L’acné provient généralement d’un excès de sébum. L’hypersécrétion de cette substance huileuse encombre les pores, provoquant ainsi la formation de boutons. La bactérie Cutibacterium acnes, qui prolifère dans notre peau, peut compliquer les choses : elle se multiplie tout en se gonflant de sébum.
Dans une étude publiée le 9 janvier 2024, la microbiologiste Nastassia Knödlsede et son équipe expliquent avoir réussi à modifier génétiquement cette bactérie, afin qu’elle produise elle-même de quoi réduire la production de sébum — et donc de réduire l’acné. Ils ont ainsi commencé le développement d’une thérapie topique (par application locale sur la peau) « en utilisant ce que la nature possède déjà ».
Cutibacterium acnes est si importante pour la protection naturelle de notre peau qu’il est embêtant de chercher à s’en débarrasser. Or, c’est ce que font les antibiotiques. Quant à l’acné sévère, l’un des médicaments les plus répandus, l’isotrétinoïne, provoque des effets secondaires parfois problématiques.
De fait, cette équipe a modifié la bactérie pour lui faire produire une protéine qu’elle ne sait pas produire habituellement : la NGAL (neutrophil gelatinase-associated lipocalin). Celle-ci est produite par l’isotrétinoïne et contribue à son efficacité : la protéine NGAL donne aux sébocytes, cellules liées à la production de sébum, l’instruction de mourir. Mais en étant directement générée par la bactérie C. acnes, naturellement présente dans notre peau, on peut obtenir le même résultat en se passant des effets secondaires du médicament.
« Nous avons modifié une bactérie qui vit dans la peau »
« Nous avons modifié une bactérie qui vit dans la peau et lui avons fait produire ce dont notre peau a besoin », résume Nastassia Knödlsede. Le processus n’avait rien de facile, puisque C. acnes était « considérée comme une bactérie difficile à manipuler » génétiquement, explique la microbiologiste. « Il était incroyablement difficile d’introduire de l’ADN et de faire produire ou sécréter des protéines à partir d’un élément inséré dans son génome. »
Mais le résultat est prometteur. Dans une culture de sébocytes en laboratoire, l’application de cette culture génétiquement modifiée de C.acnes a permis de réduire la quantité de sébum. Les niveaux de sébum ont été doublement réduits en seulement 48 heures.
Le développement de cette thérapie n’est qu’à un stade préliminaire. Néanmoins, c’est toute une voie de recherche qui se développe : « Nous avons développé une plateforme technologique qui ouvre la voie à l’édition de n’importe quelle bactérie pour traiter plusieurs maladies », détaille Marc Güell, l’un des chercheurs impliqués dans cette étude. « Nous nous concentrons actuellement sur l’utilisation de C. acnes pour traiter l’acné, mais nous pouvons fournir des circuits génétiques pour créer des microbes intelligents » pour plusieurs applications, estime le chercheur.
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