C’est un nombre si grand que sa signification échappera à n’importe qui. Lundi 25 mars, une équipe travaillant à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), au Canada, a présenté un tout nouveau genre de caméra. Une caméra si réactive que même le terme « d’ultrarapide » ne suffirait sans doute pas à décrire ses performances.
Et pour cause : l’équipe de l’INRS a conçu un système qui peut capter jusqu’à 156,3 trillions d’images par seconde. En écriture décimale, cela représente 156 000 000 000 000 000 (le nombre 156, suivi de quinze zéros). C’est une cadence infernale qui, selon l’INRS, « repousse les limites de l’imagerie optique. »
Développé dans le Centre Énergie Matériaux Télécommunications (CEMT), l’appareil a reçu l’appellation de SCARF, pour femtophotographie en temps réel à ouverture codée et balayée (swept-coded aperture real-time femtophotography, en anglais). Il a également fait l’objet d’une publication dans la revue Nature Communications.
On se trouve ici à des années-lumière de ce que l’on trouve d’ordinaire dans les appareils électroniques courants. Pour un simple point de comparaison, un enregistrement vidéo sur un iPhone est calé par défaut à 30 images par seconde. D’autres modes existent selon les modèles, mais la fréquence la plus élevée atteint le double, à 60 images par seconde.
On trouve dans le commerce des caméras assurant des enregistrements à haute vitesse. Leur vélocité se compte en centaines ou en milliers d’images par seconde. Des modèles professionnels, taillés pour le secteur industriel ou pour le monde du cinéma, sont aussi à considérer, mais rien qui ne soit comparable au SCARF.
156,3 trillions d’images / seconde, pour la science
Bien sûr, les ambitions ne sont pas la capture de choses anodines, comme des gouttes d’eau tombant au ralenti, ou bien la déformation d’un visage en train d’éternuer. Les caméras actuelles suffisent largement à satisfaire des usages divertissants. Ici, il s’agit de saisir des évènements extrêmement véloces, difficilement reproduisibles ou uniques.
Par exemple, cela peut être la mécanique des ondes de choc dans les cellules vivantes ou dans la matière, le chaos optique, ou bien l’ablation laser. Des observations qui pourront « servir à développer de meilleurs produits pharmaceutiques et traitements médicaux ainsi qu’améliorer les propriétés mécaniques des matériaux. » Physique, biologie, chimie, science des matériaux, ingénierie : les domaines seraient nombreux à en profiter.
Ce n’est pas la première fois que l’équipe de l’INRS se distingue dans ce domaine.
En 2018, elle s’était illustrée avec la technologie de la T-CUP (10-trillion-frame-per-second compressed ultrafast photography), elle-même déclinée de la méthode CUP (compressed ultrafast photography), acronyme pour photographie ultrarapide compressée. La méthode CUP approchait alors les 100 milliards d’images par seconde. À l’époque, l’INRS revendiquait un système capable de capter 10 billions d’images par seconde (10−13) avec la solution T-CUP.
En fait, le SCARF se place à l’échelle de la femtoseconde (10−15), l’une des divisions les plus petites du temps. Pour avoir un point de repère, une femtoseconde est à la seconde ce qu’une seconde est à environ 31,7 millions d’années. En une femtoseconde, la lumière a le temps de traverser une distance de 0,3 micromètre.
C’est stupéfiant, mais pas autant que l’attoseconde, qui est l’échelle du dessous (10-18). Ici, il y a quasi autant d’attosecondes dans une seconde qu’il y a de secondes dans l’âge de l’univers (un peu plus de 13,8 milliards d’années). L’histoire ne dit pas encore si après le SCARF, il y aura le SCARA, taillé justement pour l’attophotographie.
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