Les punaises de lit sont de retour en force. Après une absence d’environ 70 ans, du fait de l’emploi de pesticides puissants tels que le DDT, elles ont fait leur (ré)apparition dans les hôtels de luxe, les spas, les grands magasins, les métros, les cinémas et, bien sûr, les maisons.
Je suis entomologiste en santé publique et, dans le cadre de mon travail, j’ai étudié ces petits suceurs de sang — allant jusqu’à les laisser se régaler sur mes propres appendices, au nom de la science… Personne n’aime avoir affaire à des punaises de lit. Heureusement, il existe des moyens de minimiser le risque de devoir s’y confronter.
Reconnaître une punaise de lit
La punaise de lit commune, Cimex lectularius, parasite notre espèce depuis des milliers d’années. Historiquement, ces minuscules suceuses de sang étaient courantes dans les habitations humaines du monde entier, donnant un véritable sens au vieux dicton qu’on trouve toujours par endroit : « Dors bien serré, ne laisse pas les punaises de lit te piquer »…
Jusqu’au milieu des années 1990, elles avaient pratiquement disparu dans les pays en développement — période à laquelle elles ont commencé à faire leur retour, pour diverses raisons : mise en place de résistance à certains pesticides utilisés contre elles, restriction ou interdiction de certains d’entre eux, changements dans les méthodes de lutte contre les parasites, ou encore augmentation des voyages internationaux.
Dans de nombreuses régions du monde, les punaises de lits sont désormais des parasites urbains d’importance.
Les adultes, d’un brun-rougeâtre, mesurent quelques 5 mm. Elles sont de forme ovale et aplatie, et ressemblent à des tiques non nourries ou à de petits cafards. Les jeunes, minuscules, sont de couleur blanc-jaunâtre.
Repliée sous leur tête, les punaises de lit possèdent une longue trompe (ou proboscis) : une pièce buccale tubulaire qu’elles peuvent étendre pour prendre leur repas de sang. Une punaise de lit n’a besoin que de trois à dix minutes pour consommer jusqu’à six fois son poids en sang en un seul repas.
Ces insectes se cachent dans les fissures et les crevasses de nos habitations, de préférence celles situées à quelques mètres d’un lit, ne sortant que pour se nourrir d’un hôte peu méfiant. Puis elles retournent en courant dans leur cachette, où elles s’accouplent et pondent des œufs.
Les maisons peuvent être infestées par des milliers de ces bestioles assoiffées de sang. Matelas et sommier sont alors souvent couverts de taches fécales noires révélatrices. Dans les cas graves, il peut y avoir d’épaisses accumulations d’excréments, des centaines de mues perdues et des œufs sur plusieurs millimètres d’épaisseur.
Au-delà des piqûres, l’impact psychologique des punaises de lit
Les punaises de lit ont été suspectées de transmettre plus de 40 types de pathogènes, mais il y a peu de preuves qu’elles transmettent des agents pathogènes humains, à l’exception possible du micro-organisme qui cause la maladie de Chagas. Les infestations extrêmes peuvent toutefois, dans de rares cas, entraîner une perte de sang suffisamment importante pour provoquer une anémie.
Leurs principaux impacts médicaux sont liés aux piqûres, en raison des démangeaisons et inflammations associées. Les réactions les plus courantes à ces attaques sont des taches rouges qui grattent. Situées au niveau des sites de piqûre, elles disparaissent généralement en une semaine environ. Certaines personnes peuvent présenter des réactions cutanées complexes, y compris de l’urticaire et des cloques, ou encore des réactions allergiques.
Mais au-delà de ces manifestations physiques, il ne faut pas négliger les effets émotionnels et psychologiques de ces insectes sur leurs victimes.
Une infestation par des punaises de lit a souvent pour effet secondaire de susciter une inquiétude constante et un sentiment de honte. La rencontre avec ces parasites peut entraîner de la nervosité, de l’anxiété et des insomnies. Un Canadien en détresse l’a exprimé ainsi :
« Pour être honnête, tant que vous n’avez pas vécu une [infestation], vous n’avez aucune idée de l’horreur que cela représente. Il est tout à fait naturel de devenir paranoïaque ; on perd le sommeil, on finit par rêver et penser aux punaises de lit – elles consument chaque fibre de notre être… »
Une étude sur les personnes qui ont été confrontées aux punaises de lit a d’ailleurs révélé qu’environ la moitié d’entre elles ont rapporté des troubles du sommeil et un isolement social liés à l’infestation.
