De nombreux articles annoncent « une super Lune bleue visible en France » le soir du 19 août 2024. Attention cependant à ces formulations pour la plupart trompeuses : si vous espérez contempler une Lune teintée de bleu et plus grosse que d’habitude, dans la nuit de lundi à mardi, vous risquez d’être déçus. La Lune est comme d’habitude et il n’y aura rien d’inhabituel à observer.
D’où vient la « super Lune bleue » ?
L’expression de « super Lune bleue » est sans fondement scientifique. Mais, alors, pourquoi revient-elle si régulièrement ? La méprise semble encouragée par le fait que la Nasa elle-même parle de « super Lune » très souvent, et en l’occurrence aussi de « Lune bleue ».
C’est ce qu’on peut voir dans une publication officielle de l’agence spatiale du 12 août dernier. Même si l’article de la Nasa admet que la Lune ne sera pas réellement bleue dans le ciel, cette communication contribue très certainement à entretenir la confusion sur ce qui va se passer — rien de plus que d’habitude.
Non, la Lune ne devient pas bleue
La Lune ne prendra pas une teinte bleutée dans la nuit du 19 au 20 août. On verra simplement une pleine Lune, de la même couleur que d’habitude.
L’expression parait ici utilisée pour désigner le simple fait qu’il s’agit de la troisième pleine Lune d’une saison qui en totalise quatre. Effectivement, il suffit de consulter un calendrier pour constater que durant l’été 2024 (qui a commencé le 20 juin et se terminera le 22 septembre avec l’arrivée de l’automne), la pleine Lune se produit 4 fois : le 22 juin, le 21 juillet, le 19 août et le 18 septembre. En général, on compte plutôt 3 occurrences de la pleine Lune en une seule saison, mais cela peut arriver qu’il y en ait 4.
La description de cette situation comme une « Lune bleue » (qui désigne alors la 3e pleine Lune de la saison, et non la 4e) n’est cependant pas astronomique, elle est d’origine culturelle. C’est souvent le cas avec les surnoms donnés à la Lune. Ils sont poétiques, mais portent à confusion, car il ne faut pas les prendre au premier degré ( « Lune rose », « Lune des fleurs », etc).
The Farmers’ Almanach, un périodique américain publié depuis 1818, a contribué à populariser des surnoms de Lune empruntés à la culture amérindienne, en les reprenant dans les années 1930. Le sens de « Lune bleue saisonnière » semble d’abord y avoir prévalu. Puis, plus tard, dans les années 1940, l’expression « Lune bleue » a aussi commencé à être utilisée pour décrire 2 occurrences de la pleine Lune dans un même mois, complexifiant encore plus la situation.
On comprend mieux comment il est devenu compliqué de faire la part des choses entre des expressions culturelles et traditionnelles d’une part, et la communication scientifique d’autre part. Puisque la Nasa parle elle-même de « Lune bleue », on peut avoir l’impression que le terme est scientifique alors que ce n’est pas le cas.
Non, la Lune ne devient pas super
Régulièrement, l’expression de « super Lune » revient pour décrire l’astre. Pourtant, pas plus que la « Lune bleue », les astronomes ne reconnaissent ce terme comme valable scientifiquement. L’expression de « super Lune » vient de l’astrologie (qui n’est pas une science, contrairement à l’astronomie). C’est l’astrologue Richard Nolle qui a inventé ce terme en 1979, pour désigner la pleine Lune survenant quand l’astre est au plus proche de la Terre. Certaines publications le présentent à tort comme un astronome — à nouveau, le fait que la Nasa le cite comme une source peut prêter à confusion.
Voilà plutôt ce qu’en dit un véritable astronome. « La Lune a une trajectoire elliptique, donc des fois, elle est plus proche de nous… et des fois, ça arrive le jour d’une pleine Lune. […] Elle est à peine plus proche, ce qui fait que la différence de taille (environ 10 %) n’est pas perceptible », résume Éric Lagadec de l’Observatoire de la Côte d’Azur, sur X.
Pour décrire plus justement ce phénomène, les astronomes préfèrent parler de périgée-syzygie. Ce nom compliqué signifie simplement que la pleine Lune survient lorsque la Lune est sur le point le plus proche de son orbite autour de la Terre. « Périgée » désigne le moment de cette distance minimale Terre-Lune ; « syzygie » désigne le moment de la pleine Lune. Au périgée, la Lune est à environ 363 300 km de la Terre (et à environ 405 500 km à l’apogée).
Même si le phénomène est bien réel, pour notre œil le changement est imperceptible. Alors que la Lune est un peu plus proche de nous au périgée, la variation du diamètre apparent de la pleine Lune ne se remarque pas.
La Lune est au périgée le 21 août 2024 à 7h01, à une distance de 360 196 km. La pleine Lune survient le 19 août à 20h25 précisément. Les deux phénomènes coïncident à peu près. Par conséquent, on peut bien parler de périgée-syzygie — mais pas de « super Lune bleue ».
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