parmi eux, la voiture est elle-même en tête. Ce qui n’est pas une surprise, plusieurs études ont établi le rôle de la voiture thermique dans la crise climatique.
Rappelons que les gaz à effet de serre, émis par les activités humaines (dites « anthropiques »), sont la principale cause du changement climatique, pour lequel l’urgence d’actions fortes et rapides n’est plus à prouver.
Les sources d’émissions de gaz à effet de serre en France
La répartition des émissions de gaz à effet de serre, en France, en 2022, est la suivante :
- Transports : 32 %
- Agriculture : 19 %
- Industrie : 18 %
- Bâtiments : 16 %
- Production d’énergie : 11 %
- Déchets : 4 %
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Chaque catégorie contient des sous-catégories. Pour les transports, on observe la classification suivante, le plus émetteur en haut, en fonction de l’équivalent CO2 (Mt ÉqCO2), unité de mesure des émissions de dioxyde de carbone :
- Voitures (68 Mt ÉqCO2)
- Poids lourds (33 Mt ÉqCO2)
- Véhicules utilitaires (20 Mt ÉqCO2)
- Avions (5 Mt ÉqCO2)
- Autres (5 Mt ÉqCO2)
Les transports ne sont pas en baisse et c’est un gros problème
Le Haut conseil pour le climat relève une augmentation significative dans le domaine des transports, en 2022, après une baisse conjoncturelle en 2020-2021 (confinements, hausses des prix du carburant). La hausse est de +2,3 %. De fait, « le budget carbone indicatif a été dépassé en 2022 », précise l’organisme. Ce n’est pas minime, à une époque où ce chiffre devrait nécessairement être en baisse. Comme l’indique le rapport, atteindre les objectifs de 2023 pour la baisse des émissions du secteur transports nécessite désormais une baisse 3,5 à 5 fois plus rapide que le rapport précédent (2019-2022). C’est-à-dire une baisse de -4,9 à -6,7 Mt éqCO2/an. Bien que le constat concerne l’entièreté du secteur des transports, la voiture y étant largement majoritaire, son rôle est déterminant.
Face à cet enjeu, le Haut conseil n’est pas totalement pessimiste. Il relève que l’interdiction de la vente de véhicules thermiques fossiles neufs en 2035, ou encore le renforcement de la norme européenne pour les constructeurs aussi à l’horizon 2030, sont des « avancées importantes », de même que les aides à l’acquisition de véhicules électriques ou encore le malus français sur le thermique. « Ces politiques ont soutenu l’essor des voitures électriques, passées de 9,7 % en 2021 à 13,2 %
des ventes en 2022 », constate le rapport.
Mais l’organisme note aussi deux problèmes :
- Un « retard » dans la baisse de consommation des voitures, ainsi que l’électrification des poids lourds et des véhicules utilitaires
- L’inégalité sociale devant la transition, qui freine la baisse des émissions : les aides et les incitations actuelles « n’orientent pas suffisamment la production vers des véhicules petits, plus légers et plus abordables, ce qui aggrave les inégalités.»
L’enjeu climatique est donc factuellement focalisé autour de la voiture, thermique en particulier, dont les chiffres la désigne comme l’une des pires sources d’émissions de gaz à effet de serre. La « bagnole », aujourd’hui, n’est plus un sujet à prendre à la légère.
Des baisses dans les émissions, mais qui ne sont toujours à la hauteur
Le Haut conseil pour le climat met en lumière plusieurs points d’attention par secteur, pour mieux en comprendre les évolutions — en fonction des baisses et des hausses dans les émissions :
- L’industrie a connu une baisse de -6,4 % de ses émissions en 2022. Bien que ce soit en grande partie dû aux mesures de sobriété, le rapport retient aussi une baisse structurelle, sur le long terme. Malgré tout, le secteur a dépassé son « budget carbone indicatif » sur la période 2019-2022, y compris en 2022 malgré cette baisse. Pour atteindre les objectifs climats de 2030, la baisse doit être de 1,4 à 1,6 fois plus rapide que sur cette période.
- L’agriculture a quant à elle connu une baisse de -2,1 % en 2021 (l’analyse de l’année 2022 n’étant pas disponible dans le rapport), pour un résultat cohérent avec le bilan carbone indicatif. À nuancer cependant : « cette évolution provient davantage des difficultés socio-économiques que d’une stratégie de décarbonation, avec notamment la baisse du cheptel bovin et la hausse du prix des engrais », signale le Haut conseil pour le climat, qui regrette un manque d’ambition face aux enjeux climatiques dans le politique agricole française.
- Le secteur du bâtiment a connu, entre 2021 et 2022, une baisse de -14,3 % de ses émissions, mais laquelle est due aux effets météorologiques. S’ils sont soustraits, la baisse réelle est de -5,3 %. « Malgré plusieurs améliorations en 2023, le rythme actuel de rénovation du parc résidentiel est insuffisant » compte tenu des objectifs.
- Les émissions liées à l’énergie ont augmenté en 2022, de +4,9 %, « car les centrales à gaz ont davantage fonctionné à cause des faibles productions nucléaires et hydroélectriques ». Bien que les résultats soient inférieurs au budget carbone indicatif, ce qui est donc positif, le Haut conseil pour le climat estime que la France reste en retard, « avec trop d’énergie fossile utilisée pour produire de l’électricité, et un développement insuffisant des énergies renouvelables et du biométhane ». La baisse doit être entre 3 à 5 fois plus rapide que sur la période 2019-2022, si l’on veut atteindre les objectifs de 2030.
Enfin, s’ajoute une baisse qui n’est pas tout à fait heureuse : la quantité de carbone stockée dans les forêts françaises a diminué de -21 %. C’est un problème, car ce sont des puits de carbone naturels ; leur diminution réduit ainsi ce frein au changement climatique. En l’occurrence, on le doit à « la forte mortalité en forêt due à la sécheresse, aux incendies et aux ravageurs, combinés à une plus faible croissance des arbres ». Ces événements extrêmes sont liés au changement climatique, dans une sorte de cercle vicieux.
Le constat du Haut conseil pour le climat, en tout cas, est très clair : « Les politiques et engagements actuels ne suffisent pas à l’atteinte des objectifs climatiques. »
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