Le télescope spatial Hitomi a-t-il été perdu à cause d’une mise à jour logicielle qui ne s’est pas déroulée correctement ? C’est le scénario que creuse le site Hackaday, en s’intéressant à la concomitance de plusieurs évènements qui pourraient bien expliquer pourquoi le satellite est devenu subitement incontrôlable, alors qu’il était censé manœuvrer de façon à démarrer sa mission d’observation de la structure de l’univers à la fin du mois de mars.
Rud Merriam, un ingénieur logiciel à la retraite, explique que le satellite était en train de se positionner afin de pointer ses instruments de mesure vers la galaxie spirale barrée NGC 4319 et l’objet quasi-stellaire Markarian 205. À ce moment-là, le système de contrôle d’attitude ( ACS — Attitude Control System) a commencé à utiliser les données du système de suivi stellaire (STT — Star Tracking) pour ajuster la position du satellite. C’est là que les choses se seraient gâtées.
Normalement, le STT aurait dû mettre à jour un autre système de contrôle, appelé unité de référence inertielle (IRU — Inertial Reference Unit). Or, c’est peut-être cette actualisation qui n’a pas eu lieu, estime Rud Merriam, qui ajoute que les contrôleurs au sol n’auraient pas pu voir à temps ce problème et intervenir pour le corriger. La raison ? Le satellite traversait au même moment l’anomalie magnétique de l’Atlantique sud, qui est une vraie plaie pour les activités aérospatiales.
Comme l’explique Wikipédia, cette zone immense « peut perturber les satellites et autres engins spatiaux dont ceux qui orbitent à quelques centaines de kilomètres d’altitude avec une inclinaison comprise entre 35° et 60°. Les satellites suivant ces orbites passent régulièrement dans l’anomalie, s’exposant alors pendant plusieurs minutes à de forts niveaux de radiation ».
Dans le cas de la station spatiale internationale par exemple, il a fallu prévoir un revêtement spécial pour protéger l’équipage et les instruments de bord.
Une protection dont n’a visiblement pas bénéficié Hitomi. Non seulement l’anomalie magnétique a temporairement provoqué un blackout des communications entre les contrôleurs au sol et le télescope spatial lorsqu’il a fallu survoler l’Atlantique sud, mais en plus les radiations ont peut-être dégradé l’électronique. Or, le temps que la communication soit rétablie, l’engin avait déjà entamé sa course folle.
Le scénario avancé par Rud Merriam continue en envisageant un désaccord entre le STT et l’IRU concernant l’attitude du satellite. L’ingénieur explique que dans ce cas-là c’est l’IRU qui est prioritaire, mais ses données étaient erronées, probablement du de l’échec de la mise à jour évoquée précédemment entre le STT et l’IRU. À partir de là, les choses ont empiré puisque la procédure de récupération automatique se basait sur des indications fausses de certains instruments de bord.
Des données erronées générant d’autres d’autres données erronées pourraient expliquer la perte d’Hitomi
Au lieu de rétablir le satellite, les tentatives de contrôle ont aggravé sa vrille, ce qui expliquerait pourquoi il a changé d’orbite et perdu sa stabilité sur trois axes, pourquoi il a perdu certains de ses panneaux solaires, et pourquoi les contrôleurs au sol n’ont jamais pu établir une liaison continue. En tournoyant sur lui-même, impossible pour lui de communiquer avec le centre de contrôle puisque son antenne est rarement orientée dans la bonne direction.
Les explications de Rud Merriam paraissent très convaincantes, mais il faudra attendre de connaître les conclusions de l’agence d’exploration aérospatiale japonaise pour voir si la concomitance d’une défaillance logicielle et d’un survol de l’anomalie magnétique de l’Atlantique sud est bien à l’origine de la perdition du télescope spatial. Car il ne s’agit ici que d’une hypothèse. D’autres facteurs peuvent aussi avoir provoqué cette catastrophe, comme une collision avec un débris spatial, une explosion ou une défaillance matérielle.
L’agence spatiale nipponne a indiqué le 28 mars le lancement d’une vaste enquête qui devra « examiner avec attention toutes les phases de conception, de fabrication, de vérification et opérationnelles dans le but d’identifier les causes qui ont pu provoquer cette anomalie ». Dans le même temps, elle a annoncé l’abandon des tentatives de récupération du satellite, après plusieurs semaines d’effort en vain.
Le télescope spatial Hitomi, aussi connu sous le nom d’Astro-H, devait observer la structure de l’univers. Ses outils spécialisés dans l’étude des rayons X devaient notamment servir à étudier les amas de galaxies, la matière noire, les trous noirs supermassifs et les phénomènes non thermiques.
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