Avec mon collègue, nous avons analysé 135 messages Internet concernant des infestations de punaises de lit. La majorité d’entre eux (81 %) faisaient état d’au moins trois comportements généralement associés au syndrome de stress post-traumatique : des réactions de reviviscence de l’événement avec des souvenirs intrusifs et des cauchemars, des sursauts, et une hypervigilance.
Six messages décrivent des nettoyages intenses et répétés de la maison ou du bureau. Cinq font état d’un évitement persistant des personnes, des activités et des lieux susceptibles d’entraîner la transmission d’insectes ou d’éveiller des souvenirs de la rencontre initiale. Enfin, cinq messages font état de pensées suicidaires ou de tentatives de suicide. Il existe d’autres rapports anecdotiques de suicides ou d’overdoses de drogues concernant des personnes luttant contre les punaises de lit.
Comment se protéger des punaises de lit ?
Bien sûr, toutes les chambres d’hôtel ne sont pas infestées de punaises de lit, mais certaines le sont. Des précautions simples peuvent contribuer à vous protéger contre une infestation. Voici quelques recommandations simples.
Se prémunir des punaises de lit à l’hôtel
À l’hôtel : laissez les choses dont vous n’avez pas besoin dans votre véhicule, tels que les vêtements supplémentaires, le matériel et l’équipement divers. Lorsque vous entrez dans votre chambre d’hôtel, placez vos bagages dans la salle de bain jusqu’à ce que vous ayez eu l’occasion d’inspecter les lieux. Retirez les draps et vérifiez que le matelas et le sommier ne contiennent pas de punaises de lit vivantes ou de taches fécales noires.
Si vous trouvez des punaises ou des signes suspects d’infestation, rendez-vous à la réception et demandez une autre chambre. Comme les punaises de lit ne se déplacent généralement pas beaucoup par elles-mêmes, d’autres chambres non adjacentes peuvent être parfaitement exemptes de parasites.
Lutter contre les punaises de lit à la maison
À domicile : il peut être difficile d’empêcher les punaises de lit d’entrer dans les maisons et les appartements, surtout si vous voyagez beaucoup. Après un voyage, défaites les bagages à l’extérieur ou dans le garage, et lavez tous les vêtements qu’ils contenaient à l’eau chaude puis séchez-les à haute température si possible (le sèche-linge est un excellent outil dans la lutte contre les punaises de lit).
Les punaises de lit peuvent également s’introduire dans votre maison, via des meubles de seconde main ou des articles achetés dans des magasins d’occasion ou lors de brocantes par exemple. Veillez à les désinfecter – plus précisément à les « désinsectiser ». Il est par ailleurs conseillé de ne jamais acheter de matelas ou de lits usagés, même s’il s’agit d’une bonne affaire…
Que faire face aux punaises de lit ?
Comme mentionné précédemment, une infestation de punaises de lit découverte dans une chambre d’hôtel doit être immédiatement signalée à la direction. Si vous trouvez des punaises de lit chez vous, ou si vous en détectez sur des objets achetés d’occasion, il est préférable de ne pas essayer de les traiter vous-même au moyen des pesticides en vente libre. Je vous recommande plutôt de contacter un exterminateur compétent, qui traitera votre espace de vie avec des pesticides adaptés, ou procédera à une désinsectisation thermique – voire les deux – pour vous débarrasser de ces insectes.
Quoi qu’il en soit, essayez de ne pas paniquer. N’oubliez pas qu’il ne s’agit que d’insectes qui n’ont rien de maléfique… Croyez-moi : il est parfaitement possible de les éliminer et d’en débarrasser votre logement.
Jerome Goddard, Extension Professor of Biochemistry, Molecular Biology, Entomology and Plant Pathology, Mississippi State University
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.
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